Auteur de plus d'une
cinquantaine d’œuvres cinématographiques dont la majorité est
regroupée entre la fin des années quarante et la décennie
suivante, le réalisateur japonais Motoyoshi Oda est mort voilà plus
d'un demi-siècle. Durant sa longue carrière qui s’échelonna de
1940 à 1962, il fut donc à l'origine de dizaines de longs-métrages
dont fait partie Yurei Otoko en
1954 que l'on peut traduire sous l'étrange titre de L'homme
refroidi à l'huile !
Dix ans tout rond avant que le célèbre réalisateur italien Mario
Bava ne réalise Sei Donne per l'Assassinodans
lequel un tueur inconnu et masqué assassinait les mannequins d'une
maison de haute couture, Motoyoshi Oda se penchait sur un cas
similaire. Un tueur comparé à un fantôme par la presse et qui
terrorise les femmes qui sont ses cibles principales. L'objectif de
cet individu apparemment dément est pourtant différent de celui qui
pousse dans le longs-métrage du transalpin, le tueur à supprimer
des mannequins de sexe féminin. La particularité de notre assassin
étant ici d'avoir le visage entièrement bandé et les yeux
recouverts d'une paire de lunettes. Si sa ressemblance avec le
personnage du Docteur Peter Brady reste troublante, on ne pourra pas
reprocher au réalisateur japonais de s'être inspiré ou d'avoir
commis un plagiat de la série américaine H.G.
Wells' Invisible Man créée
par Ralph Smart puisqu'elle lui est antérieure de quatre années.
Tout au plus pourront nous considérer qu'il ait pu vaguement
s'inspirer du personnage de Griffin issu du roman original The
Invisible Man de
l'écrivain britannique H.G.Wells publié pour la première fois en
1897. Et pourquoi ne pas citer également celui du Fantôme
de l'Opéra
du français Gaston Leroux qui lui, vit le jour en 1910 ? Car si
en comparaison Yurei Otoko
nous conte un récit qui l'éloigne de l'aspect fantastique de ces
deux œuvres littéraires, l'homme qui se cache derrière ses
bandages et sa paire de lunettes a, de son propre aveu, le visage
brûlé à l'acide. Le film de Motoyoshi Oda est au centre d'une
passion amoureuse inassouvie (et on comprend pourquoi!) prenant pour
cadre une maison qui n'abrite pas ici des mannequins mais de jeunes
modèles féminines répondant aux desiderata de photographes ou de
peintres près à payer très cher pou les voir se dévêtir.
Il
est possible de forger un nouveau parallèle entre le longs-métrage
deMotoyoshi Oda et l'un des classiques de l'expressionnisme allemand
réalisé en 1931 par Fritz Lang, M – Eine
Stadt sucht einen Mörder
plus connu chez nous sous le titre M le Maudit.
Ce classique du film noir du début des années trente du siècle
dernier n'est pas simplement une fiction puisqu'il s'inspire d'un
sordide fait-divers entourant le tueur en série Peter Kürten auquel
la presse offrit le surnom de Vampire
de Düsseldorf.
Surnom que reprit d'ailleurs le français Robert Hossein pour son
excellent Vampire de Düsseldorf qu'il
réalisa, écrivit en partie et interpréta en 1965. Et bien, Yurei
Otoko
propose de manière plus ou moins proche ce même type de
''collaboration'' entre la police et la pègre. Car qu'on le veuille
ou non, ces jolies naïades dont la principale qualité est de fermer
les yeux sur la perversité de leurs clients sont abritées par des
individus peu recommandables et qui sous couvert du monde du
spectacle ont ici plutôt l'air de maquereaux ! C'est donc avec
l'assistance de leurs employeurs et d'un détective que les autorités
vont se lancer à la poursuite de cet insaisissable criminel qui non
content de décimer les unes après les autres les employées de
cette maison de ''lux(ur)e'',
fait preuve d'une imagination débordante lorsqu'il s'agit de mettre
leur cadavre en scène. La réalisation ainsi que le scénario adapté
par Tsutomu Sawamura sur la base d'un ouvrage écrit à l'origine par
le romancier japonais Seishi Yokomizo reposent avant tout sur le
mystère qui entoure l'identité du tueur plutôt que sur l'enquête
criminelle qui s'avère en revanche abordée de manière relativement
sommaire. Tourné en noir et blanc et n'excédant pas les
soixante-treize minutes, Yurei Otoko
offre quelques plans et séquences très intéressants. Comme cette
victime coupée en deux ou la représentation sur scène se déroulant
vers le dernier tiers du longs-métrage. Une œuvre pleine de mystère
qui se clôt malheureusement de manière un peu trop attendue par la
mort de l'assassin dont le réalisateur préfère cacher le visage
malgré la disparition des bandelettes... Une curiosité...
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