Réveillé en sursaut à la suite d'un cauchemar qui s'est
immédiatement évaporé au point que j'en ai oublié son contenu, je
regarde l'heure et il est 7h06. Je ne sais pas si cet horaire qui a
tout de véritablement diabolique (7h06=6h66, soit 666) a un lien
avec tout ça ou si c'est après avoir découvert Écoute voir
de Hugo Santiago au beau milieu de la nuit que le film a tellement
marqué mon esprit qu'en a éclot un très mauvais rêve, mais afin
d'exorciser cette peur de l'inconnu qui m'a fait m'éveiller alors
que je serais bien resté couché quelques heures de plus, me voilà
posté devant mon ordinateur a essayer de savoir ce que je vais bien
pouvoir écrire... Car s'il est une chose qui reste certaine, c'est
que le réalisateur argentin originaire de Buenos Aires Hugo Santiago
dont la mort remontera dans quelques jours à sept ans abordait son
art d'une manière si particulière que chaque œuvre pouvait marquer
n'importe quel esprit peu habitué à ce genre de cinéma. Un
cinéaste parait-il très important dans son pays d'origine ainsi que
chez nous et pourtant que je ne découvrais que lors de cette nuit
particulièrement pluvieuse... Rien ne pouvait me contraindre
davantage d'assister à cet étrange spectacle que le terme
''science-fiction'' que je découvrais quelque part au sujet du film.
Terme qui sur la toile disparaît par contre de ce que certains
tiennent pour des ''références'' en matière de cinéma. De la
science-fiction, sans doute, mais pas de celle que l'on a pour
habitude de voir sur petit et grand écran. En moins sombre et donc
en moins déprimant, nous pourrions presque d'ailleurs raccorder
Écoute voir
à l'oppressante série en quatre épisode, Noires
sont les galaxies même
si, il est vrai, ni le film ni cette série ne partagent la moindre
de leur thématique respective. Par contre, les titres de l'un et
l'autre ne possèdent-ils pas en commun une certaine part de
poésie... ? Lorsque l'on découvre que l'acteur Samy Frey
participe au projet, on sait déjà à peu près dans quel genre
d'univers nous mettons les pieds. En vedette, l'actrice Catherine
Deneuve qui à l'époque a déjà une sacrée carrière derrière
elle. Héroïne du paranoïaque, mysandre et claustrophobe Répulsion
du franco-polonais Roman Polanski, vedette de Belle
de jour et
de Tristana
de l'espagnol Luis Buñuel, invitée sur les plateaux de tournage de
François Truffaut, Marco Ferreri, Jean-Paul Rappeneau, Claude
Lelouch ou encore Robert Aldrich, la jeune femme y incarne l'un de
ses plus étonnants personnages. Un brin décalé au regard de sa
filmographie passée et à venir.
Une
détective privée fagotée comme Humphrey Bogart dans Le
grand sommeil
de Howard Hawks ou comme plus tard, Jack Nicholson dans Chinatown
de Roman Polanski ! Dotée d'un prénom épicène qui lui permet
sans doute de ne pas toucher à la sensibilité de ses futurs clients
de sexe masculin, Claude Alphand reçoit la visite d'Arnaud de Maule
qu'interprète donc Samy Frey. Propriétaire d'un château délabré,
l'homme fait appel aux services de la détective afin d'enquêter sur
les allées et venues d'inconnus qui semblent intéressés par
l'édifice. Claude découvre très vite qu'il s'agit de membres d'une
secte religieuse qui se fait appeler L'église
du Renouveau Final.
Une secte dont l'un des membres n'est autre que Chloé, charmante
jeune femme incarnée quant à elle par la toute frêle mais déjà
très sensuelle Anne Parillaud qui n'est alors âgée que de dix-huit
ans. Elle y interprète une jeune femme apparemment sous l'emprise de
cette secte qui n'hésite pas à droguer ses membres afin de les
maintenir sous son emprise. Claude va donc avoir la charge de la
faire sortir de cet univers et ainsi la ramener vers son compagnon
qui n'est autre que le propriétaire du château, Arnaud. Sur cette
base que d'aucun pourrait naturellement considérer d'on ne peut plus
ordinaire, Hugo Santiago construit une œuvre alambiquée à
laquelle s'ajoute un phénomène étrange. Une ''musique'' qui semble
altérer l'espace-temps et dont, pour le moment, on ne connaît pas
la source. Véritable objet filmique non identifié, Écoute
voir
rejoint la liste peu commune des films français mis en scène sous
un angle auquel le public est peu habitué. En 1973, Claude Faraldo
avait déjà marqué le cinéma français expérimental d'une pierre
blanche avec son Themroc
tout
en onomatopées et voici qu'à l'aube des années quatre-vingt à
venir, la fin des seventies prend la forme de ce drôle de film qui
s'amuse à jouer avec les codes du polar noir américain en faisant
parfois déambuler Catherine Deneuve dans d'étonnants décors (le
pigeonnier). Puis en la mettant en scène dans des combats au corps à
corps où son personnage fait preuve de dispositions physiques
particulières, dont une propension à la manchette qu'elle exécute
à de nombreuses reprises. Résumer Écoute voir
en quelques lignes est une tâche véritablement difficile. Comme
d'évoquer son potentiel artistique et sa valeur en matière de
divertissement. Œuvre d'un autre âge que pas même Quentin Dupieux
n'aurait sans doute pu concevoir de nos jours, le long-métrage du
réalisateur argentin est une authentique curiosité. Pas vraiment
plaisant à tenir jusqu'au bout puisque sa lenteur s'étale sur deux
bonnes heures mai suffisamment intrigant pour que l'on se laisse
d'abord happer par l'ambiance très étrange que revêt le
long-métrage de Hugo Santiago...
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