Si chaque pays à sa
propre culture musicale, cinématographique ou littéraire et ses
propres coutumes culinaires, sa représentation du Mal diffère
également. En Asie, les chinois ont T'an mo et les japonais
O-Yama. Les Scandinaves ont
Tunrida. Les juifs,
Asmodée et Haborym.
Les syriens, Béhérit. Les amérindiens, Nihasa et
Sédit. En Russie on
le nomme comme chez nous : Satan.
L'une de ses représentations les plus connues demeure Sheitan
qui dans le monde arabe peut tout aussi bien signifier esprit pervers
que démon... Dans la langue indo-européenne d'origine Hindi,
il est approximativement connu sous le même nom : Shaitan.
Celui-là même que semble devoir représenter à l'écran le
réalisateur originaire de New Delhi, Vikas Bahl. Shaitaan
est son dixième long-métrage mais son premier film d'horreur.
Producteur sur une trentaine de projets, scénariste de ses propres
œuvres, il semblerait que le réalisateur indien ait signé avec ce
film une nouvelle référence dans l'évocation d'événements
d'ordre surnaturels, mythologiques et religieux. Disponible sur
Netflix depuis le 4 mai dernier, le film nous présente les quatre
membres de la famille Rishi. Entre Kabir (Ajay Devgn), le père,
Jyoti (Jyotika), la mère et leur deux enfants Jahnvi et Dhruv (Janki
Bodiwada et Anngad Raaj) existe bel et bien une cohésion même si le
''chef de maison'' entre très gentiment en conflit avec sa fille. Au
premier abord, Shaitaan ressemble
à un remake inavoué de Taken
de Pierre Morel. Un père assez peu enthousiaste à l'idée de
laisser partir sa fille en vacances. Édictant en outre toute une
série de mesures à respecter qui lui permettront de se protéger ou
de pouvoir être contactée à tout moment par ses parents. On a même
droit à une réplique du genre ''où que tu ailles, je te
retrouverai...''. Ne manque plus qu'un charmant jeune homme proposant
à Jahnvi de partager les frais d'un taxi lors de son arrivée à
l'aéroport pour se convaincre que Vikas Bahl s'est intéressé à
cet excellent film d'action mené tambour battant par l'acteur
britannico-américain Liam Neeson en 2008...
Mais
ne nous y trompons pas car les deux longs-métrages n'ont évidemment
aucun rapport. Kabir n'est pas un ancien agent secret doté de
facultés très particulières et sa fille ne va pas faire l'objet
d'une attention toute particulière auprès d'individus spécialisés
dans la traite des femmes. Violons synthétiques, bons sentiments,
l'aura que dégagent les quinze ou vingt premières minutes est au
mieux sympathique et au pire, sirupeuse. On ne va malgré tout pas
cracher dans la soupe. D'autant plus que quelques indices permettent
déjà de comprendre que quelque chose de grave va se dérouler lors
des deux prochaines heures (le film dure cent-trente deux minutes).
Dans un premier temps, la musique d'Amit Trivedi oscille entre nappes
inquiétantes et guitares sèches quelque peu niaiseuses. Mais le
réalisateur nous épargnant la grande tradition des comédies
musicales indiennes typées Bollywood,
ceux
qui sortent du cercle des fans ne lui reprocheront pas de se laisser
aller à quelques instants d'ensoleillement avant que le crépuscule
ne tombe sur le coin de la gueule de notre charmante petite
famille... Dans ce film de possession mêlé de Home
Invasion,
l'une des principales originalités est que l'infestation de l'un des
membres de la famille se fait par une entité visible à l'écran.
C'est l'acteur Madhavan qui incarne Vanraj Kashyap, un démon qui va
prendre possession de l'esprit de Jahnvi pour la contrôler telle une
marionnette, l'obligeant même à attaquer ses parents et son frère.
Vanraj n'a qu'un désir : que ses parents acceptent que leur
fille les quitte et le suive. On comprendra lors du dernier acte le
but recherché par le démon. Sympathique film finalement assez peu
horrifique, Vikas Bahl parvient à maintenir une certaine tension
même si l'antagoniste du récit à tendance à cabotiner. Avec ses
cent-trente deux minutes, Shaitaan
a parfois tendance à tourner en rond même si le scénario de Aamil
Keeyan Khan et Krishnadev Yagnik parvient parfois à se renouveler.
Malheureusement, la descendance de L'exorciste
et autre The Strangers n'est
pas tout à fait du niveau que l'on espérait. Trop long et proposant
un final grandiloquent comme seul sait en produire le cinéma indien,
Shaitann
se déguste non sans plaisir mais s'oubliera finalement assez vite...
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