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mercredi 22 janvier 2025

Adrénaline d'Anita Assal, John Hudson, Philippe Dorison, Yann Piquer, Alain Robak et Jean-Marie Maddeddu (1989) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Sans les quelques timides bobines horrifiques hexagonales nées à la toute fins des années quatre-vingt et au tout début de la décennie suivante, le cinéma d'horreur français ne serait peut-être pas tout à fait le même actuellement. C'est en général ce que l'on peut lire dans les colonnes de n'importe quel magazine consacré au septième art à ou à la musique dès lors que l'on cherche à remonter aux origines d'un courant musical ou d'un genre cinématographique. C'est ainsi que même très éloigné des préoccupations d'ancens auteurs, Martyrs de Pascal Laugier, Haute tension d'Alexandre Aja, Frontière(s) de Xavier Gens ou A l'intérieur d'Alexandre Bustillo et Julien Maury doivent tout ou presque à la vague de films d'horreur qui vinrent tâcher l'écran immaculé de nos salles obscures préférées. C'est ainsi qu'en l'espace de deux ou trois années seulement, René Manzor avec 3615 code Père Noël, Jérôme Boivin avec Baxter et surtout Alain Robak avec Baby Blood entamèrent fièrement le capital français d'un courant dont notre pays était de toute manière l'un des plus anciens dépositaires avec Le théâtre du Grand-Guignol, lequel n'attendit pas l'arrivée en 1963 de l'américain Herschell Gordon Lewis qui signa le tout premier film gore officiel de l'histoire du genre cette année là sous le titre Blood Feast. Une date coïncidant d'ailleurs avec la fermeture définitive du Théâtre du Grand-Guignol situé dans la capitale française au 7, cité Chaptal, dans le neuvième arrondissement, après soixante-sept ans de bons et loyaux services dans les domaines de l'horreur et de l'épouvante ! L'on remontera d'ailleurs peut-être un peu plus tôt, au cœur des ''eighties'', en évoquant quelques pépites bien de chez nous, comme le curieux Litan de l'inénarrable Jean-Pierre Mocky ou l'improbable mais finalement très réjouissant Frankenstein 90 d'Alain Jessua, lequel mérite une relecture beaucoup plus objective depuis que des hordes de navets ont été mis au monde de l'autre côté de l'Atlantique. Parodie de l’œuvre séminale de James Whale, mais aussi et surtout adapté pour le grand écran par le réalisateur et son scénariste Paul Gégauff à partir du célèbre roman de Mary Shelley, Frankenstein ou le Prométhée moderne,Frankenstein 90 mettait en scène Jean Rochefort dans le rôle de Victor Frankenstein, la sublime Fiona Gélin dans celui de sa fiancée Elizabeth, mais aussi et surtout, Eddy Mitchell dans le costume de Frank, la créature du film. Sorti en 1984, l’œuvre d'Alain Jessua a au fil du temps gagné ses galons de nanar potache culte. Cinq ans plus tard, et alors que la décennie arrive à son terme pour laisser place à la suivante, plusieurs réalisateurs se réunissent autour d'un projet commun de film à sketchs horrifiques.


Intitulé Adrénaline, le film voit en outre Alain Robak, Yann Piquer ou Barthélémy Bompard mettre en scène divers interprètes dans une succession de courts-métrages qui à l'époque firent le bonheur des amateurs de cinéma horrifique pas encore trop regardants sur la qualité générale des produits qui leur étaient imposés. C'est ainsi donc que l'on retrouve à l'image Clémentine Célarié, Henri Guégan, Jean-François Gallotte ou encore Ged Marlon (lequel était déjà apparu cinq ans plus tôt dans le rôle d'un flic dans Frankenstein 90) pour une série de courtes vidéos qui ont toute en commun de plonger leurs protagonistes dans des aventures qui se veulent a priori comico-horrifiques... Sur un ton qui n'est donc pas toujours forcément sérieux, faisant même parfois penser à du comique troupier, les auteurs d'Adrénaline nous concoctèrent une collection d’œuvres courtes bricolées avec les moyens du bord. Allant d'ailleurs du meilleur au pire. Censé accorder quelques frissons aux spectateurs préalablement prévenus par son titre, le film a le mérite de ne pas faire perdre son temps à ces derniers. La plupart des sketchs sont courts et vont directement à l'essentiel. Maintenant, il va falloir trier entre le bon grain et l'ivraie. Testostéroné à la manière d'un Jan Kounen (Vibroboy, Gisèle Kérozène), Métrovision met en scène son propre auteur, Yann Piquer, dans une rame de métro dont la vitesse ne va cesser de s'accentuer jusqu'à le rendre fou. Sympa, sans plus. S'agissant de Revestriction de Barthélémy Bompard, dans un style visuel et dans l'effroi de son unique personnage (incarné par Bernadette Coqueret), le court rappelle sensiblement La nuit des morts-vivants, surtout lorsqu'une mère y était assassinée à coups de truelles par sa propre fille zombifiée ! Ici, rien de scénaristiquement commun mais un plafond qui au dernier étage d'un immeuble se rapproche dangereusement du plancher. Simple et efficace mais aussi doté d'un tout dernier plan cynique et plutôt malin. Passons sur Graffiti, lui-même réalisé par Barthélémy Bompard et dans lequel une vieille dame (Marie-Christine Munchery, grimée pour l'occasion) éclate un chat contre un mur avant de badigeonner celui-ci de son sang et dont la seule qualité est sa courte durée !


