Attiré par l'alléchante
comparaison qui fut faite je ne sais plus où avec Le locataire
de Roman Polanski, c'est avec empressement que je me suis lancé dans
la projection de Occupant
du réalisateur Henry Miller. Son troisième long-métrage après la
comédie Late Watch
en 2004 et le thriller horrifique Anamorph
trois ans plus tard. À la suite du décès de sa grand-mère victime
d'un arrêt du cœur, le jeune Danny vient s'installer dans l'immense
appartement où elle vivait jusqu'ici. La vieille dame bénéficiant
d'une très forte réduction sur le loyer, sur les conseils de Joe,
le portier de l'immeuble, Danny décide de faire appel à un avocat
qui lui conseille alors de rester enfermé durant les douze prochains
jours. Le temps qu'il faudra au magistrat pour obtenir une ordonnance
du tribunal permettant au jeune homme de reprendre l'appartement tout
en conservant le même tarif. Douze journées et autant de nuits qui
vont paraître bien longues à Danny qui demeurera cloîtré avec
pour seule compagnie son chat Dizzie. Si la question de
l'installation dans un vieil immeuble parisien d'un immigré
(polonais chez Polanski) forcément dépaysé ne joue absolument pas
sur l'évolution du récit, quelques facettes du scénario viennent
cependant renforcer les rapports que peuvent entretenir Le
locataire
et Occupant.
Car dans l'un comme dans l'autre sont pris en considération la
solitude et l'absence de contact humain. Deux paramètres qui sont
par contre surtout prépondérants dans le second cas puisque si le
Trelkovsky de Roman Polanski conservait un certain contact avec ses
collègues de travail et certains de ses très étranges voisins,
Danny s'isole complètement et n'a de contact pratiquement qu'à
travers le judas de sa porte d'entrée...
D'où
l’afflux permanent d'idées noires et de fantasmes liés à la peur
de l'intrusion. Car celui qui au commencement n'acceptait pas l'idée
de venir s'installer dans l'appartement de sa grand-mère tient
désormais l'éventualité d'y vivre comme un acquis. Sans être
aussi captivant et terrifiant que le cauchemar mis en scène par
Roman Polanski trente-cinq ans auparavant, le long-métrage de Henry
Miller cultive suffisamment de mystère pour que l'on demeure scotché
à notre fauteuil. Pour cela, le réalisateur utilise des artifices
qui vont durant une bonne partie du long-métrage noyer le poisson.
Un portier très étrange dont le premier contact ne le sera pas
moins (une main posée sur la jambe de Danny avant qu'elle ne vienne
caresser sa joue, rien de mieux que de poser les bases d'une attitude
qui demeurera jusqu'au bout, relativement ambiguë), un avocat qui
subitement cesse de donner de ses nouvelles, une nouvelle relation
(Cody Horn dans le rôle de Sharleen Hunt) qui disparaît en pleine
nuit, des commandes et des livraisons dont Danny ignore tout, un
dératiseur retrouvé mort dans l'appartement, un peintre qui tombe
accidentellement de son échafaudage, des voisins louches qui rôdent
dans les parages... il y a là de quoi faire monter la pression et le
film y parvient sans mal au point que l'on peut ressentir cette même
angoisse qui étreint Danny qu'interprète l'acteur Van Hansis...
Tout
ceci auquel s'ajoutent une buanderie renfermant un trou débouchant
sur un vide profond ou des bruits étranges qui se manifestent
régulièrement et l'on tient là l'un de ces mystères dont il nous
tarde de découvrir les tenants et les aboutissants. D'où la
comparaison avec Le locataire puisque
[ATTENTION SPOIL] tout ne sera finalement question que d'un trouble
psychiatrique de type paranoïaque liée à l'isolement. Douze jours
qui se décompteront en l'espace de quatre-vingt six minutes mais
dont seules les soixante ou soixante-cinq premières satisferont
notre goût pour le mystère... Car une fois la vérité accueillie
comme seule hypothèse réelle aux événements qui viennent de se
dérouler sous nos yeux, tout ce qui vient ensuite n'est plus que du
remplissage et ne permet plus à Henry Miller de conserver le
spectateur sous pression. Quant aux dernières images, si tant est
qu'elles puissent éclairer les spectateurs qui n'auraient pas encore
tout compris de cette ''affaire'', elles déboulent avec un train (et
beaucoup de wagons) en retard pour quiconque a saisi depuis un long
moment où le film voulait en venir. Reste que sur plus d'une heure
tout de même, Occupant
demeure un film captivant et plutôt anxiogène...
Superbe film
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