Premier long-métrage
réalisé par Sasha Rainbow et écrit par Lee Murray, Hweiling Ow et
Mia Maramara, Grafted fait
étrangement écho à The Substance
de la française Coralie Fargeat. Dans un cas comme dans l'autre, la
recherche de la beauté mène à une troublante dérive s'inscrivant
dans le genre Body
Horror cher
au réalisateur canadien, David Cronenberg. Un courant du cinéma
horrifique qui désormais prolifère comme une bactérie, s'attaquant
aux organismes de ses principaux protagonistes quand ceux-ci ne se
rendent tout simplement pas coupables de faits monstrueux parmi leur
entourage. Bien qu'ayant été auréolé du Prix du Scénario au
Festival de Cannes en 2024 ou de la Meilleure actrice dans un film
musical ou une comédie pour Demi Moore aux Golden
Globes 2025,
The Substance
était d'une telle absurdité doublée, triplée, voire même
quadruplée d'incohérences scénaristiques que le film pu être
perçu comme une authentique déception. Ceux qui n'apprécièrent
donc pas le film malgré les performances de Demi Moore et de
Margaret Qualley ou même celle de Dennis Quaid pouvaient donc se
retourner vers Grafted.
Une œuvre demeurée dans l'ombre, sans doute à cause de sa
production et sa distribution bien trop proches de celle de The
Substance.
D'autant plus qu'après avoir découvert ce dernier, il n'est pas
certain que la totalité des spectateurs aient eu l'envie pressente
de plonger aussi rapidement dans ce même type d'univers. Tandis
qu'Elisabeth Sparkle (Demi Moore) tentait de retrouver une seconde
jeunesse par un procédé scientifiquement mais aussi et surtout
physiologiquement et psychologiquement invraisemblable, le problème
de Wei n'est pas tant de conserver sa jeunesse puisqu'elle n'est
encore qu'une adolescente que de poursuivre les travaux de son génie
de père malheureusement décédé afin de se débarrasser à son
tour d'une maladie congénitale qui atteint depuis sa naissance une
partie de son visage. Grafted
démarre par une séquence d'introduction plutôt hard lors de
laquelle le père de l'héroïne alors en pleines recherches
s'injecte une solution de son invention qui doit permettre aux
cellules de la peau de se régénérer. Un sérum dont l'action est
si remarquable qu'elle ne fait pas que s'attaquer aux cellules
malades mais condamne l'homme à mourir dans d'abominables
circonstances. Une séquence bien gore qui précède donc le passage
à l'adolescence de Wei (excellente Joyena Sun) qui désormais part
s'installer chez sa tante qui l'accueille très généreusement.
Contrairement
à sa cousine Angela (Jess Hong) qui très vite prend la jeune fille
en grippe. Tout comme sa meilleure ami Eve (Eden Hart) qui évite
autant qu'elle le peut tout contact avec cette étrangère au
comportement décidément très curieux. L'intégration est
d'ailleurs au centre du récit même si le thème est évoqué sous
l'une de ses formes les plus délicates à aborder : celle de la
culture ! Grafted ne
déroge pas aux règles du Body
Horror,
genre dans lequel le ratio drame/horreur est en général calculé
pour que tous s'y retrouvent. Mais les amateurs de films gore
risquent de ne pas en avoir tout à fait pour leur argent puisque le
long-métrage de Sasha Rainbow reste relativement timide malgré la
promesse offerte par la séquence d'introduction de tâcher l'écran
blanc de nos téléviseurs aussi sûrement que les spécialistes
habituels du genre. Et à dire vrai, en la matière, l'emploi
d'effets-spéciaux conçus par Casey Belsham et Dean Clarke est assez
rare et surtout, relativement redondant dans la manière qu'ont les
deux spécialistes à aborder l'horreur corporelle. De ce point de
vue là, The Substance remporte
la victoire haut la main. Et même si l'on n'apprécie pas
spécialement le dernier film de la réalisatrice française, il est
fort peu probable que Grafted obtienne
davantage de faveurs de la part de ses détracteurs. D'une durée
pourtant raisonnable n'excédant pas les quatre-vingt seize minutes,
le long-métrage de Sasha Rainbow s'avère parfois neurasthénique.
Pourtant, le film n'est pas avare en idées originales, parmi
lesquelles, la réalisatrice et ses scénaristes créent un nouveau
concept de Body
Snatching
permettant à l'héroïne de changer d'apparence grâce à des
greffes de peaux agrémentées d'une injection procédant des
recherches poursuivies par Wei à la mort de son père. Autre idée
sur laquelle semble reposer le récit : une sorte
d'exo-cannibalisme reposant sur ce même concept d'appropriation de
cellules humaines non plus ingurgitées avant d'être digérées mais
fusionnant directement à même la peau de Wei. Le résultat vaut par
ailleurs son pesant d'or : Jess Hong et Eden Hart qui jusque là
n'incarnaient respectivement que les personnages d'Angela et Eve vont
se voir contraintes d'adopter le comportement de Wei qu'incarnait
jusque là Joyena Sun. Prouvant ainsi le talent de l'une et de
l'autre des interprètes dans la capacité qui est la leur de se
fondre dans divers personnages. Malheureusement, sorti de cette
simple observation, il est un fait que Grafted
ne remplit par vraiment l'objectif que l'on attendait de lui. Le film
n'est pas l'objet traumatisant que la bande-annonce promettait. Noyé
parmi des dizaines d'autres exemples de Body
Horror,
le film de Sasha Rainbow fait malheureusement partie des maillons
faibles...
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