Les histoires de fantômes
coréens, c'est un peu comme ceux que l'on retrouve à vol d'oiseau
au pays du Soleil Levant à plus de mille kilomètres de distance.
Qu'on les nomme Yūrei ou Gwisin, cette fin d'année 2023 tente à
prouver que nous ne sommes pas prêts d'arrêter de bouffer du
fantôme asiatique. Et lorsque l'imagination n'est pas au
rendez-vous, on fait comme certains : on pille ce qui a déjà
été entrepris quitte à s'approprier jusque dans le moindre détail,
certains codes. Pour son dernier long-métrage intitulé Ogsuyeog
Gwisin,
le réalisateur sud coréen Yong-ki Jeong n'y va pas par quatre
chemins et emprunte sans vergogne au mythique Ringu
de Hideo Nakata, son fameux puits mais remplace Sadako par une
poignée d'enfants qui y furent enfermés. Oups ! Ne viens-je
pas de délivrer la fameuse clé de l'énigme que tout bon film
détient généralement jusqu'à la révélation finale ? Mais
qui s'en soucie vraiment à ce jour où rien de neuf ne s'affiche au
programme, où tout ce qui apparaît à l'image n'est que le résultat
d'un récit dont le script d'origine fut insuffisamment réfléchi ?
Ogsuyeog Gwisin
tente
à prouver s'il était besoin que le thème des fantômes asiatique
reste à tout jamais associé au cinéma japonais. Les coréens, eux,
produisirent malgré tout le miraculeux Janghwa,
Hongryeon,
long-métrage réalisé vingt ans plus tôt par le talentueux Kim
Jee-woon et sorti sur notre territoire sous le titre Deux
Soeurs. Une
brillante mais exceptionnelle réussite pour un pays dont la
spécialité se situe plus probablement dans les genres action et
thriller que dans l'épouvante. Ce que confirme justement le dernier
long-métrage de Yong-ki Jeong, lequel n'invente rien et s'octroie
le droit de proposer même l'un des pires exemples en matière de
fantômes asiatiques. C'est que l'on s'y fait cruellement chier dans
cet univers dont les nombreuses possibilités demeureront
malheureusement stériles. À commencer par le cadre. Celui d'une
ancienne station désaffectée du métro sud coréen. Terrain de jeu
fertile pour de nombreux films dont certains parvinrent très
nettement à se dégager de la masse. On pense bien entendu au film
culte que réalisa l'américain Gary Sherman en 1972, Death
Line
ou Le métro de la mort.
Ou bien à Creep
de Christopher Smith en 2004, sorte de remake qui ne veut pas dire
son nom mais dont l'efficacité fut tout aussi redoutable !
Exploitant
avec difficulté l'univers étouffant et souterrain du métro sud
coréen, Yong-ki Jeong propose une œuvre lisse, molle,
inintéressante, rabâchée, servie par des interprètes pourtant
plutôt bons mais dirigés avec flemme par un réalisateur qui semble
ne pas vraiment croire à son propre projet. Pour corser le tout et
diluer l'idée selon laquelle le bonhomme propose ici sa propre
vision du fantôme asiatique emprunté à l'un des grands classiques
du genre, Yong-ki Jeong récupère le fameux puits mais dégage la
jeune femme au longs cheveux bruns pour la remplacer par des
''clones'' de Toshio Saeki, le gamin-fantôme de l'autre grande œuvre
du genre réalisée en 2000 par un autre japonais du nom de Takashi
Shimizu, Ju-On.
Ils seront donc une dizaine à venir hanter la station de métro, à
vouloir ''importuner'' leurs prochaines victimes et à aller jusqu'à
être au centre d'une malédiction dont les personnages prochainement
tourmentés devront se débarrasser en refilant ''le bébé'' à
quiconque prononcera une série de chiffres. Derrière ces phénomènes
paranormaux et horrifiques agrémentés par des Jump
Scares
totalement puérils et donc tout aussi inefficaces se cache une
enquête journalistique menée par Na-Young (l'actrice BO-Ra Kim) et
son ami U-Won (Jae Hyun Kim), un employé de la fonction publique
travaillant à la gare d'Oksu. Une investigation menée sous la
contrainte d'une supérieure hiérarchique qui ne sait certainement
pas jusqu'où est prête à se fourvoyer sa subalterne comme nous le
découvrirons dans les derniers instants. Le problème avec Ogsuyeog
Gwisin
est que l'on a envie de croire qu'il reste encore quelque chose à
dire en la matière même si l'on sait pertinemment que tout à déjà
été écrit et raconté. Aucune fulgurance, pas même lorsque nos
deux protagonistes s'enfoncent plus loin dans les entrailles de
l'ancienne station de métro et donc, aucun réel sentiment d'effroi.
Ce qui pour un film d'épouvante reste tout de même un comble !
Bref, ça n'est pas avec Ogsuyeog Gwisin
que le genre va se forger de nouvelles lettres de noblesse et c'est
donc aux fans purs et durs du genre que l'on confiera le soin
d'analyser la chose tandis que le grand public, lui, préférera sans
doute se faire une piqûre de rappel en regardant de nouveau les
remakes US des grands classiques asiatiques du genre...
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