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vendredi 5 janvier 2024

Disquiet de Michael Winnick (2023) - ★★★★★☆☆☆☆☆

 


 

Debout à cinq heures du matin. Plongé dans un bain chaud, je vérifie sur mon téléphone portable que mon train pour Marseille est toujours ''sur les rails''. Deux heures plus tard, je m'installe dans l'une de ces extrémités d'un wagon qui permet d'avoir une vue d'ensemble. Pour l'instant, pas âme qui vive ou presque. Mais quelques arrêts plus tard, le train est bondé. Direction, Marseille et sa population en mode United Colors of Benetton à laquelle nous pourrions ajouter quelques critères supplémentaires. Comme cette femme d'un âge incertain qui parle sans doute au fantôme de son ex, le regard perdu dans le vague, récipiendaire d'une société qui nourrit ses enfants d'une peur qui ne fait que s’accroître et les transforme en créatures déséquilibrées. Ce mur vers lequel, justement, je fonce, tel un Lucky Luke du vingt et unième siècle, frôlant la paranoïa plus rapidement que ne l'avait envisagé ma santé mentale. Un gouffre auquel j'échappe régulièrement dans ce pays merveilleux, là où poussent sans saveurs particulières mais aux formes et au couleurs millénaires, plusieurs centaines de succulentes. Un vrai beau paradis, réel, loin du bitume et de mes contemporains qui scrutent, jugent et condamnent. Après une semaine de convalescence dans un petit coin pas tout à fait perdu pour tout le monde, me voilà ragaillardi et près à affronter de nouveau des cascades, des montagnes, des océans de merde couchés non plus sur support argentique mais délivrés de manière plus insidieuse puisque dématérialisée. Véritable laboratoire ayant pour vocation de tester, jour après jours, ma résistance aux projets les plus invraisemblables que le septième art ose prendre le risque de vouloir m'infliger, mon petit appartement d'à peine soixante-dix mètres-carré respire à nouveau, tous volets ouverts, lumière aveuglante n'ayant jusque là filtré qu'à travers les minces interstices des volets ces sept derniers jours. Je me risque à jeter un regard à ce projet de cinéma qui se veut angoissant, plongeant sa poignée de protagonistes dans l'univers anxiogène d'un hôpital déserté... Mais l'est-il d'ailleurs réellement ? Contre-attaquant le phénomène de la page blanche, le scénariste emprunte à la série The Walking Dead l'une de ses toutes premières séquences. Celle d'un homme qui deviendra rapidement le protagoniste principal, allongé sur le lit d'un hôpital apparemment vidé de ses patients et de son personnel mais dont il trouvera lui-même la sortie de secours. Chose qui se révélera par contre beaucoup plus délicate concernant ceux qui dans le cas de Disquiet vont évoluer dans ce même type d'établissement.


I

Lorsque successivement, tu t'endors et te réveille une bonne dizaine de fois durant la projection :


