Les film s'articulant
autour d'internet et de ses néfastes effets sont assez nombreux mais
pas toujours de très bonne qualité. Dans le pire des cas on se
farcit des purges comme le Open Window
de Nacho Vigalondo et dans le meilleur, on a parfois
droit à de petits bijoux tels que Searching : portée
Disparue
d'Aneesh Chaganty ou le traumatisant Megan is
Missing
de Michael Goi. Lorsque le cinéaste Hideo Nakata (auteur du
chef-d'oeuvre Dark Water
en 2002) quitta son Japon natal pour l'Amérique afin d'y réaliser
la suite de The Ring
de Gore Verbinski en 2005 qui était déjà lui-même le remake de
Ringu
que le japonais avait tout d'abord réalisé en 1998 (vous suivez?),
on ne s'attendait certainement pas qu'après ce court passage par les
États-Unis, le goût de l'exotisme à l'occidentale lui reprenne
cinq ans plus tard. C'est pourtant malgré tout ce qui se produira en
2010, année où il réalisera sur le territoire britannique le film
Chatroom.
L'une des pierres angulaires d'un genre qui se penche sur les
dérives des réseaux sociaux. Passées les dix premières minutes
environ, véritable supplice pour quiconque n'a pas spécialement
envie de se frotter à des images exhibant des adolescents
caricaturés au possible (est-ce donc cela, ce jeu d'acteurs si
couramment vanté par tant de critiques?) et à des décors qui
évoquent les couleurs flamboyantes d'une Tokyo illuminées aux néons
concentré en un seul lieu clôt et décrépit, le long-métrage de
Hideo Nakata va par la suite nous réserver des surprises que ne
laissent pas forcément entrevoir les premiers instants...
Un
drôle d'univers que ce long couloir qui semble être celui d'un
hôtel et où chaque porte donne sur une Chatroom
(salon
de discussion virtuel mis à disposition des internautes) invitant le
curieux de passage à participer à un thème bien précis. L'action
se situe à Chelsea, un quartier du nord de Londres. William est l'un
de ces adolescents accrocs aux mondes virtuels et aux discussions sur
Internet en particulier. D'où l'idée qui lui vient de créer un
salon consacré aux ''Adolescents
de Chelsea''
qui va bientôt attirer une petite poignée de curieux dont Jim, un
jeune garçon mal dans sa peau auquel ses nouveau amis Eva, Emily, Mo
et donc William vont apporter leur soutien. L'idée de départ de
Chatroom est
donc d'exposer des gamins un peu perdus réunis sur le même salon de
discussion. Mais là où le génie du scénario d'Enda Walsh et de la
mise en scène de Hideo Nakata s'expriment se situe tout autant dans
le visuel que dans la direction d'acteurs. Car s'il faut quelques
instants pour comprendre le principe, le résultat à l'écran ne se
fait pas longtemps attendre. Plutôt que de coller le nez du
spectateur face à des adolescents rivés devant leur ordinateur, le
réalisateur japonais choisi l'option de concrétiser le concept de
discussion sur Internet en créant un décor, représentation
physique d'un univers à l'origine virtuel. Si la pleine
compréhension du principe demande de faire l'effort d'une certaine
gymnastique intellectuelle, une fois acquises les bases du concept,
Chatroom
déroule son implacable récit...
Avec
ce long-métrage, Hideo Nakata s'impose en concurrent direct de
l'américain Gus Van Sant et nous propose une tragédie qui sous des
dehors technologiques et sociaux qui parfois nous dépassent, n'est
rien moins qu'un très brillant exercice de style. Rarement un
cinéaste sera parvenu à rendre aussi concret le concept d'une
virtualité si accaparante dans l'esprit des jeunes gens qui en
exploitent les possibilités qu'elle s'impose dans leur vie de tous
les jours. Entre thérapies de groupe et manipulation, Chatroom
est un salmigondis d'épreuves auxquelles peut être amené à
participer quiconque décide de plonger dans cet univers où la
méconnaissance de celui ou celle avec le ou laquelle nous
communiquons peut devenir dangereux. Hideo Nakata sort de l'univers
dans lequel nous avions coutume de le retrouver (celui des fantômes)
pour nous offrir l'un de ses tout meilleurs longs-métrages. Une
œuvre prenante, émouvante et parfois même dérangeante. Passées
donc les premières minutes lors desquelles les interprètes
ressemblent davantage à des comédiens de théâtre que des acteurs
de cinéma, Aaron Taylor-Johnson, Matthew Beard, Imogen Poots ou
Daniel Kaluuya révèlent leur formidable potentiel. Une très belle
surprise pour un Hideo Nakata que l'on pouvait plus ou moins
s'attendre à retrouver exploiter ce genre de sujet après la
''cassette tueuse'' de Ringu
plus de dix ans en arrière...
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