Lui,
c'est Cisco, elle, Skye. Deux amants, deux artistes qui pour cette
dernière journée sur Terre ont décidé de rester unis, seuls dans
leur appartement, afin d'affronter ce qui va sceller le sort de
l'humanité et de toute vie sur terre : la fin du monde. Parce
que l'homme n'a jamais su véritablement prendre conscience du
danger, demain matin, à 4h44 très précise, la couche d'ozone aura
totalement disparue et avec elle, l'absorption des rayons solaires
ultraviolets ne sera plus possible.
« Pourquoi
tu t'rases ? »
Skye
« Pour
toi. Je l'fais pour toi, je sais qu't'aime pas quand ça pique. »
Cisco
Tout
ou presque est contenu dans ces deux phrases récitées par les deux
principaux acteur de 4H44,
un drame de science-fiction sorti en 2011 et réalisé par Abel
Ferrara. Willem Dafoe et Shanyn Leigh. Lui veut encore y croire, et
pour cela, il n'a pas changé ses habitudes. Même s'il va connaître
des hauts et des bas, mettant à rude épreuve les espoirs qu'il a
fondé sur l'hypothétique idée que tout pourrait finalement se
dérouler autrement le moment venu. Elle, a déjà abandonné. Et
pour passer ces quelques heures qui les séparent de la mort, elle
peint. Encore et toujours. Ressenti et vision apocalyptiques
s'entremêlent dans son œuvre.
Dix
ans après les événements du 11 septembre 2001, le fantôme des
victimes des attentats qui ont causé la mort de milliers de
personnes et la chute du World trade Center hante le film d'Abel
Ferrara. C'est du moins ce que semblent ressentir Cisco et Skye.
Trois ans plus tôt, le cinéaste Roland Emmerich sortait le
prophétique
2012 qui n'était en fait que l'un des nombreux augures de tout un
pan du cinéma américain basant son œuvre sur une épouvantable
surenchère en matière d'effets-spéciaux.
En
2011, curieusement, deux projets coïncident. Comme coïncidèrent en
2009 deux œuvre portées par deux univers post-apocalyptiques
saisissants (La Route
de John
Hillcoat et Le Livre
d'Eli
de Albert et Allen Hughes). Deux œuvres qui s'éloignent du style
ravageur et ravagé imposé par le tout Hollywood. D'un côté, le
Melancholia
de Lars von Trier. Une œuvre riche, mais tellement ennuyeuse qu'elle
laissait craindre le pire concernant le versant underground imposé
par la présence d'Abel Ferrara sur le projet 4H44.
Tout comme Lars von Trier, lui non plus n'abuse d'aucun effet de
surenchère. Tout s'y déroule comme n'importe quel quotidien de
n'importe quel individu sur Terre. L'environnement est au cœur du
sujet. La famille également. La religion n'est peut-être pas la
principale préoccupation du cinéaste cette fois-ci mais elle a elle
aussi droit à sa part du gâteau.
Abel
Ferrara signe curieusement
l'un des plus beaux films sur le sujet de la fin du monde. Comme l'un
des derniers soubresauts d'un ancien génie du septième art qui se
serait un peu trop dilué avec le temps. Encore une fois, c'est
pratiquement son acteur fétiche Willem Dafoe qui fait tout le
travail. Car d'une manière générale, et c'est peut-être aussi ce
qui fait son charme, Abel Ferrara n'a pas l'air très à l'aise avec
sa caméra et la laisse fouiner à peu près partout dans le décor,
semblant n'avoir pas vraiment d'emprise sur elle. Le cinéaste
continue d'explorer l'âme humaine mais cette fois-ci avec davantage
de retenue. Comme s'il fallait respecter ceux qui bientôt ne
seraient plus. Le film aurait pu être ennuyeux, pourtant, Ô
miracle, le charme agit sur le long terme. On regretterait presque
qu'il ne dure pas davantage car en moins d'une heure trente, Abel a
décidé que le tour de la question était fait. Et pourtant, il y en
aurait eu des choses à raconter. Des destins promis au meilleur,
comme d'autres au pire et dont la caméra a choisi de laisser la vie
en suspens.
D'où
l'on reconnaît le cinéma de Ferrara, qui avec cette fin sans chichi
laisse la place à l'imaginaire et fait preuve d'un immense respect
pour ses interprètes et leur personnage. Un vrai grand et beau
film...
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