Rien ne va plus pour
Romuald Blindet, le président directeur général de l'une des plus
importantes entreprises de produits laitiers Blanlait.
Alors qu'il a récemment chargé l'un de ses collaborateurs (Gilles
Privat dans le rôle de Paulin) d'augmenter la production de yaourts
de l'une des usines située à Saint-Symphorien, Cloquet, un autre de
ses associés (interprété par Maxime Leroux) en profite pour faire
empoisonner les cuves de l'usine en question afin de faire porter le
chapeau au PDG de Blanlait.
Pire, Blache (encore un collaborateur de Romuald Blindet incarné par
Pierre Vernier) profite de cette occasion pour faire acheter à la
secrétaire du PDG des actions d'une société concurrente qu'il
imagine lancer prochainement une OPA sur l'entreprise Blanlait
(une pratique consistant pour une entreprise à racheter les titres
d'une société à ses actionnaires pour un montant supérieur à
leur valeur). Bref, un joyeux panier de crabes gravitant autour d'un
chef d'entreprise qui n'y voyait jusque là que du feu. Le scénario
de la réalisatrice Coline Serreau (Trois
hommes et un couffin,
La crise,
La belle verte)
appelle fort heureusement à la rescousse un personnage inattendu.
Celui qu'interprète l'actrice et politicienne originaire de
Pointe-à-Pitre Firmine Richard qui dans Romuald et
Juliette
travaille depuis dix ans en tant que femme de ménage dans
l'entreprise de Romuald Blindet. Mère de cinq enfants et autant de
fois divorcée, Juliette Bonaventure laisse un soir très
involontairement traîner ses oreilles et se retrouve bien malgré
elle le témoin des exactions commises par les collaborateur de
Romuald Blindet (ici incarné par Daniel Auteuil). Des forfaitures
qui mèneront le PDG de Blanlait
à sa perte. À moins que cette femme de ménage en question
n'apporte son soutien a ce dernier en témoignant auprès de lui de
ce qu'elle a entendu la nuit précédent le drame ayant fait
quarante-cinq victimes parmi les consommateurs de la marque de
yaourts de l'entreprise Blanlait.
Par un heureux hasard, un homme et une femme qui n'ont pourtant rien
en commun vont voir leur existence bouleversée jusque dans leur
intimité...
Comme
très souvent chez Coline Serreau, le scénario de Romuald
et Juliette fait
preuve d'une intelligence assez peu commune dans le paysage
humoristique français. Surtout à notre époque et alors que le
cinéma dit comique se décompose à vue d’œil, il serait bon de
redécouvrir tout un pan de la comédie française parmi laquelle se
situe justement l’œuvre de la réalisatrice française. La
cinéaste intègre des thématiques sociales qui ne cessent d'être
d'actualité sans pour autant faire preuve d'un trop plein de
caricature ou de démagogie. Pour prendre exemple sur le sujet du
racisme, Coline Serreau oppose par exemple l'attitude fougueuse de
l’aîné de Juliette (Sambou Tati dans le rôle d'Aimé) à celle
de la nouvelle secrétaire de Romuald. En jouant sur la proximité du
titre avec la tragédie de William Shakespeare Roméo
et Juliette,
Coline Serreau indique par avance la tournure que prendront plus tard
les événements. Réunissant ainsi deux univers diamétralement
opposés, deux amants finissant par contrecarrer les préjugés des
entourages respectifs. Il est étonnant de voir à quel point le
long-métrage de Coline Serreau s'accorde sur un même plan que celui
proposé quelques mois auparavant par Claude Sautet et son très
touchant Quelques jours avec moi
dans lequel, déjà, Daniel Auteuil vivait dans la peau de son
personnage prénommé Martial, une histoire d'amour relativement
étonnante en compagnie de Sandrine Bonnaire. Mais dans le cas
présent, pas de PDG dépressif. Tout juste notre acteur tombera-t-il
amoureux d'une femme de ménage après avoir été séduit par une
domestique. Malgré son allure plutôt légère, Romuald
et Juliette est
de ces comédies dramatiques qu'il est toujours bon de redécouvrir.
D'autant plus que Daniel Auteuil et Firmine Richard forment à eux
deux un duo particulièrement attachant opposé à trois spécimens
d'ordures particulièrement gratinés, arrivistes dans deux cas ou
adultérin dans le troisième, et qu'interprètent savoureusement
l'impeccable trio formé de Pierre Vernier, Maxime Leroux et Gilles
Privat. À noter parmi les seconds rôles, la présence d'Isabelle
Carré et de Guillaume de Tonquédec, la première incarnant alors
son tout premier rôle au cinéma. Au final, Romuald
et Juliette
est un pur délice qui se savoure avec autant de plaisir que lors de
sa première découverte...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire