Le nom de Junko Furuta ne
dira certainement pas grand chose à la majeure partie d'entre nous
et pourtant, cette jeune japonaise de seize ans, étudiante dans la
préfecture de Saitama à Misato vécu un véritable calvaire long de
quarante-quatre jours avant de mourir de ses blessures. Les
coupables : quatre jeunes gens tous âgés entre seize et
dix-huit ans. Quatre paumés, tous issus d'un même gang de yakuzas
formés par l'un d'entre eux. Durant plusieurs semaines, ces quatre
individus ont en effet violé, torturé et humilié l'adolescente à
de très nombreuses reprises. Au Japon, l'affaire du meurtre de Junko
Furuta est restée célèbre depuis trente ans.
C'est l'histoire qu'a
choisi de nous raconter le cinéaste japonais Hiromu Nakamura. Sans
fard, sans prise de position. D'ailleurs, le spectateur n'aura pas
d'autre choix que de se faire sa propre opinion et grandes sont les
chances pour que chacun partage la même car les actes auxquels le
spectateur va assister et auxquels il n'est sans doute pas préparé
vont se révéler très durs à encaisser. Peut-être moins
insupportable que le terrible The Girl Next Door de
Gergory Wilson, Concrete
est à aborder avec beaucoup de précautions. D'un nihilisme rare, le
film du japonais offre une vision de la jeunesse déshumanisée, où
le cocon familial ne sert plus de référence et où battre et
insulter ses parents est monnaie courante.
La
première partie du long-métrage s'intéresse au personnage de
Tatsuo. Des bancs d'écoles où les premiers dérapages apparaissent,
en passant par son désintérêt total du métier qui le fait vivre
et de ses parents (divorcés) qu'il méprise au plus haut point.
Laissé libre de traîner dans les rues, c'est au contact d'un ancien
ami devenu depuis yakuza pour le Syndicat que Tatsuo se laisse tenter
par l'expérience. Le goût de l'argent facile et le pouvoir dont il
est investi de par le costume de chef de gang qu'il endosse vont
faire littéralement tourner la tête au jeune homme ainsi qu'à ses
trois sbires. La bande des quatre membres des 'Dragon
God'
sème la terreur dans les rues, mais aussi chez eux, auprès de
leurs parents. Ces derniers d'ailleurs, ont baissé les bras de peur
des représailles.
Hiromu
Nakamura décrit assez fidèlement le comportement relativement lâche
des proches du gang, témoins des horreurs perpétrées dans la
chambre de l'un des 'Dragon
God'.
Une situation inacceptable mais qui demeure compréhensible vu les
conditions d'existence des habitants de cette ville souillée par la
présence de nombreuses et dangereuses bandes de yakuzas. Les flics,
quant à eux, sont carrément mis hors du contexte et on ne les verra
guère que lorsque la jeune femme aura rendu son dernier souffle. A
ce propos, les sévices endurés par la pauvre Misaki (le réalisateur
a choisi de ne pas conserver le vrai nom de la victime), incarnée à
l'écran par Miki Komori, sont proprement insupportables. A tel point
que l'on en arrive à espérer voir arriver le moment où enfin, la
jeune femme mourra pour ne plus souffrir et ne plus avoir à subir
les horreurs commises par ses tortionnaires.
En
nous jetant en pleine face ce spectacle sordide de la mort, le
cinéaste japonais Hiromu Nakamura nous assène un uppercut en plein
visage. L'effet est immédiat et le rejet total.
Pourtant, à part les terribles coups portés au visage de la jeune
femme transformé en une plaie unique et rougeoyante, et une brûlure
faite à l'aide d'essence et d'un briquet Zippo, Hiromu Nakamura nous
épargne un grand nombre des horreurs dont fut la victime Junko
Furuta en 1988. L'un des grands scandales résultants de cette
affaire furent les grotesques condamnations qui furent infligés aux
quatre individus et que beaucoup (dont les parents de la victime)
jugèrent insuffisantes. Bien que parfois pénible à regarder,
Concrete demeurera
comme l'hommage rendu à une jeune fille qui, si elle n'avait pas
croisé la route de quatre monstres, aurait sans doute vécu comme
beaucoup d'adolescentes de son âge...
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