Ahhhhhh, le rêve
américain... Ce formidable concept lié à ''L'Americain way of
life'' et permettant à
quiconque s'en donnant les moyens de vivre confortablement et heureux
remonte au seizième siècle. L’œuvre de la réalisatrice
américaine Olivia Wilde Don't Worry Darling
ne
remontera cependant pas jusqu'aux origines mais implantera son
idyllique communauté au cœur des années cinquante du siècle
dernier. Une décennie très représentative de ce mode de pensée
qui par delà les frontières peut parfois paraître dérangeant. Car
comment voir cette notion autrement que comme la généralisation des
mœurs d'un peuple ou plus simplement d'un groupe d'individus usant
de méthodes en tous points similaires. L'uniformisation est au
centre de ce projet dont le secret sera longtemps gardé par la
réalisatrice qui plutôt que d'imiter ses pairs en plongeant ses
protagonistes dans un futur proche et dystopique préfère les
intégrer dans une époque surannée, esthétiquement troublante et
révélatrice d'une certaine hypocrisie. Les années cinquante donc.
Avec ses standards musicaux. Ses couleurs chaleureuses. Ses voisins
souriants avec lesquels l'on partage un bon repas. Ses automatismes
journaliers décrivant des hommes allant travailler tandis que leurs
épouses s'occupent de la maison et des enfants. Le second
long-métrage d'Olivia Wilde trois ans après la comédie Booksmart
donne le ton et flirte avec le cadre au départ paradisiaque du Blue
Velvet
de David Lynch. Mais tout comme le chef-d’œuvre du cinéaste
américain dont on désespère d'assister au retour sur grand écran,
la machinerie va très vite s'en retrouver grippée. Étrange tout de
même, ce lotissement isolé, entouré d'un vaste désert et de
montagnes arides, zone où les épouses n'ont pas droit de cité.
Étrange également, ce couple à l'origine du projet ''Victory'',
du nom de cette petite ville aux charmes évidents. Frank et Shelley,
incarnés par Chris Pine et Gemma Chan. Trop polis, trop souriants,
trop calmes. Les apparences étant forcément trompeuses, la
véritable héroïne du récit Alice Chambers va mettre à jour les
failles d'un projet aux apparences sectaires, s'attirant ainsi les
foudres de la petite communauté. Ça n'est pas révéler cette
fausse ''disposition'' mise en place au cœur de la ville de Victory
que de préciser que tout n'y tourne pas vraiment rond. Comme en
témoigne rapidement la présence d'une habitante qui semble bien
avant l'héroïne avoir compris que tout ici n'est pas rose...
Plus
que de nous révéler la réalité des faits avec un surcroît de
parcimonie le même type de message que lors de l'un des twists du
génial Total Recall
de Paul Verhoeven, Olivia Wilde construit un château de carte
fragile constitué d'une somme de vérités troubles et de flash-back
explicatifs. Visuellement, Don't Worry Darling
est
une claque. Le travail du directeur de la photographie Matthew
Libatique est à mettre au compte des indéniables qualités du
long-métrage. L’œuvre de la réalisatrice fait partie de cette
génération de films qui mêlent une certaine idée de l'esthétique
lumineuse avec l'horreur la plus froide. Le long-métrage est d'une
certaine manière le Midsommar
des années 2020. Quoique son efficacité pourra être parfois remise
en cause en raison d'étonnants choix scénaristiques. D'improbables
changements de nature ou d'humeur dont fera notamment l'objet le
personnage de Shelley dans les derniers instants. Crispant certaines
des peurs les plus ancrées chez l'Homme, Olivia Wilde fait le bon
choix d'isoler son héroïne du groupe en renforçant le principe à
travers Jack, l'époux qu'interprète l'acteur Harry Styles. Lui-même
acquis à la cause du projet ''Victory''
dont on ne sait jamais vraiment dans quelles mesures les hommes de la
communautés connaissent la véritable teneur. Du drame paranoïaque
qui commence peu à peu à se profiler, le film verse ensuite dans le
thriller cauchemardesque. Une œuvre qui s'intéresse également à
des technologies se profilant actuellement à grande vitesse (la
réalité virtuelle) et offrant ainsi également une porte ouverte
aux amateurs de science-fiction. Au delà du simple projet qui vise
à faire de Don't Worry Darling le
témoin d'un futur théorique pas si absurde que cela, Olivia Wilde
semble également s'intéresser à ces méthodes de contrôles
mentaux, observant ainsi comme à travers un aquarium (ici,
l'objectif de la caméra) ses personnages parfois un peu trop
dociles. Certains reprocheront sans doute au film de ne pousser le
concept dans ses derniers retranchements qu'en de rares occasions.
Pas assez frontal. Lissé comme à l'image de son esthétique, les
''climax'' tombent presque comme des cheveux dans la soupe. Reste que
Don't Worry Darling
demeure tout de même l'une des très bonnes surprises de cette
année...
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