De la fiction...
En prison, dans les
années trente, le révérend Harry Powell, enfermé pour le vol
d'une voiture, partage sa cellule avec Ben Harper, un homme
coupable d'un double homicide. Harry prend trente jours. Ben, lui,
est condamné à mort. Le meurtrier a dérobé dix-mille dollars lors
d'un hold-up. Il a confié l'argent à ses deux jeunes enfants, John
et Pearl, et leur a fait promettre de garder le secret avant d'être
menotté et emmené par la police. Harry tente de faire parler son
codétenu. Mais Ben tient bon. Il emporte avec lui dans la tombe, le
secret de la cachette qui renferme l'argent de la banque.
Harry, lui, qui a fait
ses trente jours de prison, quitte l'établissement pénitencier avec
une obsession : mettre la main sur les dix-mille dollars. Pour
cela, il se rend dans la petite ville où vivent les deux enfants de
Ben, ainsi que leur mère, Willa. Le prêcheur parvient à se faire
accepter par les habitants du village. Willa elle-même se laisse
séduit par le charisme se cet individu qui se prétend homme
d'église. Seul le petit John est méfiant. Il croit lire dans le
regard de Harry, les véritables raisons de sa venue ici. Et le jeune
enfant a bien raison de se méfier. Car après avoir réussi à
épouser Willa, Harry va parvenir à avoir une telle emprise sur elle
qu'elle ne parviendra plus à discerner le vrai du faux. Entre la
vérité sortant de la bouche de son fils et les manipulations dont
use son nouvel époux, son choix est vite fait.
Il ne reste plus grand
chose à faire d'autre pour John et sa petite sœur que de prendre la
fuite, et de partir loin de celui qui va se comporter comme un
véritable tyran...
Seul et unique film de
Charles Laughton est considéré depuis déjà longtemps comme un
véritable chef-d’œuvre La nuit Du Chasseur n'usurpe
jamais son excellente réputation. Un film que tout cinéphile se
doit d'avoir vu au moins une fois dans sa vie. Mais pourquoi donc
cette œuvre bénéficie-t-elle d'une telle image lorsque l'on sait
que la presse, à l'époque, l'a rejeté, incapable d'accéder à
cette profusion de créativité alors encore rarissime dans les
années 50 ?
Car peut-être encore
plus que l'admirable interprétation des enfants, de Shelley Winters,
de Lillian Gish et surtout celle de Robert Mitchum (qui faillit
passer à coté du rôle, Gary Cooper ayant d'abord été pressenti
pour jour le rôle de Harry Powell), beaucoup de détails, cumulés
les uns aux autres, font de La nuit Du Chasseur un film
proprement terrassant. On a peine à croire qu'il s'agit là d'une
toute première réalisation. La mise en scène est prodigieuse. Le
choix des cadrages et surtout ces jeux d'ombres et de lumières
projetés dans des décors d'une beauté parfois renversante laissent
pantois d'admiration. En un peu moins d'une heure trente, Charles
Laughton nous donne une véritable leçon de cinéma.
La nuit Du Chasseur
est baigné d'une aura démoniaque particulièrement réussie. Ce
sentiment d'effroi et d'attente fébrile que l'on ne rencontre
finalement pas si souvent que cela au cinéma est ici retranscrit à
la perfection. On y croise la venue du Malin, au milieu duquel des
brebis aveuglées par de beaux et bibliques discours n'imaginent même
pas un seul instant qu'il puisse y avoir parmi elles un loup venu
dévorer les plus jeunes de leurs semblables. Les décors subjuguent
par leur beauté, et notamment la traversé du fleuve en barque qui
donne lieu à des tableaux dont la majesté est ici impossible à
retranscrire par écrit. A cette beauté s'ajoute une scène
incroyablement angoissante durant laquelle, alors que Pearl est
encore endormie sur la paille fraîche d'une grange, John entend
chanter celui qu'ils ne cessent de fuir. Et pour ajouter à cette
mélopée terrifiante, le cinéaste cadre la grange au premier plan
et montre le faux prêcheur en ombre chinoise traverser l'écran en
arrière-plan. Cette scène, à elle seule, vaut tous les discours
dithyrambiques.
Il y aurait tant et tant
de choses à ajouter sur cette œuvre merveilleuse, admirable,
presque... miraculeuse. Pour vous convaincre que son statut de
chef-d’œuvre n'est pas galvaudé et bien... jetez-y un oeil...
… à la réalité.
Ce que peut-être
certains d'entre nous ne savent pas, c'est que le film de Charles
Naughton est basé sur un fait-divers réel s'étant déroulé dans
les années 1930. Harry Powers prétendait chercher l'amour et
appâtait ainsi des veuves dont il volait l'argent avant de les tuer.
Il fit cinq victimes avant d'être arrêté par la police. S'ensuivit
un procès et Harry Powers fut condamné à mort par pendaison. Il
fut exécuté le 18 mars 1932...
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