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mardi 9 mai 2023

The Forest of Love (Ai-naki Mori de Sakebe) de Sion Sono (2019) - ★★★★★★★★★☆

 


 

Imaginez-vous passer la main au dessus d'une plaque de cuisson brûlante, puis de la placer ensuite sous le jet d'une eau glaciale. Douleur et apaisement... Deux sensations qui peuvent entretenir une étrange relation toute en étant radicalement contraires. C'est un peu le sentiment qui se dégage de The Forest of Love (Ai-naki Mori de Sakebe) du réalisateur japonais Sion Sono. À force de nourrir mon quotidien à travers l’œuvre de ce grand cinéaste du Pays du Soleil Levant, à force de contempler des films où complexité rime avec génie de la mise en scène, je me disais bien qu'un jour l'un d'eux allait surpasser tous les autres. Me laissant sur le carreau comme en leur temps le Inland Empire de David Lynch, le Faux-Semblants de David Cronenberg, le Santa Sangre d'Alejandro Jodorowsky ou le Enter the Void de Gaspar Noé. Il est facile de s'emballer pour une histoire, un air de musique, un(e) interprète, une mise en scène et tout le décorum qui les accompagne. Tout n'est alors que question d'alchimie. De ressenti. Une communion que l'on sait partager avec d'autres qui partout dans le monde auront ressenti cette même vague d'immense tristesse, qui auront ri aux éclats et qui, très certainement, auront ponctuellement eu la gorge nouée. Peu habitué à faciliter la tâche de ses fidèles spectateurs mus par une égale fascination et une adoration sans borne (la mienne n'aura pris qu'une poignée de jours pour éclore), Sion Sono digérait en 2019 tout ou partie de son propre cinéma pour nous proposer un condensé de son art. Avec lui, le fond rejoint toujours la forme, scrutant le moindre détail, la moindre imperfection, pour la gommer et offrir un produit totalement accompli...


Avec toujours cette volonté de parfaire son œuvre sous un jour nihiliste. The Forest of Love n'échappe pas à cette règle immuable ancrée dans l'univers du réalisateur et scénariste qui une fois de plus s'en donne à cœur joie. Ici, la naïveté façon ''guimauve'' s'exprime tout d'abord de la manière la plus pure. La plus mièvre penseront certain. Sorte de version japonisante de nos Premiers Baisers encore plus ''nouille''. Une manière d'introduire huit étudiantes ''amies pour la vie'' que seule la mort peut séparer. Puis survient le drame, conté sous forme de flash-back. Le chaînon le plus important du groupe disparaît éclipsant ainsi les illusions. En parallèle, Sion Sono évoque un fait-divers sordide : des meurtres de jeunes filles en série dont les corps sont retrouvés dispersés dans une forêt. D'un passage dans le passé à un retour dans le présent, le réalisateur nous présente la clé de voûte du récit. Un personnage qui d'emblée ne fait pas ombrage de la malfaisance qui l'anime. Joe Murata (l'acteur Kippei Shîna) élimine scrupuleusement des étudiantes qui ont toutes partagées la même année d'étude. Contrairement à ce que l'on est en droit d'attendre dans ce genre d'intrigue, nulle enquête policière ne viendra s'intercaler entre le récit de ce tueur sadique et mythomane et ses nouveaux (et vrais/faux) adeptes constitués de trois garçons ayant l'ambition de tourner leur premier film et les deux seules filles du groupe d'amies à être encore en vie...


Notons que dans cette version de deux heures et trente et une minutes manquent nombre de séquences qui furent réinjectées dans le découpage en sept partie qui fut proposé plus tard au format série pour une durée totale de presque cinq heures ! Si Eiko (Natsuki Kawamura), Jay (Young Dais) et Shin (Shinnosuke Mitsushima) s'avèrent plus ou moins indispensable dans la pleine compréhension du récit, le film a tout d'abord pour objectif de mettre en lumière les personnages de Joe Murata, Taeko (Kyoko Hinami) et Mitsuko (Eri Kamataki). À ce titre, cette dernière nous offrira l'une des séquences les plus déchirantes de l'histoire du cinéma. Hantée par la mort de son ''Roméo'', fille d'un couple de bourgeois qui portent tous leurs espoirs en elle (on comprend mieux la rudesse du père), Mitsuko va être le déclencheur d'une étrange relation qui se nouera entre le tueur et ces jeunes qui le soupçonnent pourtant d'emblée être le responsable de la série de meurtres qui touche les environs de Tokyo. Les habitués verront d'un bon œil le style particulier de Sion Sono dont la complexité de la mise en scène n'en est pas moins aussi précise qu'éclairée. D'une cruauté rare mais aussi parfois terriblement drôle (les groupies/anciennes maîtresses du tueur/gourou s'agglutinant lors d'un concert), The Forest of Love, tout de noirceur vêtu, n'oublie pas de s'humaniser, qu'il s'agisse d'évoquer la représentation du Mal ou cet amour immodéré, emprunt de fascination et de folie pour son prochain. Drôle, bouleversant, gore, délirant, absurde, doté d'une très belle photographie signée de Sôhei Tanikawa et de la magnifique partition musicale du compositeur Kenji Katoh , The Forest og Love est un chef-d’œuvre, tout simplement...

 

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