L'expression ''Il n'y a
pas de fumée sans feu'' sert à merveille le récit de ce
long-métrage signé en 1973 par le réalisateur et scénariste
français André Cayatte tout en étant contraire aux événements
qui y sont relatés. Celle-ci veut que des rumeurs naissent à partir
d'un fond de vérité. Pourtant, connaissant l'histoire telle que
l'auteur de Il n'y a pas de fumée sans feu la décrite,
le spectateur étant le témoin privilégié des événements qui s'y
déroulent est le seul à savoir qu'elle n'a, en réalité, pas sa
place ici. C'est pourtant ainsi que certains ''observateurs'' loin
d'imaginer la machination dont vont être les victimes un médecin
généraliste et son épouse, exprimeront leur mécontentement vis à
vis de ce couple pourtant irréprochable. Tout commence avec le
meurtre d'un jeune colleur d'affiches. Le film débute de la même
manière ou presque que l'excellent film que réalisa Pierre-Granier
Deferre en 1975, Adieu poulet avec dans les rôles
principaux, Lino Ventura, Patrick Dewaere et Victor Lanoux. Si
Il n'y a pas de fumée sans feu adapte en partie l'Affaire
Marković qui eut lieu à partir du 1er octobre 1968, le fait-divers
qui rattache non seulement l’œuvre d'André Cayatte mais aussi
celle de Pierre-Granier Deferre est celui qui se déroula en 1971,
année durant laquelle lors d'une campagne municipale, un colleur
d'affiches socialiste fut tué par arme à feu par des partisans du
maire Charles Ceccaldi-Raynaud. Même si l'issue du long-métrage est
différente des événements qui se déroulèrent par la suite, il
est clair qu'à travers ce film le réalisateur et le scénariste
Pierre Dumayet ont choisi de montrer certains aspects de la politique
dont certains de ses représentants usent de tous les moyens mis à
leur disposition pour arriver à leurs fins. Dans le cas de Il
n'y a pas de fumée sans feu,
l'impossibilité pour l'adjoint au maire sortant, Morlaix (excellent
Michel Bouquet, comme à son habitude), de démontrer que le nouveau
candidat aux futures élections (Bernard Fresson dans le rôle du
Docteur Peyrac) a des squelettes dans un placard va le contraindre à
user de méthodes peu recommandables.
Si
Peyrac, avec l'appui d'une partie de la population, est bien décidé
à se présenter aux futures élections et ainsi contrer le maire
Boussard (André Falcon), c'est parce que tout comme son entourage,
il veut combattre celui qu'il considère en partie responsable de la
mort du colleur d'affiches. Ainsi que celle d'un autre homme qui fut
témoin de son assassinat ! Peyrac étant irréprochable et
estimé des habitants de la ville, Morlaix va se servir de Sylvie,
l'épouse du docteur, et de ses fréquentations auprès d'Olga et
Jérôme Leroy (Mireille Darc et Marc Michel), un couple de libertins
qui organise chez lui des partouzes auxquelles n'a pourtant jamais
participé Sylvie. Abritant sous leur toit le photographe Ulrich Berl
(Mathieu Carrière), lequel a pour habitude de photographier les
ébats sexuels des convives, Morlaix parvient à convaincre ce
dernier de truquer l'une d'entre elles et d'y apposer le visage de
Sylvie afin de les faire chanter, elle et son époux et ainsi
contraindre Peyrac à retirer sa candidature... Sur près de deux
heures, André Cayatte signe une œuvre sans concession où le doute
plane au dessus de la tête de Sylvie, admirablement interprétée
par Annie Girardot qui tournera un certain nombre de longs-métrages
aux côtés du réalisateur. À ses côtés, Bernard Fresson ne
dépareille pas dans cette sobriété qui caractérise son
interprétation tandis que le spectateur est lui, seul ou presque à
connaître la vérité. Si la tension est réelle pour les différents
protagonistes, elle l'est également pour celui qui assiste derrière
son écran de télévision à ce spectacle affligeant de politiciens
près à détruire l'existence d'un homme et d'une femme (sans
oublier leur fils qu'interprète le jeune Frédéric Simon). Bien que
le thème sulfureux des parties fines organisées par des nantis
figure en toile de fond, André Cayatte n'en n'use qu'avec parcimonie
pour se concentrer sur l'essentiel : le combat d'un homme et de
sa femme pour que la vérité éclate au grand jour. La mise en scène
d'André Cayatte est sobre mais incisive et servie par une
interprétation générale absolument remarquable. Une œuvre
réaliste qui fait froid dans le dos...
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