Fred, c'est
l'histoire (extra)ordinaire d'un homme, ordinaire. Un type au chômage
qui n'y réfléchit pas à deux fois avant d'accepter d'aider son ami
Michel à conduire un camion jusqu' à une adresse donnée. Fred a
besoin d'argent, alors il s'exécute. Sans rien demander, il prend le
volant d'un semi-remorque et roule jusqu'au lieu dit où il abandonne
le véhicule. Pendant ce temps, Michel disparaît sans donner de
nouvelle. Lisa, la compagne de Fred part comme tous les jours
travailler dans le laboratoire médical qui l'embauche. Fred, lui,
pour tromper l'ennui, traîne dans un bar où plusieurs anciens
collègues de travail qui comme lui ont perdu leur emploi. Là, il
s'engueule avec Yvan et les deux hommes finissent par en venir aux
mains. Arrêtés par la police, ni Fred ni Yvan n'est décidé à
chargé l'autre. Ils sont finalement libérés. Le lendemain, Yvan
s'excuse. Il propose à Fred de l'accompagner jusqu'à l'usine
désormais désaffectée qui les employait. Là-bas, ils tombent dans
un guet-apens. Yvan y meurt tandis que Fred, effrayé à l'idée
qu'on l'accuse du meurtre de son ami préfère prendre la fuite que
de prévenir la police. Alors que l'inspecteur Barrère est lancé à
ses trousses, Fred tente de démêler cette affaire dont il est l'un
des principaux acteurs...
Nous sommes en 1997, et
l'acteur français Vincent Lindon est âgé de trente-huit ans
lorsqu'il tourne pour la première fois aux côtés du cinéaste
Pierre Jolivet. Alors que bien des années en arrière il monte à
Paris, qu'il y obtient un emploi de régisseur sur les tournées de
l'humoriste Coluche, et qu'il intègre le fameux Court Florent
à la sortie duquel il n'obtient malheureusement pas la
reconnaissance méritée de ses pairs, Vincent Lindon commence tout
d'abord par ramer. Des petits rôles, sans importances, mais qui
façonnent les désirs de cet artiste qui au début des années
quatre-vingt n'est pas encore connu du grand public. L'Addition
de Denis Amar, Parole de Flic de José Pinheiro,
Quelques jours avec Moi de Claude Sautet. Si les
metteurs en scène demeurent frileux à l'idée de lui confier des
rôles plus conséquents, le public le remarque. La scénariste
Danièle Thompson également. La seule, en vérité, à croire en
lui. C'est elle qui insistera auprès d'un Claude Pinoteau peu
convaincu pour que Vincent Lindon soit l'interprète d'Edouard
Jansen, le personnage auquel devra donner la réplique la déjà fort
célèbre Sophie Marceau dans L’Étudiante. Bien en a
pris à la scénariste d'avoir confiance en ce jeune acteur très
prometteur puisque si les attentes des producteurs n'ont semble-t-il
pas été comblées, le public, lui, a suivi avec intérêts la jolie
romance de fiction entre Sophie Marceau et Vincent Lindon qu'un
individu assez peu courtois du Court Florent avait prédit qu'il
n’enlacerait jamais de belles femmes.
Claude Lelouch, Diane
Kurys, Jacques Deray, et quelques autres encore lui confient des
rôles de plus ou moindre importance. Puis arrive l'année 1992 et le
film La Crise de Coline Serreau. Un véritable parcours
du combattant. Un chemin de croix pour Vincent Lindon qui veut
absolument obtenir le rôle. A force de persévérance, et malgré
les réticences des débuts de la réalisatrice, on le découvre donc
cette année là dans la peau de Victor, aux côtés de Zabou et de
Patrick Timsit. Quatre ans plus tard, Coline Serreau lui confiera
même l'un des principaux rôle dans La Belle Verte qu'elle
interprétera d'ailleurs elle aussi.
C'est alors qu'entre dans
sa vie professionnelle le cinéaste, acteur et scénariste Pierre
Jolivet, frère du célèbre humoriste Marc Jolivet. L'auteur de
Force Majeure a cinq films au compteur lorsqu'il fait
appel à Vincent Lindon pour interpréter le rôle de Fred
dans le film éponyme. Terminée la comédie. Si le film est loin
d'être aussi sombre et définitif que l'excellent Série Noire
qu'Alain Corneau réalisa dix-huit ans auparavant, on
retrouve cependant ce type de personnage tout à fait banal voyant
son univers (déjà particulièrement fragile) s'écrouler du jour au
lendemain. Une descente aux enfers ancrée dans la réalité puisque
évoquant des faits de société qui à l'époque, déjà, faisaient
partie de l'actualité. Chômage, fermeture d'usine, difficultés
financières, mais également dégradation de la cellule familiale.
Quoique à propos de cette dernière, on ne peut pas dire que Pierre
Jolivet se soit véritablement acharné sur le couple que forment
Vincent Lindon et la charmante et talentueuse Clothilde Courau.
Face à cet individu, cet
anti-héros qui recherchera très souvent une porte de sortie plutôt
que d'affronter les dangers, l'excellent François Berléand. Flic
désabusé, alcoolique,et dont les intentions demeurent difficiles à
cerner. Et puis Stéphane Jobert, dans le rôle de Michel, l'ami pour
lequel Fred « accepte » de
se foutre dans la merde. On remarquera aussi la présence de Roschdy
Zem, ce très précieux acteur franco-marocain qui en 1997, n'a
qu'une dizaine de longs-métrages à son actif. Pierre Jolivet
réunira deux fois encore Vincent Lindon et lui. Deux ans plus tard
dans Ma Petite Entreprise,
et en 2002 avec Filles Uniques.
Fred est
une très bonne surprise, qui présente un Vincent Lindon très
charismatique, et prouvant sa capacité à se fondre dans des
personnages chaque fois différents. Le film de Pierre Jolivet n'est
cependant pas exempt de défauts. Il lui arrive parfois d'avoir des
coups de mou. Heureusement, fort minimes mais tout de même. On a la
forte impression que le scénario ne tient que sur un minuscule bout
de papier. L'occasion finalement pour ses interprètes d'y montrer
tous leurs talents puisque au final, Fred
se révèle plutôt intéressant. Pas le meilleur de sa catégorie,
mais une première rencontre entre un Pierre Jolivet et un Vincent
Lindon dont la collaboration s’étendra sur cinq longs-métrages,
entre 1997 et 2007...
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