Tu découvre une poignée d'individus qui veulent comprendre au moins autant que toi la signification des faits qui se déroulent à l'écran. La fosse à purin n'est pas très loin. On en sent d'ailleurs les premières effluves, irritant les naseaux comme au passage du train près de la gare de Tarascon où une usine à bois crache quotidiennement les milliers de mètres-cube d'une fumée malodorante. Le résumé du film vantait la présence à l'image d'un acteur dont je ne soupçonnais pas l'existence jusque là. Est-il la seule référence à laquelle espèrent pouvoir se raccrocher les auteurs du long-métrage ? Il semble bien, oui. Notre bonhomme combat d'emblée un ''Père Fouras'' survitaminé qui le temps de faire d'improbables et ridicules cascades dans un couloir désaffecté, a abandonné sa vigie et ses énigmes. Tout ceci commence fort mal et, sachez-le, ne va aller que de mal en pis. Rencontre avec une jeune beauté pas très futée venue se faire refaire la carrosserie par un binôme de chirurgiens aux faciès hors-norme. Remplacés d'office par trois jeunes donzelles pas plus rapides à exercer leurs morbides desseins qu'un trio de vieillards participant à une course en déambulateurs ! Si l'on ne frise pas encore tout à fait le ridicule, on en ressent déjà les prémices... Michael Winnick signe ici son avant dernière œuvre, prônant un ton horrifique pour lequel l'aficionado ne ressentira pourtant aucune forme d'empathie. Vu que le projet se dirige doucement mais de manière irréversible vers la comédie involontaire, tout amateur de sensations fortes rentrera chez lui à l'issue de la projection, une main devant, une main derrière. Le rouge au joues, le spectateur arborera le visage rubicond du bonhomme qui ne sait pas comment avouer à un artiste que son travail est mauvais ! Et pourtant, quoi de plus honnête que de rendre service à une humanité toute entière vouée à l'art de la fiction que de faire comprendre à un individu que sa meilleure porte de sortie serait de changer de métier ? Embourbant Disquiet d'une succession de séquences proprement abracadabrantesques, le réalisateur emporte avec lui dans la tourmente, son équipe technique ainsi que ses interprètes. Lesquels, les pauvres, ne parviennent jamais à sauver les meubles du raz de marée qui vers eux, se précipite...


II

Lorsque enfin, tu prends la décision de tout reprendre à zéro pour découvrir ce qui se cache réellement derrière le film :


Tu passes pour l'idiot qui n'a pas su saisir tout le potentiel comique qui repose sur des non-dits eux-mêmes cachés derrière la volonté exprimée d'effrayer le public. En dehors du fait que Disquiet paraisse parfois démesurément ambitieux (la référence à L'échelle de Jacob d'Adrian Lyne, à The Mist de Frank Darabont ou de manière encore plus obscure au Phantasm de Don Coscarelli), il devient rapidement évident que l’œuvre de Michael Winnick prône le désir de vouloir amuser la galerie autant que de lui apporter son content de frissons. Car alors, comment justifier la séquence lors de laquelle les trois donzelles évoquées plus haut cavalent au plafond autrement que sur le ton de l'absurde ? Une séquence aux ficelles tellement grosses (voire même, grotesques) qu'on ne peut plus l'imaginer autrement que sous le prisme de l'humour. Tout comme le sentiment que le film évolue au sein d'un script dont les feuillets seraient tombés à terre, dispersés, puis rangés dans le désordre avant le début du tournage. Des personnages apparaissent, disparaissent, puis réapparaissent. Le temps présent offre sa place au passé à travers une somme de flash-back. Des protagonistes qui ne semblent pas être toujours ceux auxquels l'on pense. Tous ces points de vue qui cumulés transforment le projet en un conglomérat d'idées jetées en l'air, réceptionnées, puis mises en images dans le désordre. Ce fouillis qui confine à la grandiloquence donne finalement et inconsciemment ou non du corps à l'intrigue. À défaut de mettre à jour ses classiques ou d'opérer de grands changements dans le cinéma d'épouvante, Michael Winnick noie le poisson avec beaucoup de malice mais aussi, très peu d'honnêteté. Et ça fonctionne. Le film a beau faire ouvertement partie de ces œuvres qui tentent sans y parvenir de s'offrir une porte d'entrée dans le cinéma de genre, le mode de fonctionnement de la mise en scène, du montage, de l'écriture et de l'interprétation provoque un phénomène tout à fait inattendu : de cette purge annoncée par une esthétique de téléfilm du dimanche après-midi, le réalisateur parvient au final à nous offrir un sympathique divertissement. Mais ne nous emballons pas car dans la grande tradition des films d'horreur s'inscrivant dans un contexte hospitalier, Disquiet demeure malgré tout très loin derrière Re-Animator de Stuart Gordon, Freddy 3 : Les Griffes du cauchemar de Chuck Russel ou du méconnu mais néanmoins très réussi Infection du réalisateur japonais Masayuki Ochiai...

 

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