Il y a quelque chose de
formidablement ironique avec le second long-métrage du réalisateur
et scénariste uruguayen Gustavo Hernández. Alors même que ses
personnages sont poussés dans leurs derniers retranchements afin
d'exulter leurs performances de comédiens par l'absence de sommeil,
ce dernier a justement tendance à nous pousser entre les bras de
Morphée. Il y a en outre quelque chose d’éminemment crispant dans
certaines fins de phrases, lesquelles laissent à penser que le
spectateur pourrait être insuffisamment doté de neurones pour
comprendre telle ou telle inclination ou le rapport qu'entretiennent
certains personnages avec tel objet ou tel lieu ! Autant dire
que No Dormirás
commence plutôt mal. Mais comme dans toute bonne crémerie, il ne
faut pas se laisser rebuter par les apparences et se laisser porter
jusqu'au bout. Au terme de quoi, là,
nous serons en droit de dire ou d'écrire si oui ou non le film
valait la peine que l'on retarde le moment d'aller nous coucher. No
Dormirás
a ceci de contraire au bâillement qui a tendance à se propager
autour de lui que l'insomnie contrainte et forcée des personnage a
peu de chance d'être communiquée chez le spectateur. C'est d'autant
plus dommage que le cadre, un ancien hôpital psychiatrique
désaffecté, ainsi que le sujet du sommeil apparaissent suffisamment
intriguant pour retenir tout d'abord notre attention. La charmante
Eva De Dominici et ses partenaires sont plongés au beau milieu des
années quatre-vingt lorsque les téléviseurs à tubes cathodiques
et les cassettes VHS
demeuraient encore la norme. Avoir engagé la jeune actrice dans le
rôle de Bianca Aguilar est sans doute la meilleure idée qu'ait eu
Gustavo Hernández puisque à côté des décors qui en grande
majorité ne se distinguent pas par leurs origines historiques, Eva
De Dominici ressemble à ces jolies interprètes italiennes
spécialisées à l'époque dans le cinéma horrifico-fantastique,
comme surgissant d'un Dario Argento au meilleur de sa forme... Le
long-métrage s'engage sur le terrain miné de la J-Horror
ou du cinéma espagnol horrifique notamment personnifié par Les
autres
d'Alejandro Amenabar.
Pour
ce dernier, il s'agit surtout d'évoquer l'univers dans lequel
baignent ses personnages. Un brin désuet, sorte de carte postale
d'une époque empirique transformée en maison de retraite pour
arachnides et où l'écho d'anciens patients vont finir par se faire
entendre, le choix n'est évidemment pas anodin et servira autant de
source d'inquiétude de la part des personnages que d'anxiété chez
les spectateurs. Du moins c'est ce que semble vouloir provoquer le
réalisateur chez ces derniers... Car entre cette fichue envie de
dormir et ce scénario alambiqué auquel il est obligatoire de rester
accroché, il arrive très souvent que le récit nous échappe. Et en
général, lorsque cela arrive, il est déjà trop tard. Les
personnages et l'intrigue deviennent inintéressants. On ne sait plus
où se situe le fil d'Ariane de cette dernière et quant aux
premiers, tout ce qui touche à leur intégrité physique ou morale
nous indiffère. No Dormirás joue
sur l’ambiguïté de ses personnage et notamment sur celle que
véhicule l'actrice Belén Rueda qui dans le rôle d'Alma Böhm
incarne une prof de théâtre froide, rigide, autoritaire et dont les
méthodes semblent selon elle être éprouvées. Après une première
moitié franchement peu enthousiasmante, ennuyeuse et n'affichant en
réalité pas clairement les intentions du récit, la tournure que
prennent les événements, et notamment lorsque Bianca se lance dans
ses propres investigations offrent un supplément d'intérêt. Cette
petite impulsion qui nous convainc que d'aller mettre son pyjama, se
laver les dents et se plonger sous les draps du lit peuvent bien
attendre quelques dizaines de minutes supplémentaires.
Malheureusement, la suite ne se montrera pas à la hauteur de nos
attentes. Des dizaines de Jumpscares
et de Twists
plus tard, le constat est sans appel : No
Dormirás est
un piètre film d'horreur ne souffrant quasiment d'aucun sursaut.
Cela peut marcher une fois, deux tout au plus, mais à force
d'entendre des coups de semonce accompagner les apparitions répétées
d'une certaine Dora, la magie n'opère plus. D'autant plus que les
motivations s'éclairent sous un nouveau jour qui les rends toujours
plus ridicules et improbables. Bref, le long-métrage de Gustavo
Hernández n'est rien de plus qu'un coup d'épée dans l'eau...
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