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samedi 30 septembre 2023

Earwig de Lucile Hadzihalilovic (2022) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Au premier abord, la gamine qui hante le dernier long-métrage de la réalisatrice, scénariste et productrice française Lucile Hadzihalilovic semble entretenir un rapport avec l'inquiétante Coré de Trouble Every Day d'une autre cinéaste hexagonale, Claire Denis. Cachée du monde extérieur dans un univers clos, où l'obscurité domine et où les éclairages ne jaillissent qu'à travers les fentes de volets constamment fermés, Mia souffre d'un mal lui aussi étrange. Ici, point d'appétence pour la chair humaine mais un besoin presque fondamental qui restera scrupuleusement ignoré. Car Earwig (littéralement, Perce-oreille) se fait très discret concernant la maladie de Mia, jeune enfant interprétée par Romane Hemelaers à laquelle Lucile Hadzihalilovic offre son tout premier rôle. Pas sûr après ça que l'actrice belge retrouve du boulot après cette incarnation certes très intéressante mais qui semble désormais devoir la cantonner dans un registre bien particulier. Moins Earwig apporte de réponses et plus l’œuvre s'avère intrigante et donc, passionnante. Comme l'américain David Lynch aime laisser son public se démerder lorsqu'il s'agit de détricoter ses œuvres les plus complexes, la réalisatrice française n'a semble-t-il pas d'autre objectif que celui d'adapter l’œuvre de l'écrivain britannique Brian Catling qu'elle eut peur de trahir, lequel octroya finalement au film le terme de Transmutation. Pas facile de se plonger dans l'univers de Mia et d'Albert Scellinc (l'acteur Paul Hilton). D'autant plus que le long-métrage y impose une multiplicité de temporalités liée à autant de sous-intrigues. Car si le quotidien de Mia et d'Albert semble être une mécanique bien huilée, il va falloir s'armer de patience et se libérer de toute contrainte intellectuelle pour ne pas finir noyé sous l'absence d'informations. Atteinte de la maladie dite des ''Dents de glace'' (ou Pagophagie, affection qui pousse celles et ceux qui en sont atteints d'ingérer des glaçons ou tout types de produits encore congelés de manière compulsive), Albert est chargé de prendre soin de la jeune fille et notamment de ses dents qu'il est contraint de traiter par des moyens médicaux. Parti de cela, le spectateur n'a d'autre choix que de suivre une œuvre avare en paroles mais à l'atmosphère et au décorum suffisamment travaillés pour que son attention soit maintenue jusqu'au bout.


Et ce, même si l'incompréhension domine. Dans l'ombre, le ''Maître'' téléphone à Albert pour s'assurer que tout va bien et lui annonce qu'il va devoir préparer Mia à son futur départ. Visuellement, Earwig subjugue. Le travail sur la photographie de Jonathan Ricquebourg et les décors de Jeanne Fonsny participent de cette échappée vers l'irréel que d'aucun cherchera à analyser selon ses propres références puisque jusqu'au bout, le mystère demeurera. Les clés du film demeurent donc peut-être dans l'inconscient tantôt collectif, tantôt individuel de l'enfance. Cette peinture devant laquelle s'extasie Mia n'est-elle pas le reflet de ces maisons de poupées avec lesquelles jouent en général les jeunes filles de son âge ? L'art pictural se confond d'ailleurs avec le réel, lorsque vue de l'extérieur, une immense demeure aux atours similaires se matérialise devant nos yeux. Lorsque surgit à l'écran le mystérieux étranger (incarné par l'acteur belge Peter Van den Begin) tandis qu'Albert boit à la table d'un bar, Earwig, qui déjà faisait montre d'une certaine virtuosité narrative, se complexifie en intégrant un nouveau sujet centré sur deux autres personnages dont une certaine Céleste (la réalisatrice, scénariste et actrice britannique Romola Garai). Mieux : non seulement les deux récits vont s'entrecroiser mais de surcroît, Lucile Hadzihalilovic explose le cadre propre à la linéarité pour jouer sur une double temporalité. Deux facettes bien distinctes d'une même intrigue qui vont se percuter lors de la première sortie de Mia en dehors de l'édifice qui la retenait jusque là ''prisonnière''. Comme le spectateur semble observer ces personnages à travers une ''Boule à neige'', certains signes avant-coureurs trouvent malgré tour une justification (le monde se reflétant parfois pour Albert à travers la vision déformée d'un ou plusieurs verres). Discrète, minimaliste et répétitive, la bande-musicale d'Augustin Viard demeure l'un des atouts majeurs d'un long-métrage qui pose malgré la sobriété de la mise en scène, une profusion de questions. L'on sort de l'expérience sinon bouleversé, du moins conquis...

 

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