Que ne ferions-nous pas
pour assouvir les désirs de celle que l'on aime ? Pleurer
devant cette carte bleue qui n'en peut plus qu'on la déshabille des
quelques deniers qu'il reste sur son compte en banque lorsque
vient l'instant fatidique de la glisser dans la fente dédiée au
règlement de deux places de cinéma ? Mais ce jour-là, ce fut
fête. Places gratuites généreusement offertes par ma douce
Princesse à laquelle j'octroyais pour une fois le droit
d'outrepasser mes exigences de gentleman/ringard/macho. Le genre qui
ne souffre pas qu'une femme paie les places de cinéma ou règle la
note d'un restaurant, d'un hôtel ou d'un quelconque lieu de
villégiature. Et ça tombe bien, car à force d'aller voir sur grand
écran des comédies françaises par pur jouissance d'en faire des
critiques assassines ou plus rarement, d'en vanter les mérites,
c'est avec le cœur léger que nous sommes allés voir dimanche au
CGR de Narbonne, la nouvelle
comédie du réalisateur français Olivier Ducray. En fait, son
tout premier long-métrage puisque jusque là, le bonhomme n'avait
réalisé qu'une poignée de courts ainsi que deux documentaires !
À force d'entendre dire du mal des comédies françaises depuis un
certain nombre de décennies tout en étant directement témoin du
gouffre artistique dans lequel celles-ci s'enfoncent année après
année, il devient délicat de faire la critique des unes et des
autres sans prendre le risque de se voir affublé de noms d'oiseaux.
Surtout lorsque la dite comédie est, une fois n'est pas coutume,
plutôt réussie. Comme l'est Jumeaux mais pas trop
d'Olivier
Ducray, justement. Tout ce que l'on pouvait craindre est quasiment
absent. Bien entendu, vu le propos (deux frère jumeaux qui furent
séparés à leur naissance se retrouvent trente-trois ans plus tard.
Problème : l'un est blanc et l'autre, noir !), on imagine
d'emblée le genre d'engeance dont le sujet aurait pu accoucher.
D'autant plus que le blanc (Bertrand Usclat dans le rôle de Grégoire
Beaulieu), fils d'un couple de nantis, a plutôt bien réussi sa
carrière puisqu'il se présente comme candidat à de prochaines
élections législatives, tandis que le noir (Ahmed Sylla dans la
peau d'Anthony Girard), on s'en doute assez rapidement, n'a pas connu
le même destin. Réparateur en électroménager, il vit dans une
cité HLM...
Jumeaux mais pas
trop
est le genre de comédie, et de film tout court, qui joue sur le
contraste entre deux frères qui n'ont pour le coup, absolument rien
en commun si ce ne sont les gènes. Si le long-métrage d'Olivier
Ducray fera forcément bondir certains spectateurs de leur siège, le
film n'en est pas moins réussi. Véhiculant rapidement quelques
clichés qui n'étonneront personne, le spectateur aura malgré tout
l'agréable satisfaction de découvrir une œuvre s'intéressant
davantage à la relation entre les deux frères. Les caricatures ne
servant qu'à justifier les éclats de rires sincères d'un public
qui devait malheureusement ce jour-là, se faire éparse. Dommage.
Mais le film n'étant sorti que depuis une semaine, on ne désespère
pas que le public se rue en masse dans les salles une fois le bouche
à oreille ayant fait son œuvre. Bertrand Usclat et Ahmed Sylla
forment ensemble un duo vraiment attachant, accompagné par quelques
interprètes de la vieille garde. Isabelle Gélinas et Gérard Jugnot
campent les parents du jeune politicien tandis que Jean-Luc Bideau
interprète quant à lui, le père adoptif d'Anthony. Là où le
scénario du réalisateur et de Jean-Paul Bathany et Wilfried Méance
fait preuve d'intelligence, c'est dans sa manière d'aborder
l'abandon et les différences raciales et sociales. Jumeaux
mais pas trop
ne répète pas inlassablement ce que ces sujets ont tendance à
véhiculer d idées reçues. [Spoil] : En effet, plutôt
que de faire d'Anthony le récipiendaire exclusif des choix
malheureux d'une mère qui l'a abandonné à sa naissance, on
découvre plus tard que Patricia et Patrice Beaulieu eux-même sont
les parents adoptifs de Grégoire. Une manière plutôt élégante
d'évacuer d'emblée l'idée que la mère des deux hommes n'a pas
abandonné Anthony parce qu'il est noir mais pour des raisons
beaucoup plus profondes. Cet aspect plutôt moral du long-métrage
ressurgira d'ailleurs une seconde fois, lors de la rencontre avec la
véritable mère des deux garçons (l'actrice Claude Perron dans le
rôle de Claire). Notons également la présence de Pauline Clément
dans le rôle de Noémie Vignon, proche collaboratrice de Grégoire
et même... un peu plus. Jumeaux mais pas trop
est
une excellente surprise. Amusante, fraîche et sincère Mais ce que
l'on retiendra peut-être encore davantage des rires que certaines
situations génèrent, ce sont ces quelques instants de grande
émotion que les interprètes transmettent admirablement au public...
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