Bien que Nocturne
soit majoritairement parcouru d'airs de musique classique, le concept
de backward
masking
qu'évoque en partie l'ouvrage de partitions qui repose entre les
mains de l'héroïne rappelle surtout celui reposant sur
l'enregistrement de messages à l'envers sur des pistes musicales de
groupes de hard rock. Sauf qu'ici, le dit concept est réinterprété
de manière tout à fait différente puisqu'il ne s'agit plus
d'enregistrement audios mais bien d'un ouvrage démoniaque constitué
de partitions et de dessins qui reflétés dans un miroir indiquent
un tout autre ''message''.... Pour son premier long-métrage, la
réalisatrice britannique Zu Quirke se voir offrir une opportunité
grâce à Jason Blum et sa société de production Blumhouse
Productions.
Une chance de pouvoir apporter une vision neuve d'un mythe ancestral
bien connu des amateurs de littérature et de cinéma fantastique.
Ici, Faust, cette légende inspirée du Miracle
de Théophile
et datant du treizième siècle. La forme que prend ici le pacte que
passe la jeune Juliet avec le Diable ne ressemble en rien avec
l'accord notamment conclu entre Swan et ''celui
qui désunit''
du chef-d’œuvre de Brian De Palma, Phantom of
the Paradise.
Il ne s'agit pas tant pour l'héroïne de Nocturne
de
conserver la jeunesse éternelle que de devenir une pianiste
virtuose, quitte à marcher sur les plate-bandes de sa sœur,
considérée alors comme lui étant bien supérieure. L’œuvre de
Zu Quirke s'inscrit donc très certainement plus dans une approche
voisine du Black Swan
de Darren Aronofsky (l'art étant l'un points communs que partagent
ces deux longs-métrages). La réussite à tout prix, quitte à
vendre son âme au Diable...
En
choisissant de faire interpréter son œuvre par deux actrices
(Sydney Sweeney et Madison Iseman) dont la ressemblance n'est
absolument pas anodine (elles incarnent deux sœurs jumelles nées à
deux minutes d'intervalle), Zu Quirke revient sur les fondements
même de la gémellité qui se veut rassurante et veut par principe
plus ou moins confirmé (l'exception ne confirmant pas toujours la
règle) que les jumeaux sont indissociables et partagent le même
mode de pensée. Ici, la réalisatrice explose ce ''concept'' pour
des raison qui évoquent l'orgueil, la jalousie et l'ambition. Autre
concept abordé : l'anthropophagie. S'il ne s'agit pas ici de
consommer aux petits oignons un met, parait-il raffiné, la
convoitise y prend un sens qu'il n'est pas idiot de considérer comme
une certaine forme de cannibalisme. Ici, ça n'est plus la chair qui
est dévorée, mais l'esprit même de la principale concurrente. Si
Madison Iseman est en retrait tout en incarnant la réussite, Sydney
Sweeney dévore littéralement l'image, la pourriture mentale gagnant
du terrain sur son apparence physique. Gagnant même sur TOUS les
terrains puisqu'elle ira jusqu'à prendre la place de sa sœur dans
les bras de son petit ami Max qu'interprète l'américain Jacques
Colimon...
Une
femme à la réalisation et au scénario. Deux actrices comme
principales interprètes. Et à la musique, une compositrice.
Nocturne
est une œuvre à la sensibilité toute féminine. Ce qui explique
sans doute le choix de la musique classique comme l'un des thèmes du
long-métrage même si, au fond, la majeure partie de Nocturne
(dont le terme fait sans doute référence à cette forme classique,
lente et mélodique typique du courant Romantique)
est parcourue par des compositions électroniques dues à la
britannique Elzabeth Walling (sous le pseudonyme Gazelle
Twin).
Amples et angoissantes, ses compositions soulignent l'aspect
schizophrénique du long-métrage de Zu Quirke. D'un côté, cette
sensibilité qu'évoque parfois le personnage de Juliet, laquelle
tente, dès qu'elle s'ouvre à la douleur de sa sœur jumelle, de se
remettre en question sans pour autant parvenir à échapper à ses
nouvelles ''pulsions''.
De l'autre, comme une addiction transforme les êtres, la jeune femme
montre un visage déjà beaucoup plus inquiétant qui laisse
entrevoir une amoralité couplée à une immoralité écœurantes.
Malmené par des spectateurs qui n'y voient qu'un film d'horreur
''chiant''
qui ne verse jamais vraiment dans l'horreur, Nocturne
joue
d'abord sur la fibre psychologique et sur l'hypothétique résistance
du spectateur face à des ''horreurs'' d'un autre ordre. Le
long-métrage de Zu Quirke est, pour un premier film, une belle
réussite. Envoûtante, parfois visuellement étonnante, très bien
interprétée (Sydney Sweeney est notamment formidable dans le rôle
de Juliet) et accompagnée d'une bande musicale tantôt belle, tantôt
glaçante. Une très bonne surprise à conseiller aux amateurs
d'horreur PSYCHOLOGIQUE...
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