Il y a des films qui ont
la malchance de sortir au mauvais moment. The Thing de
John Carpenter n'a sans doute pas rencontré le succès qu'il
méritait à sa sortie pour la simple et bonne raison qu'il fut
écrasé par le poids de celle du E.T. L'Extra-Terrestre de
Steven Spielberg. Et pourtant, si l'on compare les deux
longs-métrage, l'amateur de science-fiction n'a pas l'obligation de
préférer l’œuvre familiale de l'auteur de Duel
(et d'une myriade de succès populaires) plutôt que celle, anxiogène
et paranoïaque du papa de Christine,
Fog,
Le Prince des Ténèbres
et consorts. Si Death Wish, qui est sorti aux États-Unis le 2 mars
dernier, a joué de malchance, c'est parce qu'il fut précédé d'un
drame qui a touché le pays tout entier : La fusillade de
Parkland le 14 février 2018. Soit un peu plus de deux semaines
auparavant. Alors, lorsque sort sur les écrans le remake de l'un des
plus célèbres 'Vigilante
films',
forcément, les dents grincent et les critiques s'acharnent.
Mais si le film d'Eli Roth s'en est pris plein la gueule, encore
faut-il voir si la fusillade qui causa la mort de dix-sept personnes
dans le lycée Marjory Stoneman Douglas de Parkkand en est la seule
responsable. Que vaut le film par rapport à l'original réalisé par
Michael Winner en 1974, et que vaut-il en tant qu’œuvre
indépendante ?
Pour commencer, il y a tout de même un point positif à mettre au
crédit du film : plutôt que de faire du héros Paul Kersey un
éternel architecte, Eli Roth transforme le personnage en chirurgien
et expose ainsi l'homme à deux traits de caractère diamétralement
opposés. D'un côté, nous avons celui qui sauve des vies. De
l'autre, on a celui qui rode le soir et exécute froidement la lie de
la société. Mais là où le bat blesse, c'est dans le choix du
cinéaste d'omettre les difficultés que devrait ressentir son
personnage, alors poussé par l'esprit de vengeance, à commettre des
meurtres. Toute la difficulté, toute la douleur qu'il devrait
normalement ressentir la première fois qu'il tue (n'oublions pas que
son métier est de sauver des vies) sont absentes. Et même, pire que
cela, Paul Kersey semble tirer une certaine satisfaction lorsqu'il
visionne les vidéos publiées sur les réseaux sociaux par des
inconnus (on le découvre effectivement souriant). Devenu héros
national, les chaînes de télévision et les stations de radio
relèguent chacun des méfaits de celui que l'on nomme désormais 'Le
Bourreau'.
Eli Roth, que l'on a connu plus... 'sanguin' (Cabin
Fever, Hostel), se révèle ici
plutôt timide en matière de violence. Alors que Michael Winner
dirigeait Charles Bronson dans une œuvre étonnamment nihiliste,
Roth se montre parfois avare. Car à part quelques effets gore, il
évite au spectateur d'assister au meurtre de Lucy, l'épouse de
Kersey, Quant à sa fille Jordan, on la retrouve directement plongée
dans le coma et non plus dans un état de catatonie, aux prises avec
des mauvais démons prenant le visage de ses agresseurs.
Bruce Willis que l'on a connu en bien meilleure forme interprète un
justicier beaucoup moins incarné que ne l'était Charles Bronson,
son personnage se laissant presque griser par la renommée dont il
bénéficie auprès d'une partie de la population. Quand au personnage campé par le toujours épatant Vincent d'Onofrio, on regrette qu'il n'ait tout simplement pas été davantage exploité à l'image. Apparemment pas là
pour çà, le réalisateur de The Green Inferno en 2013
ne prend aucun parti, pas même celui de dénoncer la vente légale
et libre des armes dans son pays. En même temps, Death Wish
n'a pas la prétention de refaire le monde. Du moins
espérons-le. En fait, le principal intérêt du dernier long-métrage
d'Eli Roth demeure dans sa réactualisation d'un mythe que les plus
jeunes ne connaissent peut-être pas et sur lequel ils auront,
pourquoi pas, la curiosité de se pencher. Un film d'action sympa, sans plus. Quant à moi, je retourne
redécouvrir le classique de Michael Winner...
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