Avec une telle affiche,
un titre pareil et un début de récit lors duquel un gamin griffe un
camarade de classe et mord l'un de ses jeunes voisins, il faudrait
avoir un esprit de déduction étonnamment étriqué pour ne pas
percevoir le sujet central de Wolfkin
de Jacques Molitor. Si le film évoque tout d'abord l'hypertrichose,
une étrange maladie génétique qui provoque une étonnante
prolifération de poils sur tout ou partie du corps d'un individu,
nous sommes bien devant un phénomène de type fantastique découlant
originellement de cette affection et qui donna lieu dès le début du
vingtième siècle à de nombreux longs-métrages autour du thème
des loups-garous. Rien n'est plus fascinant qu'une œuvre qui sort
des contingences habituelles. Plusieurs réalisateurs semblent avoir
pris compte de cela et proposèrent durant les dernières décennies
quelques longs-métrages particulièrement intéressants. On pense
notamment aux brésiliens Juliana Rojas et Marco Dutra et à leur As
Boas Maneiras,
au norvégien Jonas Matzow Gulbrandsen et à son Skyggenes
Dal
ou plus récemment et sur notre territoire à l'excellent Le
Régne
animal de
Thomas Cailley. Bien qu'il s'inscrive tout d'abord dans un contexte
social relativement réaliste, Wolfkin
rappelle pourtant sensiblement l'un des grands classiques de la
lycanthropie. En effet, lorsque le jeune Martin (Victor Dieu) et sa
mère Elaine (Louise Manteau) viennent s'installer dans la luxueuse
demeure des beaux-parents de celle-ci, au bout d'un certain temps, il
apparaît très clairement qu'il y règne un esprit de communauté
certes plutôt réduit mais dans le même esprit que dans le
Hurlements
de Joe Dante. Le long-métrage de Jacques Molitor n'est pas qu'un pur
produit horrifique mais s'inscrit dans un contexte social dramatique
dans lequel une jeune mère de famille rencontre de grandes
difficultés avec son fils, lequel se montre agressif envers ses
jeunes camarades. Après avoir été renvoyée de emploi de
cuisinière dans un restaurant et après que Martin ait été écarté
de l'établissement scolaire où il étudiait, Elaine décide qu'il
est temps pour eux d'aller rendre une petite visite aux parents de
Patrick (l'acteur Benjamin Ramon) avec lequel on la découvre en
préambule avoir une rapport charnel en pleine nature.
Une
relation qui débouchera sur la naissance de Martin qui ne connaîtra
pas son père puisque celui-ci disparaîtra immédiatement des
radars. Élevant seule son enfant et vivant à Bruxelles, la jeune
femme espère donc sans doute trouver en la présence de Joseph
(Marco Lorenzini) et d'Adrienne (Marja-Leena Junker), un réconfort,
un peu d'aide et pourquoi pas une manière de comprendre ce qui
arrive à son fils. Un moyen, sans doute aussi, de se dégager
quelque peu de ses responsabilités même si l'amour de la mère pour
son enfant est très clairement établi ici. Derrière l'accueil
chaleureux des grands-parents de Martin et celui nettement plus froid
de Jean (Jules Werner), le frère de Patrick, l'on devine très
rapidement que derrière le cercle familial dans lequel viennent de
s'inviter la mère et son fils se cache un lourd patrimoine
génétique. Une tare concernant une longue lignée d'individus
victimes d'une malédiction qui provoque donc chez elles de
douloureuses transformations en loups-garous. Contemporain mais
impliquant parfois des enjeux archaïques (situation géographique,
mode d'existence aristocratique, apprentissage de la chasse), Wolfkin
est une œuvre qui se veut riche mais qui s'avère parfois expéditive
dans sa manière d'aborder le sujet de la lycanthropie et
l'observation des pratiques ancestrales de cette famille qui plus que
d'être simplement atteinte par ce mal extraordinaire est à
l'origine d'une autre thématique : celle de l'anthropophagie.
La relation entre la mère et l'enfant y est traitée avec beaucoup
de sensibilité même si très rapidement l'on se rend compte que la
maladie et le dérèglement psychologique de Martin vont prendre le
pas sur sa relation avec sa génitrice. Le film n'excédant pas les
quatre-vingt six minutes, Jacques Molitor se voit contraint
d'expédier quelques étapes du récit alors que l'on aurait sans
doute aimé un peu plus d'attention durant certaines d'entre elles.
Il reste que Wolfkin
demeure une sympathique alternative, moins originale que prévu,
certes, mais ses origines francophones comme purent l'être il y a
quatre ans celles du sympathique Teddy
de Ludovic et Zoran Boukherma ont font un objet de curiosité qui
attirera tout d'abord les fans de fantastique et ensuite, plus
précisément les amateurs de lycanthropie...
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