Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

Labels


mardi 22 octobre 2019

Les Âmes Grises d'Yves Angelo (2004) - ★★★★★★★☆☆☆



Comme si la mort et le désespoir avaient jeté leur dévolu sur un petit village français durant l'hiver 1917, Les Âmes Grises réserve à ses spectateurs l'une des plongées dans la torpeur de la première guerre mondiale les plus désolante. Triste à faire pleurer des cailloux. A transformer les superbes décors de Dombasle-sur-Meurthe, de Nancy, de Ville-sur-Saulx et de Vic-sur-Seille pour les faire ressembler à de sinistres peintures d'où l'artiste-peintre aurait oublié d'adjoindre la moindre couleur pour n'en laisser s'exprimer que des teintes hivernales. Là-bas, on entend tonner les coups de cannons comme autant de coups de tonnerre. Mais alors que la jeunesse française s’agglutine sous son ciel voilé par les nuages artificiels des explosifs, au village, comme un mal étrange s'étendant au delà de la frontière qui le sépare du champ de bataille, des événements tragiques vont se succéder. Comme une extension au conflit. Comme si le Créateur posait son doigt accusateur sur ceux qui eurent la faiblesse ou la chance d'échapper au combat...

Mais quel mal étrange atteint ce professeur qui après avoir sensiblement perdu la tête en classe a choisi de revêtir sa chambre de messages écrits à l'aide de ses excréments ? Sa remplaçante, la jolie Lysia Verhareine, mérite-t-elle le sort qui bientôt va s'abattre sur celui qu'elle aime et qui par conséquent offrira une bien triste fin à leur amour ? Qui donc a tué cette petite fille et l'a laissée là, au sol, dans le froid et l'humidité ? Qui donc est le procureur Pierre-Ange Destinat, énigmatique, avare en parole et apparemment dénué d'émotion ? Ou le juge Mierck qui cache peut-être sous sa petitesse et ses rondeurs le mal absolu... ? Comme les hurlements de celui que l'on va exécuter pour un meurtre qu'il n'a pas commis, les pleurs d'une jeune femme qui vient de perdre son amant au champ de bataille ou la souffrance silencieuse d'un notable craint par son entourage, Les Âmes Grises est une œuvre douloureuse qui n'exploite que dans d'infimes proportions la joie et le bonheur de certains de ses personnages. Des lettres d'amour rassurantes, emplies des promesses d'une retrouvaille prochaine. Ou plus simplement, le partage d'un dîner lorsque la solitude se fait trop pesante. Et pourtant, malgré ces trop rares instants de joie contenue, le long-métrage d'Yves Angelo adapté du roman éponyme de Philippe Claudel paru un an auparavant en 2003 semble se complaire dans la noirceur. Comme si toute bonne action devait y être systématiquement salie.

Le pouvoir de la Justice (injustice?) est ici, sans réserve. À travers le portrait de ce juge formidablement interprété par le regretté Jacques Villeret qui trouvait là, le moyen de laisser s'exprimer tout son talent. Face à un Jean-Pierre Marielle de marbre. Imposant, muet, mais non dénué d'émotion. Et d'ailleurs, de cet improbable monceau de pessimisme auquel le réalisateur imprime un tel degré de noirceur qu'il lui confère une aura presque fantastique, surnagent quelques moments remarquablement touchants. Une émotion à fleur de peau qui ne peut que s'effacer, si misérable soit-elle face à la montagne d'horreurs qui s'empare du village et de ses habitants. Une émotion qui ne fera pas le poids face à des actes dénués de morale lorsque celle-ci tentera de percer la croûte d'un village assiégé par un mal étrange. Celui de la corruption. Denis Podalydès parcourt de sa fragile silhouette mais de son immense talent Les Âmes Grises dans le rôle du policier Aimé Lafaille. Michel Vuillermoz et Serge Riaboukine y sont respectivement un maire et un aubergiste trop rares à l'écran. Au son des cannons, sur un ton linéaire et un rythme ankylosé, l’œuvre d'Yves Angelo tente d'imposer quelques stupéfiants visuels. Comme cette institutrice face à un horizon lointain d'où se font entendre les bombardements. Le spectacle est remuant, âpre et éclairé de rarissime moments de joie. Une jolie mais déprimante expérience cinématographique...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...