Fidèle à la ligne
directrice pour laquelle il opte maintenant depuis plus de dix ans,
le réalisateur, scénariste et producteur britannico-iranien Babak
Anvani a cette année réalisé son quatrième long-métrage intitulé
Hallow Road.
L'histoire d'un couple qui fait remonter de vieilles rancœurs alors
qu'ils sont en route pour retrouver leur fille Alicia qui a causé un
grave accident de la route. En 2019, avec son second film Wounds,
le cinéaste avait déjà abordé le sujet du couple. Une relation
proche de la rupture causée et progressivement accentuée par un
événement qui tenait pratiquement de l'ordre du phénomène
paranormal. Entre les deux, Babak Anvani signe en 2022, I
Came By.
Traduisible chez nous sous le titre ''Je
suis passé'',
son avant-dernier long-métrage respecte les codes que le réalisateur
s'impose chaque fois qu'une idée de scénario lui vient à l'esprit.
En effet, le couple est chez lui souvent au centre du récit. Qu'il
s'agisse de Will et Carrie de Wounds,
de Maddie et Frank de Hallow Road
ou comme ici de Toby et de sa mère Lizzie, chacune de ses œuvres
prend l'aspect du drame avant de prendre un virage radical en
s'inscrivant dans des thématiques comme les rituels sataniques, la
paranoïa, la présence sur le lieu d'un accident d'une inconnue
apparemment très hostile ou celle d'un ancien juge au dessus de tout
soupçon... Premier soucis rencontré avec I Cam
By :
L'on est en droit de considérer que le troisième film de Babak
Anvani arrive avec plusieurs trains de retard. Surtout que six ans
auparavant, le réalisateur uruguayen Fede Álvarez nous avait asséné
le redoutable Don't Breathe
dans lequel, l'acteur Stephen Lang incarnait un aveugle dont la
demeure allait être assiégée de nuit par de jeunes cambrioleurs
qui allaient vivre le pire moment de leur existence. Offrant en outre
un twist aussi glaçant qu'inattendu... Écrit par Babak Anvani
lui-même ainsi que par le scénariste Namsi Khan, le script de I
Came By
ressemble presque comme deux gouttes d'eau à celui de Fede Álvarez
et Rodo Sayagues. Tant et si bien que l'effet de surprise ne
fonctionne absolument pas pour quiconque connaît Don't
Breathe
et n'a pas encore découvert le film du britannico-iranien. L’œuvre
presque toute entière de Babak Anvani semble être sacrifiée à
l'usage de codes que l'on retrouve donc dans la plupart de ses films.
Comme cité plus haut, le couple sous toutes ses formes. Ou comme le
surgissement d'événements surnaturels, criminel ou d'ordre
psychiatrique, voire sociologique. Il est un fait ''magistral'' que
l'on se doit également de raccorder au style très particulier du
cinéaste. Usant régulièrement du hors-champ pour des raisons qu'il
serait intéressant de connaître, nous pourrions supposer qu'ils
permettent soit de faire des économies budgétaires, soit de
consacrer l'essentiel du récit à des thématiques beaucoup plus
terre à terre...
C'est
ainsi qu'après qu'un groupe de quatre jeune étudiants ait ouvert
une ''porte'' lors d'un rituel satanique (Wounds)
et avant qu'un couple de parents ne s'inquiètent de la présence
hostile qui semble avoir rejoint leur fille sur le lieu de son
accident (Hallow Road),
Babak Anvani convoque donc un ancien juge (Hugh Bonneville dans le
rôle de Hector Blake), respecté et apparemment respectable malgré
des ancêtres qui à une époque plus ou moins lointaine s'adonnèrent
à la colonisation et au commerce de l'ivoire. I
Came By
met également en scène George MacKay dans le rôle de Toby Nealey,
jeune graffeur révolté qui avec son ami Jay (Percelle Ascott)
s'introduit chez de riches propriétaires afin de laisser la trace de
leur passage. Le fameux ''I
Came By''
peint sur certains murs des luxueuses demeures. Lorsque Jay apprend
que sa petite amie Naz (l'actrice britannico-indienne Varada Sethu)
est enceinte, il décide de tout arrêter. Le jeune homme
n'accompagnera donc pas son ami dans la maison de l'ancien juge
Hector Blake dont il lui a cependant fourni les codes lui permettant
de désactiver le système de sécurité. Le soir-même, Toby quitte
le cocon familial qu'il partage avec sa mère Lizzie (Kelly
Macdonald) après une enième dispute pour s'introduire chez Hector
Blake. Ce qu'il y découvre dépasse l'entendement et met dès lors
sa vie ainsi que celle de ses proches en péril... Maintenant, vous
savez de quoi l'on parle ici très précisément. Après une première
partie plutôt satisfaisante quoique quelque peu gâchée si on la
compare au contenu de Don't Breathe,
I Came By
conserve les gimmicks habituels du cinéaste qui répète donc les
mêmes erreurs malgré des idées souvent intéressantes, voire
foisonnantes. Et c'est bien là tout le problème avec Babak Anvani.
Le réalisateur a tendance à trop se disperser et à ne jamais aller
en profondeur. Si bien que la terreur que peut engendrer la
personnalité du kidnappeur incarné par Hugh Bonneville vire parfois
au ridicule. Babak Anvani s'en tenant à ce qu'il a décidé dès le
départ : mettre tout ce qu'il avait en tête lors de l'écriture
du script quitte à abandonner en route certains rouages du récit.
Comme la présence, par exemple, de la victime de Blake, séquestrée
depuis des mois voire des années dans le sous-sol de sa demeure et
incarnée par l'acteur Tarik Badwan. Connaissant bien la carrière du
cinéaste, l'on s'attend à quelques invraisemblances qui dans le cas
de ce long-métrage atteignent un tel degré d'incohérence qu'elles
finissent de décrédibiliser le film ! Enfin, on peut voir chez
cet ancien juge comme un alter ego de fiction de l'un des plus grands
tueurs en série ayant jamais sévit sur le territoire américain :
un certain John Wayne Gacy... Comme à chaque fois chez Babak
Anvani, le film est très plaisant a regarder même si de nombreuses
tares viennent quelque peu gâcher l'expérience...