Pour son premier
long-métrage en tant que réalisateur, on peut dire que l'irlandais
Damian Mc Carthy a réussi un petit coup de maître avec Caveat
dans
le domaine de l'épouvante. Sans doute les moyens financiers
furent-ils calculés au plus juste, le long-métrage n'en est pas
pour autant dénué de tout intérêt. Bien au contraire puisque les
amateurs de frissons tiendront là une belle surprise. Une aventure
cauchemardesque qui permettra de reprendre une citation du philosophe
allemand Arthur Schopenhauer que l'on pourra adapter à l'image de
Caveat
et qui dit très exactement ceci : ''La
vie oscille, comme un pendule, de la souffrance à l’ennui. ''
Entre ce que peuvent ressentir les personnage de ce très étrange
long-métrage plus psychologique que graphique et le sentiment du
spectateur plongé dans un univers terriblement anxiogène. Ceux qui
connaissent les travaux antérieurs de Damian Mc Carthy seront sans
doute surpris de retrouver dans Caveat
des thématiques qu'il explora par le passé à travers ses
courts-métrage. L'exploration d'une demeure décrépite par un jeune
garçon à travers divers trous circulaires pratiqués dans les murs
de How Olin Lost His Eye ainsi
que Hungry Hickory
et son adolescente assise sur son lit terrorisée par la porte de sa
chambre. Deux courts-métrages très significatifs dont les
thématiques couplées à de nouvelles ont donc donné naissance à
Caveat.
Lent, hypnotique et sensitif, le premier long-métrage de Damian Mc
Carthy ne devrait logiquement pas laisser grand monde indifférent...
À
moins d'être particulièrement insensible à l'absence de rythme ou
d'y être même carrément allergique, Caveat
a ce don d'emplir tous les espaces tout en faisant preuve d'une
exemplaire économie de moyens dans ses effets. Mais si le film
fonctionne, c'est sans doute d'abord parce que la rareté des dits
effets n'empêche pas le réalisateur d'avoir tout entrepris pour que
le potentiel horrifique de chacun d'eux soit exploité de manière
optimale. Une poupée (au demeurant inquiétante) tenant entre ses
mains des baguettes interagit avec la présence d'Isaac (l'acteur
Jonathan French), un vagabond employé par Barret (Ben Caplan) afin
de tenir compagnie à sa nièce Olga (Leila Sykes) qui vit seule dans
une maison délabrée sur une île où il n'y a pas âme qui vive.
Une toile de peinture récalcitrante montrant le sinistre visage
d'une jeune fille fait invariablement face au lit d'Isaac même
lorsque celui-ci tente de tourner le portrait vers le mur de sa
chambre. Un trou dans l'un des murs de la cave cache derrière un
cadavre dont la vision s'avère particulièrement glaçante. C'est
toutes ces petites choses mises bout à bout qui font de Caveat
une agréable surprise dont certains ne sauront sans doute pas avant
longtemps quel sera le fin mot de l'histoire...
Mais
le réalisateur et scénariste Damian Mc Carthy cache bien son jeu en
enrobant son œuvre d'une épaisse chape de mystère. Car sans avoir
à trop se creuser la tête, le spectateur le plus éclairé aura tôt
fait de deviner ce qui en arrière-plan sert de fondations au récit.
Débarrassé de ses atouts esthétiques et sonores (la partition
musicale de Richard G. Mitchell et le travail sur le son de Richard
De Mowbray, de Sylvain Le Bihanic et de Hugo Parvery contribuant très
largement à faire de Caveat
une expérience sensorielle intense), le film de l'irlandais aurait
sans doute été déjà beaucoup moins fort puisque relativement
classique dans son approche du thriller. Tout le génie de Damian Mc
Carthy étant alors d'avoir fait appel à des décors, une bande
sonore et une photographie typiques d'un certain cinéma d'épouvante
mais aussi de s'être amusé à tordre les conventions liées à la
manipulation et la vengeance au cinéma pour perdre les spectateurs
dans un dédale qui en premier lieu fera appel à leurs émotions.
Visuellement, le film de Damian Mc Carthy claque. Comme un vieux
disque vinyle poussiéreux et rayé diffusant de vieux airs
totalement désuets. Il transpire dans Caveat
un sentiment de malaise, de folie et d'amertume. Entre les visions
parfois sinistres, un environnement cauchemardesque où se réfugier
dans son lit n'est même pas synonyme de sécurité, des
protagonistes tous plus troubles les uns que les autres, Caveat
fait l'effet d'une toile d'araignée enfermant entre ses mailles le
pauvre insecte qui est venu s'y échoir. Et le dit insecte, ici, est
non seulement le personnage d'Isaac mais le spectateur également. On
a hâte de découvrir les futurs projets de ce réalisateur très
prometteur...
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