Pour son premier
long-métrage en tant que réalisateur, Shane Atkinson signe un
thriller qui n'a pas à rougir face à la concurrence. Et encore
moins devant l’œuvre des frères Coen puisque LaRoy
s'inscrit
dans la lignée de Blood Simple,
Fargo
ou encore No Country for old Men.
À tel point qu'il est inenvisageable d'y voir autre chose qu'un
hommage à ce duo d'experts du septième art qui ont dans leur
carrière signé bon nombre de classiques du genre. Tout, de
l'esthétique à la mise en scène en passant par les protagonistes
renvoie à cette idée d'une Amérique profonde quelque peu
déglinguée, perdue dans le désert et peuplée d'individus plus
louches les uns que les autres. En ce sens, LaRoy
fait honneur au genre en appliquant les mêmes méthodes que Joel et
Ethan Coen dès le début de leur carrière. Ici, le héros est
incarné par un pauvre type, pas très courageux, propriétaire avec
son frère d'une quincaillerie, marié avec une ancienne reine de
beauté, sans enfants et vivotant en attendant que les choses
s'améliorent. Interprété par John Magaro, Ray est l'incarnation
parfaite de l'individu asservi (ici par son frère Junior personnifié
par Matthew Del Negro), trompé par sa femme Stacy-Lynn (Megan
Stevenson, parfaite en cruche adultère), manipulé par son
entourage, au bord du suicide mais qui au fond croit toujours en son
amour pour celle qu'il a épousé puisqu'il va accepté de commettre
un meurtre contre de l'argent. Ce même argent que la banque lui a
refusé et qui aurait dû permettre à Stacy-Lynn d'ouvrir son propre
salon de coiffure. Comme si cela ne suffisait pas, le réalisateur et
scénariste intègre au récit un vrai-faux détective privé
(l'acteur Steve Zahn) que deux officiers de la police locale
s'amusent à faire tourner en bourrique, un tueur à gages prénommé
Harry qu'interprète Dylan Baker que l'on pu notamment découvrir
dans Happiness
de Todd Solondz en 1998 ou dans les seconds et troisième volets de
la franchise Spider-Man de
Sam Raimi en 2004 et 2007, ainsi que d'autres personnages secondaires
qui viendront élargir les rangs d'une galerie d'individus
parfaitement improbables. Lors du Festival du cinéma américain de
Deauville ayant eu lieu entre le 1er et le 10 septembre 2023, Shane
Atkinson n'est pas reparti les mains vides.
En
effet, Laroy
a remporté trois des plus grandes récompenses avec le Grand
Prix,
celui de la Critique
ainsi que celui du Public.
Des distinctions hautement méritées au vu de la qualité du travail
accordé sur le fond et sur la forme. Bénéficiant de la très belle
photographie de Mingjue Hu, le long-métrage est surtout doté d'un
solide scénario qui tient la route de bout en bout et ce, jusqu'à
la résolution de l'intrigue. Entre thriller et comédie noire, Shane
Atkinson est parvenu à construire une histoire parfaitement crédible
bien que les retournements de situations soient très nombreux. Il
est en effet étonnant de voir avec quelle constance la magie opère
lors des incessants twists, chaque détail s'imbriquant à la
perfection aux autres. Il devient parfois jouissivement délicat
d'envisager quelle tournure vont prendre les événements. À force
de contrariétés dans le cheminement logique de tout thriller qui
respecte une ligne de conduite relativement classique, ici, chaque
renversement est un véritable bonbon acidulé dont le spectateur
aura l'occasion de se délecter. John Magaro est impeccable dans le
rôle de ce mari trompé mais toujours aussi amoureux de son épouse,
foncièrement bon bien qu'au départ, un peu trop mièvre et naïf
(on parle là du personnage et non de l'acteur qui l'incarne). Grâce
à sa touche d'humour permanente, le film de Shane Atkinson évite de
sombrer dans la noirceur absolue. Et pourtant, ça n'était pas gagné
vue la tournure que prennent les événements, chacun d'entre eux
faisant davantage patauger les protagonistes dans un sable mouvant
duquel ils semblent incapables de se dépêtrer. Bref, Laroy
est un indispensable petit bijou sur fond de musique country qui fera
patienter les amateurs de thrillers en général et des frères Coen
en particulier. On attend impatiemment les prochains projets de
Shane Atkinson...
La Roy poursuit brillamment cette longue tradition de films noirs ruraux qui décortiquent l'attachement des américains pour le pognon, encore, encore ...
RépondreSupprimerSteve Zahn est drôle et le film laisse pointer de ci de la une touche d'humanité fort bienvenue.