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jeudi 28 novembre 2024

L'enclos d'Armand Gatti (1961) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Tourné sous une forme peu conventionnelle en 1961 par le réalisateur, scénariste, dramaturge, journaliste et écrivain français Armand Gatti, L'enclos emploie donc un ton et une esthétique peu en accord avec les canons du genre qui comme lui traitent du difficile sujet de la Shoah. Loin d'être aussi ''divertissant'' que Les rescapés de Sobibor de Jack Gold, que La vie est belle de Roberto Benigni, que Les milles de Sébastien Grall ou que La liste de Schindler de Steven Spielberg pour ne citer que quelques-unes des œuvres les plus connues du répertoire, L'enclos semble mépriser le terme de ''récréation'' et offre un spectacle de désolation et d'inhumanité crasse qui laisse souvent perplexe. Vision mortifère d'une tragédie de l'Histoire qui n'est de toute manière pas à destination de tous les publics, celui-ci s'inscrit donc davantage dans un cadre réaliste et donc forcément moribond. Si l'idée initiale conçue par le réalisateur lui-même et par le journaliste et écrivain Pierre Joffroy s’affaire à produire une intrigue à la perversité morbide, L'enclos dégage une sale impression. D'une noirceur et d'une violence sourdes qui confinent aux pires geôles où finirent enfermés prisonniers politiques, traites à la cause Nazis ainsi que les représentants du peuple juif. Un film pas drôle. Ni amusant en ce sens où le spectateur est convié à un spectacle où le rythme est à l'aune de ce que purent endurer les victimes. Et pourtant, le long-métrage d'Armand Gatti est doté d'une sous-intrigue qui aurait logiquement dû l'extraire du carcan réservé au simple documentaire qu'il semble être parfois. Cette idée ô combien malsaine que l'on ne peut accorder qu'aux individus parmi les plus néfastes et monstrueux : enfermer deux hommes dans un enclos. Le numéro 3 où vont donc se retrouver piégés l'allemand Karl Schongauer (Hans Christian Blech) qui de l'avis de ses supérieurs hiérarchiques collabore avec l'ennemi à travers l'usage d'une radio amateur, ainsi que David Stein (Jean Négroni), un français dont le seul tort est d'être juif. Deux hommes qui auront vingt-quatre heures pour choisir qui des deux devra mourir pour que l'autre survive...


Des horreurs de cette guerre qui causa la mort de cinquante à soixante millions d'individus de tous bords, L'enclos concentre son action dans un camp que les auteurs semblent avoir préféré créer de toute pièce. Au point que son architecture y apparaît de manière relativement mal définie. Les contours entre les zones réservées aux allemands et celles ''sacrifiées'' aux prisonniers demeurant particulièrement floues. Tout comme la présence des miradors ou des barbelés censés retenir prisonniers ces derniers. L'inconfort généralisé que procure le film touchera sans doute plus encore ceux qui ne souffrent généralement pas de suivre de quelconques ''péripéties'' autrement que dans leur propre langue puisque le film, d'origine franco-yougoslave ne se réserve pas le droit exclusif d'être dirigé en langue française mais également en yougoslave et en allemand. Le seul moyen de pouvoir suivre avec aisance l'intégralité du propos demeurant alors l'usage de sous-titrages. L'enclos s'ouvre sur une séquence terrible tandis que les prisonniers du camp fictif de Tatenberg ''charbonnent'' en déblayant des gravas arrachés au sommet d'une colline afin de les réunir par la suite et ainsi les transporter à mains nues. Un labeur qui laisse certains prisonniers sur le carreau comme le montrent certaines images de cadavres laissés sur place. L'occasion également de faire connaissance avec ces hommes surnommés Kapo qui durant la seconde guerre mondiale étaient chargés d'encadrer les prisonniers dans les camps de concentration. Des individus qui généralement étaient eux-mêmes des prisonniers et qui dans le cas présent profitent parfois de ce privilège pour se montrer aussi inhumains que les nazis eux-mêmes ! Concentré en un lieu unique, L'enclos symbolise la société humaine, avec ses couches sociales, ses petites gens tout comme ses dirigeants. Forçant les uns à chercher comment survivre tandis que les autres ont leur sort entre les mains. Malheureusement méconnu, le long-métrage d'Armand Gatti qui malgré son austérité et les fantômes qui y errent tels les travailleurs de la Ville Basse du chef-d’œuvre de Fritz Lang, Metropolis mérite amplement d'être redécouvert...

 

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