Alors qu'il est en plein tournage d'une suite supposée directe de
L'exorciste réalisée par William Friedkin en 1973,
David Gordon Green signe en 2022 ce qui s'apparente à l'ultime
retour de l'un des plus célèbres boggeymen du l'histoire du cinéma,
Michael Myers. C'est en tout cas ainsi que l'envisage le réalisateur
américain qui de toute manière vient de perdre les droits de la
franchise au profit de Malek Akkad, fils du célèbre producteur
syrien Moustapha Akkad qui produisit en autres longs-métrages les
huit premiers films Halloween
réalisés entre 1978 et 2002. Pour cette dernière aventure
intitulée Halloween Ends,
David Gordon Green reprend un principe qui aurait pu et même dû
être envisagé à l'issue du quatrième volet puisque à la fin de
celui-ci, le personnage de Jamie Lloyd qu'interprétait alors
l'actrice Danielle Harris semblait devoir reprendre le flambeau après
que Michael Myers soit tombé au fond d'un puits de mine. Si
l'actrice réapparaissait bien dans son rôle dans le cinquième
long-métrage, Michael Myers également... À l'issue de Halloween
Kills
sorti l'année passée, on pouvait se demander dans quelle direction
allaient se diriger les événements dans l'ultime volet de la
trilogie réalisée par David Gordon Green. Le réalisateur ne tarde
pas à apporter une réponse franche puisque dès l'entame l'on fait
la connaissance d'un nouveau personnage du nom de Corey Cunningham.
Incarné par l'acteur canadien Rohan Campbell, celui-ci ouvre les
hostilités en tuant accidentellement un gamin dont les parents lui
avaient confié la charge durant quelques heures. Arrêté, puis
emprisonné après avoir été condamné à passer quatre ans
derrière les barreaux, Corey revient dans la ville de Haddonfield où
furent perpétrés nombre de massacres de la part de Michael Myers.
Un monstre qui depuis a cessé de nuire de manière directe mais qui
a laissé un profond traumatisme parmi les habitants de la petite
localité. Là, le jeune homme qui travaille dans une casse auprès
de son père Ronald (l'acteur Rick Moose) rencontre des difficultés
pour s'intégrer. D'autant plus qu'en ville, certains se souviennent
de lui et du meurtre qu'il a involontairement commis quatre ans
auparavant. Il y fait également la connaissance de Laurie Strode
(éternelle héroïne de la franchise, toujours interprétée par
l'actrice Jamie Lee Curtis) et de sa petite-fille Allyson (Andi
Marichak) qui a survécu aux précédentes attaques de Michael
Myers...
Théoriquement
(tout cela dépend de ce qu'aura l'intention de faire des droits de
la franchise Malek Akkad), Halloween Ends devrait
donc être le dernier volet consacré au tueur masqué et armé d'un
couteau de cuisine. Si la fin ne convainc pas la totalité du public,
alors comment le prochain réalisateur devra-t-il s'y prendre pour
qu'une fois pour toute la ville d'Haddonfield soit définitivement
débarrassée de son sinistre boogeyman ? Pour ce troisième
opus, David Gordon Green ne se contente pas de reprendre la recette
ultra classique du tueur semant la mort sur son chemin. Et même si
le bodycount est plutôt satisfaisant et les meurtres parfois très
saignants, le réalisateur américain semble davantage s'intéresser
aux traumatismes engendrés par la série de meurtres commis
précédemment. Mort mais hantant la population, le fantôme de
Michael Myers va prendre tout d'abord forme de manière tout à fait
inattendue. Cette approche d'une localité dont les habitants ne se
sont toujours pas remis des décès de leur proches et amis revêtant
alors le visage apparemment innocent du jeune Corey Cunningham. Un
gamin psychologiquement perturbé, marginalisé, entretenant une
relation ambiguë avec l'une des survivantes du précédent opus, que
le réalisateur va utiliser comme second couteau et comme miroir d'un
tueur qui reviendra de toute façon, qu'on le veuille ou non. De
cette manière de faire réapparaître le célèbre tueur portant un
masque de William Shatner blafard et inexpressif l'on peut douter de
la véracité. Comme si Halloween Ends explorait
l'éventualité d'un retour à la vie du boogeyman par l'entremise
d'une psyché profondément atteinte à l'image d'une ville marquée
par l'horreur. Et plus intimement lié à ce jeune garçon, Corey,
qui plus que le tueur innocent réapparaissant après quatre ans
d'enfermement va se révéler être comme une catharsis des pulsions
qui couvent à Haddonfield...
Corey
peut être envisagé comme une vision moderne du Arnold Cunningham de
Christine,
le chef-d’œuvre inviolable signé par John Carpenter en 1983.
Corey ne travaille-t-il pas dans une casse quand Arnold, lui,
traînait et trouvait dans l'une d'elles les pièces lui permettant
de réparer sa Plymouth Fury de 1957 ? Les deux garçons,
marginaux l'un comme l'autre n'entretiennent-ils pas une relation
nouvelle avec une jeune femme ? Ne portent-ils pas le même
nom ? L'approche des deux réalisateurs de l'univers et de leur
principal personnage n'est-elle pas commune, sombre et désespérée ?
Encore que de comparer l'un et l'autre des longs-métrages peut
apparaître abusif si l'on tient compte du fait que se cache dans
cette comparaison, d'un côté un chef-d’œuvre et de l'autre, un
film d'horreur honnêtement exécuté. Car Halloween
Ends
est sans doute le meilleur des trois volets signés de David Gordon
Green. La rencontre entre Corey et Allyson est touchante et le climat
particulièrement délétère. Comme une fin du monde (ou la fin D'UN
monde) annoncée ! Le désespoir transpire à chaque coin de rue
malgré le sourire de Jamie Lee Curtis/Laurie Strode. Le réalisateur
contient ses seconds rôles dans une charge qui ne dépasse pas la
simple parole et évite au dernier volet de la trilogie de se muer en
un ersatz de The Purge
de James DeMonaco. On regretterait presque que David Gordon Green en
est terminé avec Michael Myers...
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