L'épidémie semble avoir
touché jusqu'aux grands noms du septième art. Netflix
a notamment contaminé les frères Coen (The
Ballad of Buster Scruggs),
le japonais Sion Sono (The Forest of Love)
ou bien même Brad Anderson qui avec son dernier long-métrage La
Fracture (Fractured
en VO) s'intéresse à son tour à la célèbre plate-forme pour y
déposer le fruit de son dernier effort cinématographique. L'auteur
des éblouissants Session 9,
Happy Accidents,
Transsibérien,
The Call
mais encore plus de l’implacable thriller labyrinthique et
anxiogène The Machinist
dans lequel l'acteur Christian Bale repoussait les limites des
contraintes physiques revenait donc en 2019 avec un projet
relativement proche de ce dernier. Sur la base d'un scénario écrit
par Alan B. McElroy auquel on doit notamment celui du survival
cradingue Wrong Turn
en 2003, Brad Anderson tente de retrouver la puissance de The
Machinist
tout en y parvenant avec plus ou moins de bonheur...
Alors
que le chef-d’œuvre de Brad Anderson proposa en 2005 l'une des
expériences cinématographiques et émotionnelles les plus intenses,
quatorze ans plus tard, le cinéaste plonge l'acteur Sam Worthington
dans un contexte qui se veut similaire. En effet, durant cent
minutes, son personnage, Ray Monroe, va tenter de dénouer les
curieux événements qui entourent la disparition de son épouse
Joanne (Lily Rose) et de leur fille Peri (Lucy Capri) après que
cette dernière ait été emmenée d'urgence à l’hôpital Ray à
la suite d'une chute sur un chantier près d'une station-service.
Là-bas, après que le père de famille ait enregistré sa fille,
celle-ci et sa mère son conduites à l'étage de radiologie. Dans la
salle d'attente, Ray patiente... durant de longues heures. Mais
lorsqu'ensuite il demande à voir les siens, il se voit répondre que
Peri n'a pas été enregistrée et que le seul patient à avoir été
ausculté, c'est lui !
Si
l'on comprend très rapidement que le nœud de l'intrigue se situe
entre l'éventualité d'un enlèvement et le délire d'un ancien
alcoolique ayant tout imaginé, Brad Anderson, contrairement à The
Machinist
(dont le scénario était dû au scénariste Scott Kosar), s'évertue
dans le cas présent à laisser des indices trompeurs qui font de
Fractured
un thriller de bonne facture mais pas aussi formidablement construit
que ce qui demeure la référence du réalisateur dans ce domaine. Un
procédé relativement malhonnête qui laisse envisager un sévère
manque d'intégrité concernant l'écriture puisqu'en usant de
subterfuges, réalisateur et scénariste ont ainsi évité d'avoir
trop à ''plancher'' sur le scénario et son adaptation sur grand
écran. Si certains aspects participant à l'exceptionnel climat qui
règne dans l’hôpital où se joue une grande majorité des scènes
sont dus au score de Anton Sanko (rappelant une fois de plus celui composé par Scott Kosar pour The Machinist)
et à la photographie automnale de Björn Charpentier, le spectateur
émettra cependant des doutes quant à la caractérisation douteuse
de certains personnages. Tel le docteur Lucadoes (interprété par
Chris Sigurdson), l'agent de sécurité Jeff (Chad Bruce) ou encore
la réceptionniste (Natalie Malaika) qui traînent tous derrière eux
un comportement des plus ambigus qui laisse supposer une vaste
organisation tournée vers le trafic d'organes. Brad Anderson en
rajoute, entre comportements agressifs de la part du personnel
soignant et messes-basses entre médecin et agent de sécurité... Le
réalisateur pousse ainsi le spectateur vers une direction qui n'est
peut-être pas celle à laquelle celui-ci s'attendait forcément. A lui de juger sur place. Moins fort, moins étourdissant et
surtout bien moins développé que The
Machinist,
Fractured
n'en est pas moins pour autant un thriller efficace, paranoïaque et
malaisant qui séduira ceux qui n'ont pas encore fait la connaissance
quatorze ans plus tôt, de l'insomniaque Trevor Reznik...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire