C'est lors d'une nuit
pluvieuse qu'au volant de sa voiture, Robert (vlà un prénom qui a
du cachet!) croise sur la route Élisabeth. Effrayée et souffrant
d'amnésie, la jeune femme est incapable de dire ce qui lui est
arrivé tout en sachant pertinemment qu'elle est en danger. Robert la
prend sous son aile, l'emmène chez lui, mais dès le lendemain,
alors qu'il est parti travailler, Élisabeth est rattrapée par ceux
qui lui veulent apparemment du mal. Un certain docteur Francis, et
Solange, son assistante. Ces deux là forcent Élisabeth à les suivre
et l'emmènent jusqu'à une grande tour dans laquelle sont déjà
séquestrés un certain nombre d'hommes et de femmes, qui eux aussi,
ont perdu la mémoire. C'est dans ce contexte que la jeune femme fera
la connaissance de Catherine et retrouvera Véronique avec laquelle
elle tenta de prendre la fuite la nuit précédente... La Nuit
des Traquées
est le vingt-septième long-métrage du cinéaste français Jean
Rollin, connu chez nous pour avoir produit un certain nombre de
séries Z (et pas mal de pornos sous pseudonymes) que les amateurs de nanars tiennent pour cultes. Ne
dérogeant pas à cette tradition, La Nuit des
Traquées
est donc une bande horrifique que d'aucun jugera de navrante même si
elle demeure quelque peu touchante puisqu'à l'époque, il n'était
pas coutume en France de voir tant d’œuvres fantastiques tournées
sur notre territoire. C'est ainsi que Jean Rollin, ex pourvoyeur de
longs-métrages pornographiques auxquels participa parfois l'une de
ses actrices fétiches Brigitte Lahaie, pénètre une fois de plus la
frontière entre réalité et fantasme. Car La
Nuit des Traquées
a bien l'air d'être un rêve, ou plutôt un cauchemar auquel sont
conviés les spectateurs. Après un porno en 1977 (Vibrations
Sexuelles),
le cinéaste offre l'immense opportunité à Brigitte Lahaie (combien
d'actrices X peuvent-elles en effet se targuer d'avoir pu bénéficier
d'une carrière dite « classique »?)
de tourner dans un « vrai »
film dès 1978 avec Les Raisins de la Mort.
Avec de vrais dialogues, et un véritable scénario.
La Nuit des
Traquées est
le
troisième long-métrage classique auquel participera l'actrice
auprès de Jean Rollin après avoir tourné entre-temps avec (tout de
même) Henri Verneuil, Gérard Oury ou encore Jean-Jacques Beinex. Si
l'idée de base est au demeurant fort intrigante, le film souffre
malheureusement d'une mise en scène et d'une interprétation
catastrophique. À tel point que l'on a parfois l'impression de se
retrouver face à du théâtre d'avant-garde. La faute à une
post-synchronisation désastreuse et à des interprètes figés dans
le marbre et incapables de véhiculer la moindre émotion. Si Jean
Rollin ne sera pas le dernier à donner sa chance à une ancienne
actrice porno (Virginie Despentes aura eu le malheur de proposer un
nullissime Baise-moi
vingt ans plus tard), il n'aura malheureusement pas eu le talent d'un
John Waters qui lui, offrit une belle reconversion à la star
américaine du X dans les années quatre-vingt, Traci Lords.
Jamais
effrayant, La Nuit des Traquées prête
même parfois à sourire tant le jeu des interprètes est à l'opposé
de ce à quoi le spectateur est en droit de s'attendre. Les acteurs
(trices) semblent sous hypnose, comme balançant sur l'écran des
incantations souvent grotesques et rarement jubilatoires. Les décors
sont d'une pauvreté affligeante et qu'on ne vienne surtout pas me
dire que l'équipe technique du film comprend une costumière tant
les interprètes semblent être venus sur le plateau vêtus de leurs
propres vêtements. L'oeuvre de Jean Rollin semble révéler un
financement de misère et faire peu de cas de son scénario.
Pourtant, malgré tous ses défauts, La Nuit des
Traquées finit
par agir. Ne serait-ce que parce qu'il réussi à nous endormir. A
nous anesthésier comme le sont ses personnages. Qu'on le veuille ou
non, le film de Jean Rollin parvient à créer un climat qui dans sa
dernière partie parvient à happer le spectateur. Du moins, est-ce
ainsi que je l'ai ressenti. Par contre, mieux vaut être prévenus :
question gore, le film se contente d'une paire de ciseaux plantés
dans les yeux et en matière de sexe, le film ne propose que deux
très ennuyeuses scènes de nu. Pas de quoi être aux anges, donc.
Alors, si La Nuit des Traquées est
loin, très loin d'être un grand film, il se peut qu'il agisse de la
même manière sur d'autres spectateurs. Quant aux amateurs de
nanars, ils seront comblés.
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