L'exceptionnelle et
théorique exiguïté du concept de Found-Footage est telle qu'il
contraint certains auteurs à aller piocher dans d'autres courants
afin d'élaborer de nouvelles formes de terreurs nocturnes. À
l'origine, le concept repose sur les péripéties d'un ou de
plusieurs personnages impliqués dans une enquête souvent liée à
des événements étranges voire pour certains, paranormaux. Cannibal
Holocaust du
réalisateur italien Ruggero Deodato allait puiser dans des rites ou
dans la nécessité de survivre à travers la pratique de
l'anthropophagie. Beaucoup plus tard, The Troll
Hunter
du norvégien irait quant à lui récolter l'un des juteux fruits de
la mythologie nordique tandis que beaucoup d'autres iraient récupérer
des phénomènes issus d'une autre planète pour combler certaines
lacunes propres au genre. Et parmi eux, Cloverfield
de Matt Reeves, Alien Abduction : Incident in
Lake County
de Dean Alioto ou l'infâme Area 51
du tâcheron opportuniste Oren Peli (auteur de la purge Paranormal
Activity).
En signant Hell House LLC
en 2015, le réalisateur Stephen Cognetti se doutait-il qu'il allait
d'une part débuter une franchise qui allait atteindre en 2023 son
quatrième volet et d'autre part qu'il allait de surcroît signer
l'un des Found-Footage les plus efficaces qui soient ? Car plus
que la plupart des œuvres du genre à avoir vu le jour depuis ses
débuts, et dieu sait si le filon fut exploité jusque dans ses
derniers retranchements, Hell House LLC
tient absolument toutes ses promesses. Partant d'un principe pourtant
relativement simple et ne faisant que marcher sur des chemins déjà
tout tracés, Stephen Cognetti va, du moins en ce qui concerne ce
premier long-métrage, exploiter la totalité des possibilités
offertes par son propre scénario ainsi que par l'environnement dans
lequel se situe l'action ainsi que l'engagement de ses principaux
interprètes. Avec Hell House LLC,
le réalisateur réinventait les concepts de maison hantée et de
train fantôme.
Tout
débute par l'évocation d'un drame ayant eu lieu cinq ans auparavant
et lors duquel, quinze personnes parmi une foule très nombreuses de
curieux perdirent la vie lors de la visite de la fameuse ''Maison de
l'enfer'' indiquée
par le titre. À dire vrai, un ancien hôtel que se sont réappropriés
quatre jeunes adultes afin de le transformer en maison des horreurs.
Appliquant avec soin la méthode des théâtres de sang, des musées
des tortures et donc des trains fantômes, cette œuvre familiale à
laquelle ont également participé des membres apparentés au nom de
Cognetti prénommés David, Craig, Joseph, Kevin, Marc et Matt le
film demeure l'un des points culminants en matière de Found Footage.
Et pour une fois qu'on nous épargne les éternels et épuisant Jump
Scares, pourquoi ne pas se laisser tenter par un film qui a priori
(et au vu de la piteuse bande annonce) n'a rien de vraiment
réjouissant ou d'innovant à nous proposer ? Ils sont quatre,
dont une fille (Alice Bahlke dans le rôle de Diane Graves) à
vouloir se faire un peu d'argent en proposant au public avide de
frissons une visite dans un décor qu'ils auront au préalable rendue
particulièrement sinistre. C'est sur cet événement, la préparation
qui le précéda et la tragédie qui en découla que Stephen
Cognetti propose à ses personnages de s'arrêter et aux spectateurs
d'assister. Si le concept du clown qui fout les jetons est presque
aussi vieux que le septième art, son utilisation est ici plutôt
modérée et effectuée de manière intelligente.
D'ailleurs,
on ne saura jamais vraiment par quel miracle il se déplace ou tourne
la tête lors de vifs moments d'angoisse accentués par des décors
sinistres et étroits, l'usage d'une obscurité à peine rompue par
la présence d'une lampe-torche ou par l'emploi de lumières
stroboscopiques particulièrement efficace. C'est surtout dans le
détail que l'on se remémorera longtemps cette expérience parfois
étouffante mais dont, malheureusement, le scénario est trop souvent
laissé à l'usage de protagonistes qui ne font la majeure partie du
temps que déambuler sans autre fonction que d'admirer le travail de
décoration qu'ils ont effectué jusque là. C'est donc au cœur de
menus détails que le film révèle son véritable potentiel
horrifique. Lorsque notamment, le personnage de Paul O'Keefe
(l'acteur Gore Abrams) est au prises avec un mannequin qui prend vie.
Scène réellement flippante lors de laquelle un détail, presque
insignifiant mais ô combien capital, va faire la différence entre
l'éternel évocation du gamin se planquant généralement de peur
sous ses draps et le personnage de Paul qui lui-même agit ainsi
après qu'il ait aperçu le temps d'un battement de cil, le mannequin
se pencher vers la droite. Effet garantit ! Dans l'ensemble, et
comme dans tout bon ou mauvais Found Footage,
Hell House LLC
est relativement bavard. Mais le film de Stephen Cognetti possède
ce petit truc insaisissable que beaucoup d'autres n'ont pas. Ce
premier volet d'une tétralogie dont le dernier volet est sorti cette
année est donc conseillé aux amateurs de sensations fortes en
général et de Found Footage en particulier. À déguster seul (ou
accompagné de votre épouse ou petite amie dont les hurlements
ajouteront un soupçon de terreur) et dans le noir, bien
évidemment...
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