Alena fut,
sous sa forme originelle, une bande-dessinée du suédois Kim W.
Andersson, auteur inspiré par les comics américains d'horreur et de
science-fiction, Alors que l'héroïne de l’œuvre graphique a
débarqué chez nous en janvier dernier, le cinéaste Daniel
di Grado proposait deux ans plus tôt une adaptation
cinématographique. Première impression : l'affiche est d'une
laideur rare et laisse bizarrement entrevoir un long-métrage genre
« Spring Breakers » alors qu'il n'en est rien. Tourné en
Suède, dans un pensionnat de jeunes filles bien éduquées (c'est du
moins ce que l'on suppose au départ), bien sous tous rapports et
surtout très riches, Alena est
le genre de film qui laisse des traces. Encore faut-il s'empêcher de
faire demi-tour devant cette affiche qui exhibe sans véritable
nouveauté (et donc sans surprise) l'héroïne de ce film mêlant
horreur, slasher et drame. Une affiche mimant étonnamment celle du
Maniac
de William Lustig.
Que
la vie peut être difficile pour une jeune fille sans le sou et
pleine de problèmes rejoignant un pensionnat autour duquel gravite
l'avenir du pays. De la coqueluche de l'école, meilleure joueuse de
croquet, en passant par la brebis galeuse , Alena.
Celle du titre. Une enfant délicieuse, presque trop lisse, provenant
d'un milieu qui tranche nettement avec celui dans lequel elle va
tenter de se fondre. Mais c'était sans compter sur plusieurs
éléments. Il y a d'abord l'idole de sa classe. Cette sale garce de
Filippa (l'actrice Molly Nutley) qui va pourrir l'existence de la
nouvelle venue. Une élève fraîchement débarquée qui va tout
faire pour s'intégrer et même faire partie de l'équipe de croquet.
Ce que veut à tout prix éviter Filippa.
Sans
doute cette dernière aura noté le charisme de la nouvelle venue et
espère éviter d'être détrônée de sa position de leader. En tout
cas, toute blonde qu'elle est, la voici prophétisant sur le sort
accordé à celles et ceux de sa condition. Une clairvoyance ici
malavisée puisque contrairement à la majorité des idées reçues,
quelques événements majeurs vont discréditer la belle blonde sans
même qu'ait à intervenir Josefin. Le double maléfique d'Alena. Son
pendant décomplexé. L'arme intervenant au moment propice, lorsque
tout bascule et que la morale si chère payée dans cet institut
éclate pour des raisons aussi futiles que la jalousie et la
convoitise.
L'actrice
Amalia Holm porte littéralement le projet d'adaptation
cinématographique de Daniel di Grado sur ses frêles épaules. On ne
sait si Alena
tient parfois davantage du drame (il faut avouer que le sort accordé
à l'héroïne par certaines de ses camarades est parfois dur à
encaisser), le fantastique (si l'on suppose assez rapidement des
enjeux qui entourent le personnage de Josefin, on a parfois très
envie que son existence demeure concrète) et l'horreur (quelque
meurtres bien saignants émaillent le long-métrage) gagnent peu à
peu une place plus importante. Quelques éclairages très bien sentis
(et ceux notamment dans la forêt lors de la poursuite finale)
nimbent le film d'une aura fantastique typique des contes de fée. On
est pas loin là, du Petit
Chaperon Rouge
de Charles Perrault. L'une des données essentielles du film de
Daniel di Grado et que le réalisateur à parfaitement su transmettre
au public, c'est l'émotion. Il y a dans le comportement de l'héroïne
quelque chose de touchant, de bouleversant. Qui disparaît peut-être
peu à peu lorsque celle-ci parvient à s'affranchir de ses mauvais
démons mais qui, heureusement refait parfois surface pour notre
bonheur.
Alena
est une chronique de la haine ordinaire horrifique et cinglante.
Comme dans une grande majeure partie des cas signalés sur grand
écran, le sort d'Alena semble en être jeté dès les premières
minutes. D'ailleurs, comment supposer d'une fin plus logique et plus
terrible ? En ouverture, le cinéaste sublimait le décor
automnale de l'institution de jeunes filles. Il en termine avec tout
le respect qui est dû à Alena en déroulant le générique de fin
sans y amorcer le moindre fondu au noir. On espère alors autant
qu'on le redoute, un geste, même insignifiant de celle qui aura su
nous séduire durant presque quatre-vingt dix minutes. Sublime...
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