Difficile de trouver la
moindre information. Car à moins de couramment parler l'anglais ou
l'espagnol, il semble que Vudú Sangriento soit chez
nous auréolé de mystère. Pourtant, il existe bel et bien une
affiche française du long-métrage réalisé par l'ibérique
cinéaste Manuel Caño. Un artiste qui lui aussi paraît tout
enveloppé d'intrigues puisque certains en sont encore à se demander
qu'elles sont ses dates de naissance et de mort. Et lorsque l'on
obtient des résultats, il n'est même pas certain qu'ils s'agisse
bien d'informations le concernant mais plutôt celles d'un acteur
éponyme dont le nom se distingue du sien pour n'avoir aucun accent
sur le N ! Après mûres recherches, ce que l'on sait en
revanche de source sûre, c'est qu'il produisit en 1966 le tout
premier long-métrage de son compatriote Eloy de la Iglesia,
Fantasía... 3.
Un réalisateur et scénariste qui intéresse les amateurs de cinéma
d'horreur pour avoir tout de même réalisé en 1972 le très
inconfortable La Semaine d'un assassin (La
Semana del Asesino)
dans lequel un homme, Marco, est employé dans un abattoir avant de
devenir malgré lui un tueur en série qui se débarrasse de ses
victimes en les faisant disparaître sur le lieu de son travail !
Quatre ans plus tard, Manuel Caño produira cette fois-ci aux côtés
de Giuseppe Zaccariello et de l'assistant de production Enzo Ferla
Une hache pour la lune de miel
(Il RossoSegno Della Follia)
de l'italien Mario Bava. S'agissant de sa propre carrière de metteur
en scène, le réalisateur espagnol signe La
vengeance du zombie
(Vudú Sangriento ou
Voodoo Black Exorcist)
en 1974. Cinquième œuvre d'une filmographie notamment précédée
de deux longs-métrages consacrés au personnage de Tarzan créé par
le romancier américain Edgar Rice Burroughs en 1912 à travers le
roman Tarzan,
seigneur de la jungle,
Manuel Caño va effectivement réaliser Tarzán
en la Gruta del Oro en
1969 ainsi que Tarzán y el Arco Iris
trois ans plus tard. Quant à Vudú Sangriento,
celui-ci verra le jour en 1974. Signifiant ''Vaudou
de sang'' en
langue espagnole, le titre français est trompeur puisque traduit
sous celui de La vengeance du zombie
l'on s'attend très certainement à y voir débouler une créature
décharnée plus ou moins avide de chair humaine. Une erreur
d'appréciation sans doute due au fait que le long-métrage
s'inscrive effectivement dans un contexte où le zombi matriciel,
celui qui dans le folklore vaudou est un individu prétendument
décédé mais qu'un prêtre vient déterrer après son exhumation
pour en faire son esclave, paraît être au centre du sujet.
Pourtant, là encore, rien de commun avec le film qui nous intéresse
ici puisque Guedé Nibo (l'acteur Aldo Sambrell) n'est pas guidé par
la volonté d'un homme maîtrisant la pratique de la zombification à
travers la fabrication et l'emploi de puissantes drogues mais s'avère
parfaitement autonome.
Mille
ans après avoir été sacrifié avant d'être embaumé lors d'un
rite particulièrement violent après que sa compagne ait elle-même
été décapitée par leur tribu, le sarcophage qui le renferme est
transporté par bateau du Caire jusqu'à Pointe-à-Pitre sur ordre du
Docteur Kessling (Alfredo Mayo). Accompagné par sa nièce, celui-ci
monte à bord d'un paquebot avec tout au plus, une dizaine ou une
quinzaine d'autres passagers. Un tout petit nombres d'acteurs et de
figurants s'expliquant sans doute par le faible budget alloué au
projet ! Lors du voyage vers ce qui en 2007 deviendra l'unique
sous-préfecture de la Guadeloupe, Guedé Nibo se réveille de son
long sommeil et prend possession d'un corps avant de laisser derrière
lui quelques cadavres. Son principal objectif est de retrouver la
jeune femme qui mille ans plus tôt était sa compagne et qui fut
elle aussi sacrifiée au nom de rites ancestraux. Malheureusement
pour lui, lors de l'inspection du sarcophage, un individu a la
mauvaise idée de s'emparer de la bague qu'il porte à un doigt et
qui lui permet de se maintenir physiquement dans une forme humaine
normale. Ce qui s'apparente donc davantage à une momie plutôt bien
conservée, douée de la parole mais aussi capable de se cacher sous
l'apparence d'un autre (une forme de Body
Snatching qui
pour une fois n'emprunte rien à la science-fiction). De manière
générale, Vudú Sangriento
est assez navrant. Et ce, même si la séquence du rite vaudou qui
succède au meurtre d'un supposé amant de l'être désiré par notre
future momie est assez gratinée. D'abord parce que l'on a droit à
une décapitation dans la joie et l'allégresse d'un peuple de
sauvages pour qui il n'y a là rien de plus normal et ensuite parce
que cette même séquence renvoie au Mondo,
un cinéma d'exploitation pseudo-documentaire, ultra-violent et
racoleur qui affirme témoigner des us et coutumes de peuplades
sauvages. Après ça, tout est dit. Manuel Caño fait fi de toute
cohérence chronologique ou météorologique comme en témoignent de
nombreux plans. À bord du paquebot et en arrière-plan, selon
l'angle, il peut tout à fait faire jour avant qu'un très court
instant plus tard, les personnages apparaissent en pleine lumière !
L'entièreté du film tourne autour de la quête de la momie tandis
que le docteur Kessling et le commissaire Dominguez (Fernando Sancho)
se lancent à sa poursuite jusqu'à à un final exécuté à la va
vite en fin de bobine. Une conclusion en queue de poisson, vite
expédiée pour un résultat général assez pauvre. L'on notera la
fascination, voire la quasi obsession du cinéaste pour les rites
vaudous dont il parsème son œuvre à tout bout de champ, même
lorsque de manière tout à fait improbable parmi les voyageurs se
trouvent les membres d'une tribu tous attifés comme on les imagine
lorsqu'ils vivent en plein cœur de leur village. Bref, Manuel Caño
signe une curiosité, rare, mais tout à fait dispensable...
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