En
France, il existe une catégorie de comédies qui n'a pas forcément bonne
presse auprès du public et des gratte-papier en général. Celles qui
abordent sous un angle humoristique et caricatural (un terme qui donne
parfois mal à la tête) certaines communautés ou ''traditions''
régionales de notre beau pays. Si à travers sa trilogie Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu et A bras ouverts
le réalisateur Philippe de Chauveron semble avoir trouvé un abondant
filon qu'il semble bien décidé à exploiter jusqu'à son épuisement, Dany
Boon s'est amusé de son côté à gentiment et ponctuellement caricaturer
nos amis du Nord Pas de Calais à travers Bienvenue chez les Ch'tis et La Ch'tite famille.
On ne va pas revenir sur les drames sociaux traités au quotidien sous
le couvert de l'humour (la liste serait trop longue) mais plutôt évoquer
la première comédie de l'acteur Eric Fraticelli qui elle, se déroule en
Corse. On entendit grincer les dents de certains qui évaluèrent bien
avant sa sortie sur les écrans français le 9 mars dernier, le taux de
clichés qui devaient encombrer la chose. Réalisé par un habitant même de
l'Île de Beauté, originaire de Bastia, on serait tentés d'affirmer que Permis de construire
trouve là, sa légitimité. Interprété par un nombre impressionnant de
seconds rôles et de figurants eux aussi originaires de Corse, on
pourrait même envisager le film comme une alternative à la Blaxploitation que l'on pourrait alors évoquer sous le terme de Corseploitation. Comme le fut d'ailleurs bien avant lui L'enquête Corse d'Alain
Berbérian. L'acteur/réalisateur se met en vedette aux côtés du
prolifique Didier Bourdon qui dans le rôle du dentiste parisien vient
s'installer en Corse afin d'y faire construire une demeure sur le
terrain de son père récemment décédé et qu'il n'a pas revu depuis des
années. Un père qui l'a abandonné alors qu'il n'avait que sept ans et
pour lequel, Romain à conservé un certain ressentiment. Débarquant sur
l'Île de Beauté en compagnie de son épouse Cécile (l'actrice Anne
Consigny), Romain va se frotter aux habitants d'un charmant petit
village et faire notamment la connaissance de Santu (Eric Fraticelli) et
de son épouse Columbia, la maire du village...
Alors oui, de la caricature, Permis de construire en regorge, disséminée par couches successives se planquant sous les oripeaux d'un humour typique du coin. C'est du moins ce que nous affirme le réalisateur ainsi que quelques personnages secondaires, faisant passer ainsi sans doute plus facilement la pilule pour celles et ceux qui auraient la prétention de porter haut et fier, le drapeaux de la démagogie. Car qu'il soit caricatural ou non, le film d'Eric Fraticelli prouve surtout que nos amis corses sont capables de faire preuve d'auto-dérision. D'autant plus que le film ne s'acharne pas à les rendre plus stéréotypés qu'il ne faut et choisi même de les montrer tels qu'ils sont en réalité : des femmes et des hommes chaleureux, droits, respectueux, qui ne demandent au fond qu'une chose : Que l'on respecte leur terre, leurs traditions ainsi que leur mode de vie. Une fois que le spectateur aigri se sera ôté de l'esprit que le film ne fait que se moquer de l'attitude un peu froide et méfiante des corses, il se laissera alors peut-être bercé par les magnifiques paysages et ce village extraordinairement beau qui sert de cadre à Permis de construire. On retrouve Didier Bourdon tel qu'on l'aime. Un peu bougon mais profondément humain. Ecrit par l'acteur/réalisateur lui-même, assisté de Didier Bourdon, le film dresse une galerie de portraits certes parfois outranciers (Simon Abkarian interprète notamment l'architecte Müller, une caricature poussée à son paroxysme qui évoque immédiatement le styliste et couturier allemand Karl Lagerfeld) mais qui s'avéreront tous très attachants. On pense notamment à Jean-François Perrone qui d'emblée n'est pourtant pas commode. Permis de construire est souvent drôle et s'octroie même quelques séquences émouvantes en général concentrées sur la fin du long-métrage. Quelques passages s'avèrent cependant relativement lourdingues comme l'évocation de la femme de ménage de l'hôtel-relais où vient poser ses bagages le couple Cécile/Romain. Un gag dans lequel celle-ci impose certaines règles afin d'avoir à en faire le moins possible au moment d'exécuter ses tâches ménagères. Ces quelques séquences répétitives s'avèrent assez peu amusantes voire pas du tout. Mais pour le reste, Eric Fraticelli est parvenu à réaliser une comédie amusante et attachante. Et si le scénario n'a vraiment rien de rafraîchissant, les décors et MÊME ses habitants suffisent à donner l'envie de se transporter jusqu'à cette magnifique île qu'est la Corse. Notons enfin la participation de Laurent Gamelon et de Frédérique Bel dans le couple d'amis qui se déchirent gentiment ainsi qu'Élise Luguern, Nicolas Zimako et Jean-Pierre Marcellesi qui à eux trois ont composé la bande-originale de Permis de construire. Une partition musicale accompagnée en outre par le superbe Corsica de Petru Guelfucci..
Didier Bourdon, c'est comme les avocats : 10 ans de droit (avec les Inconnus), tout le reste de travers ! :-)
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