En France comme dans la plupart des pays du monde, la mort de
l'afro-américain George Floyd aux États-Unis est devenue
tragiquement célèbre. Ce que l'on ne sait peut-être pas chez nous,
c'est que ce jour du 25 mai 2020 eu lieu sur le même territoire
américain une autre affaire qui heureusement n'eut pas de
conséquences mortelles mais dont le témoignage vidéo devint
cependant viral à travers les réseaux sociaux. Connue sous le nom
de ''Incident de l'ornithologue de Central Park'', cette affaire
a mis en scène une femme blanche du nom d'Amy Cooper face à un
homme de couleur dont le nom, Christian Cooper, pourrait prêter à
confusion alors que les deux n'entretiennent aucun lien de parenté.
Promenant son chien dans Central Park sans muselière, la jeune femme
d'origine canadienne aurait reproché à Christian Cooper,
ornithologue, un comportement vis à vis d'elle qui après enquête
et examen d'une vidéo filmée par l'homme lui-même se serait avéré
mensonger. Un cas de racisme confirmé qui lointainement sert en
cette année 2022 de base au récit du premier long-métrage réalisé
par la brésilienne Beth
de Araújo, détentrice d'une licence scientifique en sociologie. On
peut donc supposer que la réalisatrice est en mesure de maîtriser
son sujet. Celui d'un groupe de suprémacistes blanches qui après
s'être réunies pour la toute première fois vont commettre
l'irréparable sur les personnes d'une femme d'origine immigrée et
sur sa fille. Si Soft &
Quiet
renvoie immanquablement à tout un pan du cinéma, entre Home
Invasion
et drame social, Beth de Araújo l'aborde de manière concrète en
choisissant un format très à la mode qui consiste à tourner son
film d'un seul et unique plan. Ce procédé qui voudrait qu'on le
considère systématiquement comme une authentique prouesse technique
est certes appréciable dans le contexte de ce long-métrage puisque
les coupes habituelles relatives au montage ne sont ici plus
d'actualité. Une manière d'intégrer directement le spectateur au
cœur de l'épouvantable calvaire que va vivre non seulement la
poignée de suprémacistes du récit mais aussi et surtout leurs
victimes elles-mêmes. D'emblée, la réalisatrice brésilienne ne
fait pas montre d'un quelconque mystère entourant la personnalité
d'Emily qu'interprète l'actrice Stefanie Estes. Belle, blonde,
grande, élancée, elle est le portrait typique de l'américaine
devant laquelle toutes les portes ont des chances de s'ouvrir. Son
amie Kim (Dana Millican) les convie elle et plusieurs autres jeunes
femmes à se réunir dans une pièce afin d'évoquer de futurs
projets liés à leur vision d'une société qu'elles considèrent
être actuellement dirigée en priorité vers celles et ceux dont
elles ne partagent ni la couleur, ni les origines. Une tarte affublée
d'une croix gammée ''amoureusement'' préparée par Emily donnera le
ton !
On
n'est clairement pas ici pour rigoler et Beth de Araújo ne prend
d'ailleurs aucune pincette puisque les mots ''Juifs''
ou ''Nègres''
font partie du langage de ces mères de famille apparemment propres
sur elles. La réalisatrice tente une approche psychologique de son
''héroïne'', expliquant les raisons qui feront basculer la jeune
femme dans cette forme de néonazisme. Des raisons qui d'ailleurs
prennent une forme différente selon que l'une ou l'autre des
convives témoigne de sa propre expérience (l'une d'entre elles
n'est-elle d'ailleurs pas la descendante d'un membre du Ku
Klux Klan?).
S'il est entendu que les propos tenus par ces femmes en mal de
reconnaissance restent choquants, l'actualité semble avoir quelque
peu rendu ''anodin'' un tel discours. Non pas que l'on demeure
indifférent aux bêtises qu'elles échangent et qui montrent le peu
de facultés intellectuelles dont elles semblent être dotées (on a
parfois l'impression que le groupe est avant tout constitué afin
''d'enrichir'' leur morne existence) mais l'on finit par se blinder
soi-même face à l'horreur dont est capable de se rendre coupable
l'humanité. Sauf que tout se corse lorsque bien évidemment survient
la confrontation entre les jeunes suprémacistes et deux femmes
immigrées. On passe ainsi de la théorie à la pratique dans un
désordre total puisque mal préparées, quatre des membres du ''club
des suprémacistes blanches''
vont se rendre coupables d'atrocités commises sur leurs victimes.
Quelques actes de barbarie viennent donc bousculer le spectateur, la
réalisatrice filmant le tout d'une traite et caméra à l'épaule.
Façon reportage ou ''Found
Footage''.
Ça hurle, ça pleure, ça suffoque et l'on ne reprochera pas aux
actrices d'en faire des caisses. Beth de Araújo parvient parfois à
créer le malaise au sein du récit. Techniquement, si l'épreuve du
plan-séquence est plutôt satisfaisante, la brésilienne prend un
risque minimum puisque les interactions avec le monde extérieur sont
minimes. En effet, les rues, le magasin et les divers lieux que les
personnages croisent s'avèrent étonnamment vides. Un subterfuge
pourtant rendu crédible grâce au contexte temporel puisque le récit
semble se situer en fin de journée... Une production Blumhouse...
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