Il va décidément
falloir leur expliquer un jour à ces bonshommes, que les récurrentes
scènes pré-génériques des films d'horreur ne servent absolument à
rien ! Le meilleur moyen de conserver l'intérêt du spectateur
jusqu'au générique de fin reste encore de lui faire payer sa place
de cinéma au prix fort. Sorti de cette seule considération,
Immaculate
n'a à proprement parler pas besoin de ce genre de subterfuge stérile
dont la signification n'aura de toute manière aucun impact sur la
suite des événements. Si son auteur, l'équipe technique ainsi que
les interprètes veulent vraiment saisir leur public à la gorge, ils
n'ont qu'à entreprendre ce même genre de grand œuvre qui dans le
cas présent ne renouvelle sans doute pas tout à fait le genre mais
lui offre une patine qui sans conteste fera de lui l'une des plus
brillantes créations horrifiques de cette année 2024. Si le cinéma
d'horreur a le principal défaut de n'avoir plus grand chose à
offrir d'inédit, c'est bien dans la manière d'aborder le sujet que
se trouve la clé de la réussite. Et ça, le réalisateur Michael
Mohan l'a parfaitement intégré. En observant de loin ou au
contraire de très près le scénario d'André Lobel l'on pense tout
d'abord à l'un de ces nombreux spécimens de films d'épouvante
s'inscrivant dans un contexte religieux relativement commun de nos
jours. Si les plus jeunes auront sans doute le reflex d'évoquer La
nonne
de Corin Hardy, les plus anciens et donc, les plus clairvoyants
verront dans ce nouveau long-métrage, une œuvre en totale
adéquation avec l'oppressant Dark Waters
du réalisateur italien Mariano Baino qui trente ans auparavant avait
su créer un climat anxiogène particulièrement saisissant. Le titre
du film de Michael Mohan évoque l'Immaculée Conception qui dans ses
prémices concernait la naissance de la Vierge Marie née d'une mère
qui ne connut pas le péché originel. Axe quasi central de ce récit
entièrement tourné dans un couvent fictif mais dans une Rome elle,
bien réelle de la Villa Parisi et du Palazzo Doria Pamphilj,
Immaculate
s'intéresse à la jeune Cecilia (l'actrice Sydney Sweeney) qui des
années après avoir survécu ''par miracle'' à une noyade lors de
laquelle les battements de son cœur s'interrompirent durant sept
minutes, la jeune femme est notamment accueillie par le Père Sal
Tedeschi (Alvaro Morte) et par la Mère Supérieure (Dora Romano). À
son arrivée, Cecilia est examinée par un obstétricien avant d'être
accompagnée dans ses quartiers. Quelques jours après son arrivée
et alors qu'elle prend un bain aux côtés d'autres jeunes sœurs,
Cecilia est prise de nausées et est transportée jusqu'au cabinet
médical du couvent où elle est une nouvelle fois auscultée.
Interrogée
ensuite par le Cardinal Franco Merola (Giorgio Colangeli) et par le
Père Sal Tedeschi, la jeune femme apprend qu'elle est enceinte alors
même qu'elle jure n'avoir jamais commis le moindre péché de chair.
L'attention de la communauté se porte alors désormais intégralement
sur la jeune femme. L'une de ses camarades se suicide du haut d'un
toit après avoir tenté de la noyer dans la salle des bains tandis
que Cecilia assiste à l'amputation de la langue d'une seconde un peu
trop bavarde au goût du Père Tedeschi. Dès lors, la jeune femme va
chercher à en savoir davantage sur ce qui se trame réellement dans
l'obscurité du couvent... Si certains y virent l'opportunité
d'aborder le sujet du féminisme ou du déni de grossesse,
Immaculate
est surtout plus simplement un excellent film d'ambiance, macabre à
souhait, où le directeur de la photographie Elisha Christian et le
chef décorateur Adam Reamer sont parvenus à exploiter ce qui
caractérise leur profession afin de rendre oppressant le moindre
élément de décor. Tout comme d'ailleurs le compositeur Will Bates
qui signe là une bande musicale souvent glaçante et en parfaite
adéquation avec le sujet. Pour un petit budget de huit millions de
dollars, Michael Mohan parvient à redorer le blason d'un genre par
trop irrégulier. Le long-métrage mélange croyances ancestrales et
sciences modernes dans un projet de renaissance du Christ absolument
délirant. Ici, réalisateur et scénariste prennent le contre-pied
de l'héroïne de Saint Maud
de Rose Glass pour laquelle la foi méritait bien son sacrifice
tandis que dans le cas de Immaculate
la survie de Cecilia devient son unique perspective. Angoissant mais
aussi ponctué de quelques séquences franchement dérangeantes (et
notamment celle où l'une des jeunes sœurs se fait couper la
langue), on ne saura jamais vraiment où se situe la part de
fantastique. Cecilia est-elle le simple objet d'un fanatisme et d'une
manipulation faisant croire à l'Immaculée Conception ou bien
l'est-elle réellement ? Que l'on croit ou non à ce que délivre
le message, au fond, on s'en tape. Car au delà du récit, Michael
Mohan est parvenu à exploiter les environnements de telle manière
que le film renvoie forcément parfois à quelques brillants
classiques de l'épouvante. Gore, sinistre et parfois anxiogène,
Immaculate
est une réussite...
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