Ceux qui me connaissent
en profondeur, et ils sont rares, savent combien ma fascination pour
le réalisateur allemand Werner Herzog est grande. C'est bête, mais
je pense parfois à ce jour, terrible, où il ne sera plus. Où ne
restera plus de lui que son immense œuvre. Ce jour là, j'aurai
perdu un frère, un père, un fils, un ami et peut-être même, un
compagnon de route. Surtout, l'une de mes plus grandes passions sera
passée de l'autre côté... Non plus pour nous conter notre planète
et les créatures terrestres qui la peuplent, mais pour écrire sans
doute une nouvelle page. Ce monde de l'invisible qui n'est pour
l'instant accessible qu'à celles et ceux que nous rejoindrons tous
un jour. Un autre paradis. Pas celui qu'il aura mis en lumière
durant des décennies, mais celui qu'évoquent ceux qui veulent
croire que l'existence ne s'achève pas à l'instant même où l'on
passe de vie à trépas. Je me souviens encore très précisément de
ce jour où je découvrais ce film étrange, curieux, amusant mais
aussi parfois déconcertant intitulé Les nains aussi ont
commencé petits.
Je n'imaginais alors pas encore que j'allais pénétrer l'univers
d'un cinéaste hors du commun. Capable de mettre en scène des
projets insensés... Comme les plus évidents d'entre tous :
Aguirre, la colère de Dieu
et Fitzcarraldo...
Un cinéaste mais aussi un aventurier qui a cheminé à travers le
monde pour tirer des images inoubliables, qu'il s'agisse de fictions
ou plus simplement de la vie réelle. Des dizaines de longs-métrages
et autant de documentaire. Quoi qu'il puisse vous passer par la tête,
Werner Herzog y a pensé avant vous. Mais l'allemand n'a pas fait que
mettre en scène les autres et s'est accordé lui-même un infime et
savoureux instant de narcissisme à travers l'exceptionnel
documentaire Ennemis intimes
en 1998 dans lequel il revenait sur sa douloureuse mais salvatrice
rencontre avec l'acteur Klaus Kinski auquel il offrit cinq
longs-métrages. Mais bien avant lui, d'autres se pencheront sur cet
homme véritablement passionnant. Les Blank en 1982 avec le
formidable Burden of Dreams
qui revenait sur le tournage de Fitzcarraldo,
puis cinq ans plus tard, le réalisateur Steff Gruber qui à son tour
décidait avec Location Africa
d'évoquer un autre grand film du cinéaste allemand, Cobra
Verde.
Bien
longtemps après, la chaîne franco-allemande choisit de lui
consacrer un documentaire intitulé Werner Herzog
– Radical Dreamer et
traduit chez nous sous le titre Werner Herzog,
cinéaste de l'impossible
en rapport avec le surnom que lui donnent certains autres
réalisateurs. Dans celui-ci et contrairement aux précédents, le
réalisateur allemand Thomas von Steinäcker ne revient pas
spécifiquement sur l'une des œuvres de Werner Herzog mais sur sa
passionnante vie de cinéaste, partant ainsi de son enfance, de ses
premiers pas dans le cinéma ainsi que certains des grands moments
qui ont jalonné son existence. Lui que l'on croit invincible, qui
tourna l'extraordinaire séquence d'ouverture de Aguirre
au sommet du Machu Picchu, qui se risqua aux abords de la Soufrière
alors en pleine activité ou qui fut agité d'une authentique
démesure au moment de faire gravir un bateau de trois-cent tonnes au
sommet d'une colline versera pourtant quelques larmes et refusera
d'entrer de nouveau dans cette chambre qui le vit grandir... Toute
œuvre portant le sceau de cet immense artiste est un incunable. Ici,
les images d'archives sont nombreuses. Certaines demeurées célèbres
(comme la crise de démence de Klaus Kinski sur l'un des films
auxquels ils collaborèrent ensemble) et d'autres beaucoup plus
rares. Comme ces photos ou ces vieilles bandes vidéos en noir et
blanc qui le montrent lorsqu'il n'était encore qu'un tout jeune
enfant. Agrémenté de nombreux témoignages de la part de stars de
cinéma mais aussi de ses deux frères, inutile de préciser que
Werner Herzog, cinéaste de l'impossible est
un indispensable pour tout fan de Werner Herzog. À l'aune des images
qu'il a compilées durant son existence, parfois accompagnées par
l'envoûtante musique du groupe allemand Popol
Vuh,
la voix et le visage de cet artiste unique et donc hors-norme vous
hante à tout jamais...
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