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samedi 9 septembre 2023

La douleur d'Emmanuel Finkiel (2017) - ★★★★★★★★★☆

 


 

La douleur qui s'exprime lors des scènes filmées par Emmanuel Finkiel est aussi forte que celle qu'éprouve son héroïne mais sans doute bien moins que celle que ressenti vers la fin de la seconde guerre mondiale celle qui posa des mots dessus. Marguerite Duras. La douleur est à l'origine un ouvrage paru en 1985 aux éditions P.O.L. La romancière y décrit le calvaire qu'elle vécu après l'arrestation de son époux Robert Antelme qu'elle épousa en 1939 et qui fut donc arrêté par la Gestapo avant d'être envoyé à Buchenwald 1er juin 1944 . Derrière ce nom barbare se cachait l'un des camps de concentration nazi les plus connus, lequel y retenait entre autres prisonniers, des communistes, des homosexuels ou des opposants politiques. Dans l'attente du retour de son époux, Marguerite Duras rédige à l'époque un journal dans lequel elle note son ressenti. Journal qui servira plus tard de matière première à l'écriture de La douleur dont le récit sera le point central d'un recueil portant le même nom. Quarante-deux ans après sa toute première parution dans les librairies, le texte est adapté sur grand écran par Emmanuel Finkiel qui l'année précédente nous avait servi le remarquable Je ne suis pas un salaud avec dans les principaux rôles, les formidables Nicolas Duvauchelle et... Mélanie Thierry à laquelle il offre désormais le rôle-titre de Marguerite Duras qui à l'époque portait donc le nom de son mari Robert Antelme. La douleur portant son sujet sur une très importante période de notre histoire, le film est donc incarné par des personnages eux-mêmes historiques. C'est ainsi que l'on retrouve l'acteur Grégoire Leprince-Ringuet dans la peau de François Mitterand. Homme d'état français qui bien des années plus tard deviendra le président de la République du 21 mai 1981 au 17 mai 1995. Mais alors que nous sommes en 1944, celui-ci se fait appeler François Morland et dirige le réseau de résistance connu sous le nom de Mouvement national des prisonniers de guerre et déportés. Le charismatique compositeur, interprète et acteur Benjamin Biolay campe quant à lui le personnage de Dionys Mascolo, lequel fait lui-même partie de la résistance auprès de Marguerite et Robert Antelme.


Face à ces valeureux français dont le film exprime finalement assez peu la force de leur engagement dans la résistance, l'on retrouve le cynique Pierre Rabier, membre de la Gestapo que la jeune Marguerite (alors âgée de trente ans) rencontre un jour et qu'interprète l'excellent Benoît Magimel qui l'année précédente incarna le rôle principal d'Antoine Rocard dans le formidable polar d'Olivier Marchal, Carbone. Pendant deux longues heures, Emmanuel Finkiel décrit le douloureux cheminement d'une femme dans l'attente de ses retrouvailles d'avec son mari déporté dans un camp de concentration. Nouant ainsi une étrange relation strictement intéressée des deux côtés avec Pierre Rabier qui, soit dit en passant, est interprété de manière terriblement glaçante par un Benoît Magimel impressionnant par son timbre, sa carrure (l'acteur s'est étonnamment empâté) et cette façon quotidiennement menaçante qui sourd derrière chaque phrase prononcée. Le but étant moins de reconstituer la France de l'Occupation que d'observer la psychologie dégradée d'une femme dans la douleur d'avoir été ''abandonnée'' par celui qu'elle aime, le long-métrage d'Emmanuel Finkiel cueille davantage les spectateurs à travers la remarquable interprétation, générale, mais d'abord celle de l'extraordinaire Mélanie Thierry, le visage grave, suintant le désespoir et l'amertume. Avec La douleur, Emmanuel Finkiel signe un très grand film, parcouru par les écrits de Marguerite Duras elle-même et dont la portée chavire littéralement le spectateur. Du très grand cinéma émotionnel qui sera notamment nominé dans les catégories Meilleure actrice, Meilleur film, meilleure réalisation, meilleure photographie, décors et costumes lors de la 44e cérémonie des César mais sans pour autant recevoir aucun prix. Contrairement au Festival du film de Muret qui en 2017 couronna Emmanuel Finkiel ou le Festival du film de Cabourg qui l'année suivante offrit un Swann d'or bien mérité à Mélanie Thierry pour sa très émouvante interprétation de Marguerite Duras. Une œuvre troublante, éblouissante, touchante, reconstituant avec justesse les états d'âmes de l'une des plus grands romancières françaises du vingtième siècle...

 

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