Au centre de cet
improbable salmigondis de scènes du quotidien d'une mère bigote et
d'un fils mécanicien qui aime partager son temps libre avec sa
compagne, ses amis et les étranges créatures sanguinaires qu'il va
très bientôt devoir nourrir, une curieuse contradiction va très
rapidement s'installer entre la fascination de la dite mère pour un
prédicateur télévisuel et les motivations de ce dernier !
D'où cette interrogation du spectateur vis à vis du message que
tente apparemment de transmettre le réalisateur Bret McCormick.
Critique d'un fanatisme religieux exacerbé ou déclaration d'amour
pour ces individus qui affirment délivrer le message de Dieu en
guérissant par apposition des mains, des hommes et des femmes
atteints de maladies incurables ? Écartons un moment
l'essentiel de ce qu'est venu chercher le spectateur et que promet la
jaquette qui depuis près de quarante ans fait fantasmer celles et
ceux qui n'ont toujours pas découvert The Abomination!
Quatre ans après le cultissime et underground Basket Case de
Frank Henenlotter dans lequel un homme trimballait dans un panier
d'osier son frère siamois monstrueux, Bret McCormick choisit le
milieu rural pour non plus faire suivre son affreuse créature et le
mettre au contact de ses futures victimes mais pour déplacer le
cadavre de ces dernières jusqu'à la gueule béante de la sienne. Ou
plutôt DES siennes puisque comme les parasites de Shivers
de David Cronenberg (mais ici débarrassées de leurs appétences
sexuelles), l'hôte va leur permettre de proliférer après qu'elles
aient eu l'opportunité de croître directement à l'intérieur de
son corps ! Si alléchante que puisse être l'évocation d'une
œuvre dans laquelle seraient réunis ces deux classiques de
l'épouvante a de quoi émoustiller le fan amateur de toute
alternative au cinéma transgressif dont il est un adepte, il va
pourtant falloir très rapidement redescendre sur Terre. En effet, si
l'on retrouve une très grosses majorité de l'équipe de tournage et
des interprètes de Ozone
Matt Delven, les qualités intrinsèquement liées entre l'un et
l'autre ne doivent surtout pas nous faire oublier que The
Abomination
est d'abord un film qui n'a pas eu droit à toutes les attentions
qu'il méritait. Car qu'il s'agisse de son financement, de la
réalisation, de l'interprétation ou de l'application avec laquelle
les effets-spéciaux ont été conçus, nous sommes bien là face à
un objet certes culte, mais aussi et surtout, définitivement Z.
Concernant
cette ambiguïté qui saisit le récit entre dévouement religieux et
rejet d'une certaine forme d'opportuniste directement lié à son
utilisation, le long-métrage de Bret McCormick met en scène une
vieille femme atteinte d'un cancer qui sur les conseils de son
prédicateur télévisuel préféré pose les mains sur son poste de
télé avant de prier en communion avec lui. S’ensuit un véritable
miracle puisque Sarah (c'est le prénom qu'est donné à la mère du
''héros'', laquelle est incarnée par Jude Johnson) vomit
littéralement sa tumeur cancéreuse. Une protubérance qu'elle n'ose
bizarrement pas jeter aux toilettes et qui va muter en une sorte de
parasite qui s'avérera donc relativement proche de ceux du
long-métrage de David Cronenberg cité plus haut. La créature
profite ensuite du sommeil du fiston (Cody, incarné par Scott Davis)
pour s'introduire dans son organisme avant d'être rejeté vers
l'extérieur une seconde fois. C'est là que les choses véritablement
sérieuses commencent. En effet, ce qui au départ ne ressemblait
qu'à une sorte de vieille langue de bœuf noircie par la gangrène
s'est transformé en une créature assez facile à définir comme
étant une sorte d'énorme Pac-Man rouge aux dents acérées et au
féroce appétit. Régulièrement proposé en double programme aux
côtés de Ozone,
The Abomination
porte en lui les mêmes germes de la médiocrité. Et si certains
préfèrent le premier, perso, mon cœur balance plutôt du côté de
ce dernier. Plus gore et très légèrement moins ennuyeux et bavard
que son alter-ego(re), le film de Bret McCormick n'est finalement pas
désagréable à regarder. Jamais effrayant et même plutôt
distrayant lorsque le spectateur découvre avec un certain amusement
ses créatures qui semblent davantage avoir été conçues à l'aide
de papier-crépon que de latex ! Il faudra tout de même pour
certain faire preuve d'un courage exceptionnel tant l'image,
crapoteuse, le son, dégueu et l'état général des aspects
techniques et esthétiques semble avoir été passé sous des
dizaines de filtres vintage et dégradants... The
Abomination
reste avant tout un film culte dont le statut est bien évidemment
usurpé mais que voulez-vous ? C'est ainsi que semblent devoir
survivre certaines bobines qui dans les années quatre-vingt firent
le bonheur des ''aventuriers'' des vidéoclubs...



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