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mardi 18 octobre 2022

Blackbird de Jason Buxton (2012) - ★★★★★★★★★☆

 


 

S'il existe une divinité chargée de nous envoyer sur de mauvaises pistes, je veux bien déposer à ses pieds un monticule d'offrandes avant de les embrasser... Blackbird est l'un des ces films ayant échoué tout à fait par hasard dans ma vidéothèque alors que je pensais découvrir tout autre chose. Le film n'ayant rien en commun avec l’œuvre éponyme de Roger Michell, ce n'est pas deux ans en arrière que l'on remontera mais jusqu'en 2012, année de la sortie de celui réalisé par le canadien Jason Buxton. Le premier long-métrage d'une filmographie qui devrait être très prochainement accompagné d'un second, intitulé Sharp Corner. Reposant sur un scénario co-écrit par le réalisateur lui-même ainsi que par Noel S. Baker, Amnon Buchbinder, Gillian Everill et Michael Melski, Blackbird met en scène le jeune Sean Randall. Un adolescent âgé de seize ans, sans amis ou si peu. Le jeune garçon est victime de certains camarades de lycée qui l'humilient. Cette branche un peu débile du milieu scolaire dont les qualités semblent reposer sur ses seules facultés sportives. Sean est ce que l'on appelle un gothique. Portant un pentagramme tatoué dans le dos, féru de black metal et portant sur les épaules son éternel blouson noir clouté, il est victime de brimades parmi les jeunes joueurs de l'équipe de hockey sur glace de la ville. En outre, leur capitaine déteste le jeune garçon qui a tendance à tourner autour de sa petite amie Deanna Roy. Poussé par une assistance sociale à retranscrire par écrit ce que l'adolescent ressent au fond de lui, Sean commence à écrire une histoire autour d'une vengeance. Ses personnages ? Ceux-là même qui le harcèlent et parmi eux, Deanna, justement. Mais lorsque la police fait une descente chez son père et découvre sur son ordinateur ses écrits et dans sa chambre des armes à feu chargées à bloc de munitions, Sean est arrêté, interrogé, jugé, puis envoyé dans une prison pour jeunes délinquants...


Là, débute un long chemin de croix. En effet, Blackbird qui doit sans doute son nom dans le lien que peuvent entretenir les goûts musicaux du jeune héros et le nom d'oiseau dont sont en général affublés les gothiques (que l'on nomme souvent sous le nom de corbeaux) décrit avec beaucoup de justesse le parcours d'un adolescent reconnu coupable par la justice américaine d'avoir projeté le massacre de l'équipe de hockey sur glace de son école. Un constat établi par le juge et l'avocate de l'accusation ne reposant pourtant que sur les seuls écrits de Sean. Si le long-métrage de Jason Buxton ne repose jamais sur des actes de cruauté visuellement insoutenables, il y a des épreuves douloureuses que l'on aurait sans doute aimé ne pas voir dans cette œuvre extrêmement riche de part la diversité de ses thématiques. Même si de prime abord le film semble engoncé dans tout un fatras de stéréotypes, il fallait bien que ses auteurs offrent au récit une base solide et relativement classique pour justifier la plupart des événements qui s'y produisent. Sans jamais être le moins du monde rébarbatif, Blackbird évoque les conditions de certains élèves marginalisés confrontés à une certaine forme d'uniformisation qui mène irrémédiablement au clash. Une différence qui isole, et qui sans désocialiser notre jeune héros formidablement interprété par l'acteur Connor Jessup l'éloigne malgré tout d'un monde où le moindre écart est immédiatement sanctionné...


Le film évoque la relation difficile entre le jeune adolescent et son père qui durant des années semble n'avoir pas pris le temps nécessaire pour s'en occuper. Quant à sa mère, elle est partie refaire sa vie. Objet de fascination, la jeune Deanna Roy qu'interprète Alexia Fast est au centre des préoccupation d'un Sean qui prendra des risques insensés pour la retrouver, mettant sa conditionnelle en danger. Blackbird, c'est également l'occasion d'une rencontre entre le héros et Trevor, l'un de ses co-détenus, incarcéré pour avoir assassiné un faux Père Noël et interprété par le charismatique Alex Ozerov-Meyer. Jason Buxton signe une œuvre touchante, jamais voyeuriste ni exhibitionniste. Les quelques sursauts de violence trouvent leur interaction avec l'ensemble du projet. La mise en scène du canadien est aussi digne que l'interprétation. On quitte l'aventure quelque peu désarçonné par le charisme de ses différents interprètes et par l'attachement quasi instantané que l'on ressent envers le personnage de Sean... Blackbird est une formidable expérience de cinéma. Humble et jamais tape à l’œil. Un cinéma généreux, sans trop d'artifices et admirablement incarné...

 

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