Original,Cimetière des éléphants l'est assurément ! Réalisé par Philippe Dorison celui-ci met en scène André Obadia dans un récit où les voitures prennent le pouvoir sur les humains et conduisent ces derniers vers une mort certaine. Dans Embouteillage, une fois encore réalisé par Barthélémy Bompard et dont le titre joue sur un jeu de mots, l'acteur Franck Baruk se livrera à un duel face à une bouteille vide qui le traquera dans son propre appartement. Vient ensuite l'excellent Corridor dans lequel Alain Robak installe un dispositif en préfigurant un courant qui sera officiellement initié en 1997 par le canadien Vincenzo Natali à travers Cube, film culte qui ouvrira en grand les portes d'un concept maintes fois remanié sur grand écran : celui de l'Escape Room ou, Escape Game ! On peut donc considérer Corridor comme l'ancêtre de ce courant, d'autant plus que parmi les treize courts-métrages que constitue Adrénaline, celui-ci, lequel met notamment en scène l'acteur Jean-François Gallotte, est sans doute l'un des meilleurs d'entre tous. Yann Piquer est ensuite accompagné de Jean-Marie Maddeddu et met ce dernier en scène dans le rôle d'un ambulancier chargé de se rendre sur le lieu d'un accident. Nous retrouverons d'ailleurs Jean-Marie Maddeddu derrière la caméra de trois autres courts-métrages parmi les suivants : Tout d'abord Interrogatoire, dans lequel un homme est attaché contre un mur par un second et s'y fait découper en morceaux. Ce court-métrage préfigurant ainsi à son tour le Torture-Porn. La dernière mouche qu'il réalise ensuite une fois de plus aux côtés de Yann Piquer met quant lui en scène un homme obsédé par les mouches qu'il fixe sur les murs de son appartement après leur avoir coupé les pattes et les ailes (mais qu'a donc fait à l'époque la SPA pour se révolter contre une telle pratique?) avant de recevoir la visite d'une femme (la très Lyncho-fellinienne Anne-Marie Pisani) qu'il tue avant de.... vous verrez par vous-mêmes !


T.V. Buster d'Anita Assal et John Hudson fait apparaître à l'image Clémentine Célarié et Ged Marlon dans un court diabolico-paranoïaque dans lequel le couple qu'ils incarnent est assailli par leur petit poste de télévision avant qu'un télé-exorciste n'intervienne. Les deux réalisateurs rempilent directement avec Cyclope dans lequel le décidément très présent Jean-Marie Maddeddu, en agent de surveillance, est agressé par un dispositif de caméra transformé en araignée ! La conclusion de ce court est d'ailleurs assez remarquable. Enfin, Sculpture physique de Yann Piquer et...... Jean-Marie Maddeddu (erf, ça commence à devenir lassant, hum?) met en scène......... sérieux ….....? Jean-Marie Maddeddu ? Dans cet ultime ouvrage, assez gore pour l'époque je dois dire, l'acteur et réalisateur s'en prend plein la gueule, au sens propre, puisque assis sur une chaise, il va se prendre une volée de coups de poings donnés à l'aide d'un gant de boxe. À l'image, son personnage est au fil des coups, littéralement défiguré. Sa tête finissant ainsi dans une galerie d'art, exposée comme une sculpture. Celle du titre, justement. Si l'on compte bien, il manque un court-métrage parmi les treize qu'est censé regrouper Adrénaline. Une nouvelle fois réalisé par Anital Assal et John Hudson, Les aveugles servira en réalité de lien entre les douze autres. L'on y découvre une tripotée de figurants affligés de cécité attendant fébrilement l'ouverture d'une salle de cinéma. Le bilan ? Adrénaline reste dans l'ensemble assez satisfaisant. Original, très réactif mais aussi manifestement fauché, cette compilation de courts-métrages demeure parfois jubilatoire et très rarement décevant. Il faut sans doute malgré tout se remettre dans le contexte de l'époque où le cinéma de (ce) genre était en France abordé de manière relativement isolée. Notons qu'en 1994, Alain Robak, Anita Assal, Yann Piquer, John Hudson et le ''petit nouveau'' Manuel Flèche reprendront le chemin du film à sketchs avec six courts-métrages réunis sous le titre Parano. Regroupant cette fois-ci un casting nettement plus ''prestigieux'' au sein duquel l'on retrouvera notamment Jacques Villeret, Jean-François Stévenin, Smaïn, Patrick Bouchitey ou encore Alain Chabat...

 

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