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lundi 11 juillet 2022

Fear X de Nicolas Winding Refn (2003) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

En une dizaine de longs-métrages, le réalisateur danois Nicolas Winding Refn aura bâtit une filmographie quasiment exemplaire. Chacun y trouvera de quoi contenter sa passion pour l'approche typiquement scandinave du thriller. Et parmi la récurrente excellence de sa mise en scène l'on notera que Fear X n'est certes pas le plus connu d'entre tous mais qu'il demeure tout de même parmi les sommets d'une carrière extrêmement avare en terme de déception. Réalisé en 2003, le troisième long-métrage de Nicolas Winding Refn fait figure d'hémisphère cérébral droit auquel son auteur choisira de joindre dix ans plus tard, son excellent Only God Forgive, complétant ainsi cette matière généralement grise mais qui dans les deux cas s'enrobera d'un rouge carmin véritablement marquant. L'un et l'autre étant généralement les plus mésestimées des œuvres du danois, elles n'en dégagent pas moins une très grande force d'attraction. Concernant Fear X, le scénario que le réalisateur signera lui-même, adaptant ainsi l'ouvrage de l'écrivain américain Hubert Selby Jr, offre au récit un statut à part. Ici, le thriller n'étant pas synonyme d'action, de fusillades ou de courses-poursuites, l'intrigue nous convie à explorer l'âme d'un homme déchiré par la disparition récente de son épouse. Et pour incarner le héros Harry Caine, qui mieux que le toujours formidable John Turturro ? Point trop d'effort n'est exigé de la part de l'acteur tant la lecture de ses expressions faciales suffit à nous éclairer sur la douleur, les émotions et le manque que ressent cet agent de sécurité travaillant dans un centre commercial. Des sentiments terribles qu'il ressent bien évidemment depuis que la femme de sa vie a été tuée par balle par un inconnu alors qu'elle venait rejoindre son époux sur le lieu de son travail. La police enquête et possède même une photo du tueur assez floue, laquelle ne parvient malheureusement pas à aider les inspecteurs à mettre un nom sur son visage. Harry lui aussi mène ses propres investigations. Se repassant des heures d'enregistrements de caméras de sécurité du centre commercial qu'un ami lui procure sous le manteau. Jusqu'au jour où en s'introduisant dans la maison se situant en face de la sienne, il met la main sur une pellicule contenant un lot de photographies qu'il s'empresse de faire développer. Sur l'une d'elles, il lui semble reconnaître le visage d'un homme semblable à celui que lui a présenté la police. Harry décortique la photo sous tous les angles et parvient à découvrir qu'elle fut prise dans une petite ville de l’État du Montana...


Ce qui au mieux pourrait passer pour de l'omniscience et au pire pour des facilités d'écriture assez peu crédibles va en fait nourrir un récit qui sous des dehors languissants va permettre à Nicolas Winding Refn de développer un scénario ambitieux quoique parfois ténébreux. Douze ans après avoir déjà parcouru de long en large les couloirs de l'hôtel du chef-d’œuvre de Joel et Ethan Coen Barton Fink, voici que déambule dans ceux de Fear X (également connu sous le titre Inside Job) un John Turturro véritablement habité. Nicolas Winding Refn semble parfois se confondre dans des univers proches de ceux décrits par un certain David Lynch, les sous-sols où mènent notre héros l'ascenseur de l'hôtel réfléchissant cette même obscurité que l'angle improbable de l'appartement de Fred Madison dans l'incroyable Lost Highway qui vit le jour six ans auparavant. La séquence la plus insignifiante prend ici une tournure hypnotique sans équivalant. Et encore et toujours grâce à l'interprétation toute en retenue et pudeur mais non dénué d'expressivité de son principal interprète. La séquence lors de laquelle une jeune femme lui propose ses services étant particulièrement significative. Le trouble étant moins relatif à l'hypothèse selon laquelle celle-ci et Harry pourraient avoir une relation sexuelle que dans l'idée particulièrement dérangeante qu'une femme puisse s'immiscer dans le cœur (ou plutôt, dans l'entrejambe) d'un homme qui vient tout juste de perdre la femme de sa vie. Dépassés les débordements graphiques des œuvres antérieures de Nicolas Winding Refn, Fear X est d'une finesse et d'une sobriété exemplaires. Si la quête du grand méchant loup est primordiale pour le héros, pour le spectateur elle demeurera lettre morte puisque le danois ne nous fera pas don d'un monstre auquel le scénario pouvait prétendre. Il n'y a donc pratiquement que des victimes. De hasard malheureux, collatérales ou porteuses de valeurs morales tronquées. Aux côtés de John Turturro, on notera les présences de la canadienne Deborah Kara Unger ou de James Remar. Quant à la partition musicale particulièrement glaçante qui parcourt l’œuvre dans son entièreté, elle est en partie signée par le grand Brian Eno. Une musique ambiant littéralement obsédante qui colle parfaitement au récit et aux personnages. Un grand moment de cinéma...

 

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