Loin
de pomper honteusement l'héritage laissé par le grand Sergio Leone,
grand maître du western spaghetti, comme le feront des légions de
cinéastes à travers de vagues séries b, voire z, Clint Eastwood,
(tout comme le fit Alessandro Jodorowski en son temps avec le
cultissime western ésotérique El
Topo)
choisit la voie de l'originalité lorsqu'il réalise "L'homme
des hautes plaines", film de cow-boys donc, mais crépusculaire
et mystique, très loin de ce qu'on a l'habitude de voir sur les
écrans.
Ici,
point d'indiens, ni de folles chevauchées dans les plaines de
l'ouest américain. Tout est concentré sur une petite ville, Lago,
où un drame est survenu il y a quelques temps: Un homme à été
lâchement lynché par trois autres sans que personne n'intervienne
lors de la rixe. L'homme finira par mourir sous les nombreux coups de
fouets infligés et sous les regards de villageois médusés. Après
avoir été dénoncés, les trois hommes seront finalement arrêtés
et enfermés dans une autre ville après avoir menacé les habitants
de Lago de venir se venger à leur sortie de prison. Trois hommes
seront alors envoyés en ville afin de s'assurer de la protection des
villageois. En réalité, ils profiteront de la lâcheté
pathologique de chacun pour agir en véritables tyrans.
Mais
c'était sans compter sur l'arrivée d'un étranger, un homme sans
nom (interprété par Clint Eastwood lui-même), que les trois hommes
viendront provoquer et qui très vite finiront tués sous les balles
de ce dernier.
Les
villageois, enfin libérés du joug de ces trois hommes, proposent à
l'étranger qui n'était semble-t-il que de passage, contre espèces
sonnantes et trébuchantes, et même, voire beaucoup plus, de rester
en ville afin de les protéger du retour imminent des trois lyncheurs
du début. Après réflexion, mais surtout, après s'être assuré
qu'il obtiendrait des villageois tout ce qu'il désire, l'homme
accepte la mission que lui ont confié les "notables" de la
ville...
Le
film débute de façon plutôt classique, même si le générique
assez étrange pour un western semble démentir cette impression. On
retrouve presque alors, le personnage campé par Eastwood dans "Pour
une poignée de dollars" de Leone, avec le cigarillos au bords
des lèvres, le chapeau aux larges bords vissé sur la tête et
surtout, le stoïcisme du héros face aux provocations de ceux qui
voient en lui un usurpateur... Une froideur qui ne sera pas étrangère
aux événements qui se sont produits quelques temps auparavant. Et
c'est autour de ce personnage énigmatique que l'intrigue se
construit. Derrière un calme stupéfiant, l'homme agit envers les
villageois de façon immorale voire odieuse, comme si ceux-ci
devaient payer au prix fort, et cela de façon systématique, leur
lâcheté.
L'homme
leur apprendra à tenir une arme, à s'en servir, pour que lorsqu'au
retour des trois bandits, les villageois soient enfin prêts à
affronter leur mauvais démons. Il ira même jusqu'à leur demander
de repeindre la ville en rouge. Le jour J, lorsque les trois bandits
sortent de prison, il décide simplement d' abandonner les villageois
à leur triste sort. Pourquoi? Ce sera aux spectateurs de le
deviner...
Clint
Eastwood, égal à lui-même, campe un cow-boy désincarné, ne
parlant jamais pour ne rien dire et nageant bien au delà de ce qui
semble être le sujet des préoccupations du village tout entier.
Pendant plus d'une heure trente, le mystère entourant son personnage
sera total. Ou presque puisqu'à plusieurs reprises, on le verra
rêver de celui qui fut lynché quelques temps auparavant signifiant
que son arrivée au village semble avoir un rapport avec le sus-dit
événement. Il est à noter que la version française a apporté un
changement important sur la conclusion de l'histoire, ce qui enlève
un peu de ce qui fait la force de ce film: son imprégnation dans le
domaine du fantastique. En effet, un détail a été purement et
simplement revu et corrigé lors du doublage dans la langue de
Molière et rends ainsi la fin du film plus anecdotique que dans la
version d'origine et c'est pourquoi il est important de découvrir ce
film dans sa version originale et sous-titrée.
Un
très grand western qui ne renouera malheureusement pas ceux qui sont
hermétiques à ce type de cinéma avec les grands chefs-d’œuvre
de Leone et consorts mais qui mérite tout de même que l'on s'y
attarde....
Vu hier soir, suite à ton article ! Ca m'a laissé sur le cul, c'est l'un des meilleurs westerns que j'ai eu l'occasion de voir !
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