L'aventure du projet
Acide
débute véritablement vers le milieu de la décennie précédente en
2017 lorsque dans le cadre de la collection Canal+,
''Écrire pour le cinéma de genre/fantastique'',
le réalisateur français Just Philippot réalise un court-métrage
catastrophe dans lequel un nuage chargé en acide avance
inexorablement en détruisant tout sur son passage. Métaux, roches,
végétation et organismes vivants en tous genres subissent les
assauts implacables d'une pluie qui brûle, dissout et reconfigure
d'une manière générale l'environnement ainsi que le comportement
des humains. Just Philippot condense et observe en un peu plus de
dix-sept minutes les conséquences de la catastrophe sur l'attitude
des survivants. Chasse gardée des zones protégées et surtout, la
tentative de survie d'un couple (Maud Wyler et Sofian Khammes) et de
leur jeune fils (Antoine Chaussoy) face au nuage menaçant qui avance
vers eux. Situant l'action dans la campagne française, Acide,
le court-métrage est d'une efficacité redoutable et même parfois,
réellement cruel (le père sacrifiant sa propre existence pour que
survivent les siens). Trois ans plus tard, le réalisateur réinvestit
les territoires du film catastrophe environnemental avec son premier
film cinéma intitulé La nuée,
œuvre sympathique mais non dénuée d'un certain nombre de défauts.
Il faudra attendre trois années supplémentaires pour que le projet
de long-métrage portant sur le même sujet que le court Acide
voit
le jour. Pourtant, l'adaptation cinématographique de ce projet
dépassant à peine le quart-d'heure est déjà bien là, dans la
tête de son auteur depuis au moins quatre ans. Les conséquences
étant ce qu'elles sont à l'issue du court-métrage dont la
conclusion s'était montrée on ne peut plus pessimiste, les
personnages et par là-même leurs interprètes respectifs changent
du tout au tout. Le trio de protagonistes du court disparaissent donc
au profit de Guillaume Canet, Laetitia Dosch, Patience Munchenbach ou
encore Suliane Brahim.
Bénéficiant
d'un budget riquiqui évalué à un peu moins de douze millions
d'euros, le long-métrage Acide voit
officiellement le jour sur grand écran dans notre pays le 20
septembre dernier, soit quatre mois après avoir fait ses premiers
pas lors du festival de Cannes dans la catégorie Séances
de minuit !
Après avoir récemment subit le naufrage artistique que représente
Astérix – l'empire du milieu,
voici que son réalisateur et l'un de ses principaux interprètes
Guillaume Canet refait surface dans le rôle principal de Michal. Un
père de famille, divorcé d’Élise (Laetitia Dosch), laquelle
donna naissance quinze ans auparavant à Selma (Patience
Munchenbach). Production franco-belge notamment produite par Pathé
Films, France 3 cinéma ou encore Umedia (pour la Belgique), Acide
subit les conséquences d'une durée beaucoup plus importante que le
court-métrage qui n'avait pas pris le temps... de prendre son temps
et allait droit au but. L'un et l'autre connaissent donc bien des
différences. À commencer par le format qui passe du 4/3 au
cinémascope. Contrairement au court, il y a désormais un début, un
milieu et une (pseudo)fin. Sous couvert d'une situation sociale et
environnementale difficiles bénéficiant d'une actualité des plus
prolixe, Just Philippot s'engouffre tout d'abord dans une brèche
dont la spécificité fait le beurre de certains partis. Les
violences policières sont donc ici effectivement décrites comme une
réalité ! Passage forcé pour les uns ou inutile (et de
mauvais goût) pour les autres, mais que voulez-vous, certains se
sentent sans doute investis d'un pouvoir de régulation morale que
votre serviteur ne partage absolument pas. Représentation d'une
famille décomposée entre père sous bracelet électronique et fille
en mode électron libre à tendance ''chieuse'' (signe d'une hérédité
plus ou moins assumée), Just Philippot œuvre donc dans le social
et transforme un assigné à résidence en figure paternelle
héroïque. Lequel trouve malgré tout le temps de se
battre verbalement en duel avec son ex alors que dehors le fléau
acide étend son réseau sur l'hémisphère nord. Avec ses (presque)
douze millions d'euros, Acide
ne peut ensuite compter que sur le talent de ses différents
artisans.
Comme
ceux en charge des effets-spéciaux. Sobres et discrets. Gros nuages
menaçants, fumerolles, flaques et rivières d'acide sulfurique,
chevaux fuyant le fléau climatique, pont menaçant de s'effondrer,
tentative d'exode vers des lieux plus sûrs, rien que de très commun
nourri par un soucis d'économie qui se voit pourtant à peine à
l'écran. De ce point de vue là, le film fait remarquablement bien
son travail. Un climat de tension qui diffère de celui préconisé
au départ par le récit au sein des milieux professionnels et privés
que partagent nos trois principaux protagonistes, grimpant ensuite
d'un cran grâce, en outre, à la partition musicale du compositeur
français Robin Coudert qui en 2012 fut notamment l'auteur de celle
du Maniac
de Frank Khalfoun (remake du film culte éponyme du réalisateur
américain William Lustig). Si les moyens financiers ne sont pas
mirobolants, ils s'avèrent cependant beaucoup plus conséquents que
ceux qui furent alloués au court-métrage. D'où une densité
d'action qui se démarque très nettement de l'original même de part
sa durée, Acide
contient quelques passages à vide inexistants cinq ans en arrière.
L'essentiel ne repose donc plus sur la seule catastrophe mais
également sur le portrait d'une famille dysfonctionnelle contrainte
de s'unir pour mieux aborder la catastrophe et ainsi la combattre.
Certains penseront sans doute que le court-métrage se suffisait à
lui seul. Il s'agit d'ailleurs bien souvent du même problème
lorsque un auteur prend le pari d'adapter un court au format long. Le
risque étant de dénaturer le produit d'origine. Il y a donc là
diverses manières d'aborder le sujet et même, LES sujets, selon que
l'on soit exclusivement intéressé par l'approche catastrophiste du
récit ou que l'on veuille accorder aux personnages une part
d'humanité en leur octroyant un temps plus ou moins long pour la
caractérisation. Une bonne surprise...
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