Sur grand écran,
l'acteur américain William H. Macy demeurait en cette année 2005,
fidèle au type de personnages qu'il incarna notamment dans
l'excellent Fargo
des frères Coen une dizaine d'années auparavant. Soit celui du
loser. Mais contrairement au personnage de Jerry Lundegaard que
l'acteur incarna dans celui-ci, le héros de Edmond
choisit non pas d'extorquer de l'argent à son beau-père mais de
quitter la vie telle qu'il a connue jusqu'ici. Marié, père de
famille et cadre supérieur d'une grande société, c'est sur un coup
de tête consécutif au message émit à son encontre par une diseuse
de bonne aventure qu'Edmond décide de tout quitter pour pénétrer
dans un monde auquel il n'était pas préparé. De ses débuts en
1979 avec la pièce de théâtre Bleacher Burns
jusqu'en
2008 et sa participation à la série Fear
Itself,
le cinéaste américain Stuart Gordon a réalisé, scénarisé et
produit une vingtaine de séries télévisées et de longs-métrages.
Au cinéma, il est surtout connu pour avoir débuté sa carrière de
cinéaste avec le culte et très gore Re-Animator.
Alors que son œuvre toute entière est émaillée de longs-métrages
aux propos souvent fantastiques et surnaturels, Stuart Gordon a prix
pour habitude dès l'année 2003 d'aborder des sujets de fond
beaucoup plus proches de nous. Ses personnages devenant ainsi les
témoins d'une société ravagée et dominée par le sexe, l'argent
et la criminalité. Il invente notamment une nouvelle forme de héros
qui ont tous en commun d'être d'une grande naïveté et sont tous
insuffisamment préparés à leur nouvelle existence. Après le petit
peintre en bâtiment Sean Crawley de King of the
Ants
et avant l'infirmière Brandi et le sdf Tom de Stuck,
Edmond s'ouvre à des perspectives d'avenir dont il perdra le
contrôle. Ce futur qu'il espère radieux et qui l'enverra en prison.
Edmond
forme avec les deux autres, une trilogie déprimante vouant un culte
aux miséreux. Stuart Gordon leur rend hommage en leur consacrant une
œuvre désespérée, nihiliste et mortifère. Là encore, il laisse
tourner sa caméra dans des artères rendues à une faune
hétéroclite ne se réveillant qu'une fois le soleil couché.
C'est
sans concession que le cinéaste choisit de pénétrer un monde
manquant cruellement d'optimisme, dans lequel chacun cherche à tirer
profit de l'autre. Edmond dresse
le portrait d'une Amérique corrompue par l'argent. Qu'il s'agisse de
la prostituée, de la serveuse ou de l'étrange maquereau flairant le
bon coup, tous régissent leur existence sur le mode du billet vert.
Avec un certain cynisme, Stuart Gordon provoque le clash entre son
héros et l'une des rares femmes ayant encore conservé son intégrité
morale en la tuant de plusieurs coups de couteau. Derrière la
noirceur du propos, le réalisateur continue à mettre en place des
séquences hautement improbables comme pour désamorcer les passages
les plus délicats. C'est ainsi que bien qu'étant un excellent
acteur, le personnage qu'incarne William H. Macy apparaît parfois
lors de scènes totalement absurdes.
La
naïveté du héros est telle que parfois, on a du mal à y croire
vraiment. L'individu qu'il forge tout au long du film est à ce point
hors du contexte qu'il frise le ridicule. Edmond
n'en demeure pas moins une œuvre choc, qui en dehors de quelques
passages pas vraiment convaincants marque par son pessimlsme
permanent. En l'espace de moins d'une heure trente, Stuart Gordon
offre à son principal personnage l'occasion d'un véritable chemin
de croix où Dieu et la religion ne sont jamais très loin. Aux côtés
de William H. Macy nous retrouvons l'actrice Mena Suvari dans le rôle
de la prostituée et Russel Hornsby dans celui de Shill, on
retrouvera d'ailleurs ces deux interprètes deux ans plus tard dans
le rôle du couple formé à l'occasion de Stuck.
George Wendt quant à lui aura déjà incarné l'infâme Duke Wayne
dans King of the Ants.
Enfin, c'est au détour d'un hôtel sordide que l'on découvrira avec
plaisir la présence de Jeffrey Combs, le plus fidèle interprète du
cinéaste. Comme pour les deux autres longs-métrages cités plus
haut, Edmond
se révèle une très bonne surprise, les trois films complétant
ainsi une excellente trilogie. En espérant que Stuart Gordon se
réveille un jour de sa léthargie (cela fait dix ans qu'il n'a rien
tourné) et nous propose pourquoi pas, une nouvelle aventure urbaine
dans les bas-fonds de sa ville chérie...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire