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lundi 5 février 2018

Always Shine de Sophia Takal (2016) - ★★★★★★★☆☆☆



Always Shine, second long-métrage de l'actrice et réalisatrice américaine Sophia Takal après Green en 2011, serait le remake du huitième film que réalisa le réalisateur, scénariste et producteur américain Robert Altman en 1972. Au cœur d'une intrigue s'employant à démonter certaines mécaniques propres à la jalousie, à l'envie et au manque de confiance en soi, Anna et Beth. Deux jeunes femmes aussi blondes, mais bien moins maniérées, que les shampouineuses et manucures habituellement (et sempiternellement) caricaturées. Deux amies, de longue date, toutes deux actrices, mais à différents niveaux. Pour que cloche leur relation alors qu'elles partent pour quelques jours se ressourcer à la campagne (et profiter de la maison de la tante d'Anna), il fallait bien que la cinéaste invoque à travers le scénario de Lawrence Michael Levine (Gabi on the Roof in July) une raison valable pour que naisse de ce week-end au départ idyllique, une séance de crêpage de chignons un brin dérangeant.
D'un côté, Beth donc. Héroïne de quelques minuscules bandes numériques mais suffisamment connue sur les réseaux sociaux pour qu'une « groupie » interfère dans la discussions autour d'une table impliquant son amie de toujours Anna. Déjà, on note une réaction de cette dernière plutôt troublante. Jalouse, Anna ? Peut-être. Ou peut-être pas encore. Mais l'on sent déjà pointer chez elle une certaine gêne devant l'engouement de la fan de service pour son amie alors qu'elle-même galère pour trouver des rôles au cinéma. Une situation que ne fera que s'aggraver car, non contente de « crouler » sous les demandes, Beth attire davantage les hommes que son amie Anna. Il y a donc dans ce parallèle, de quoi appesantir l'ambiance de ce Always Shine qui sombre peu à peu dans l'aigreur d'une jeune femme qui voit des myriades de tapis rouges se dérouler devant sa meilleure copine. Une Beth a priori peu sûre d'elle, préférant se dénigrer afin de ne pas blesser une Anna qui ne mettra pas longtemps pour voir dans le jeu de son amie, un certain niveau de perversion.

Toute la question demeurant au fil d'une intrigue reposant presque exclusivement sur le jeu des actrices Caitlin Fitzgerald (Dirty Movie), et surtout sur celui de Mackenzie Davis (Freaks Of Nature), de savoir à quel niveau situer le comportement de l'une et de l'autre. L’œuvre s'ouvrant sur un casting auquel participe Beth, la réponse y demeure sans doute concernant cette timide et fragile jeune interprète que son amie finit par dénoncer comme étant une réelle manipulatrice. Sauf qu'en instaurant un climat délétère où la jalousie de l'une bouffe littéralement l'espace, on se demande même jusqu'au générique de fin dans quelle mesure tout n'est que le fruit de l'esprit tourmenté d'Anna.
Sophia Takal s'amuse à placer quelques pièces dans cet ingénieux puzzle mental forçant le spectateur à remettre sans cesse en question les éventuels acquis. Beth s'ennuie-t-elle lorsqu'Anna fait le forcing devant un beau mâle quadragénaire finalement séduit par la première que par la seconde ou se désespère-t-elle en secret de voir son amie jeter son dévolu sur un individu qu'elle aurait préféré elle-même s'accaparer ? La réponse arrivera bientôt sous l’œil perturbé d'une Anna qui s'enfonce (sans doute) peu à peu dans la psychose. Là encore, quelques éléments viennent étayer l'hypothèse selon laquelle, la pauvre petite Beth n'est pas aussi angélique que voudrait le laisser entendre son joli minois : pourquoi n'a-t-elle pas prévenu son amie qu'un jeune cinéaste amateur voulait l'engager sur le tournage d'un court-métrage ? Le spectateur, pauvre pomme endormie par l'astucieuse mécanique mise en place par la cinéaste, pensera bêtement que la première aura tu l'information pour protéger son amie d'une déconvenue (le jeune réalisateur n'acceptant la présence d'Anna sur le tournage de son court-métrage que si elle l'autorise à la débaucher sans contrepartie financière !).

Always Shine est un astucieux ballet qui recèle de nombreuses scènes dont l'aura est démultipliée par l'interprétation si impeccable de ses deux principales actrices, qu'aucune surenchère visuelle n'y demeure indispensable. Encore une fois, c'est bien grâce à la présence à l'écran de MacKenzie Davis que l’œuvre de Sophia Takal prend toute son ampleur. Tour à tour virile, sexy, sensuelle, ou schizophrène, elle porte littéralement l'adaptation du scénario de Lawrence Michael Levine sur ses épaules. Always Shine est fin, psychologiquement perturbant, et si j'ai décidé de lui retirer une étoile sur les huit que j'avais prévu lui mettre, c'est en raison d'une conclusion attendue et manquant totalement de surprise. Mis à part ce détail...

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