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dimanche 26 septembre 2021

Onibaba, les tueuses de Kaneto Shindô (1964) - ★★★★★★★★★☆

 


 

Au quatorzième siècle lors d'un conflit opposant les armées d'Ashikaga et de Kusunoki, les hommes sont enrôlés de force tandis que leurs épouses et leurs mère sont restées sur place. Mais alors que les récoltes ont été détruites à la suite d'une pluie de grêle, une femme et sa belle-fille tentent de survivre comme elles peuvent afin de se nourrir en attendant le retour du fils de la première qui est également l'époux de la seconde. En un temps où les règles ne sont plus vraiment respectées, les deux femmes ont temporairement troqué leur rôle de mère et d'épouse contre celui de meurtrières. En effet, dès lors qu'un soldat se perd dans l'immense champ de roseaux qui entoure leur hutte, elle le tuent, le déshabillent, jettent son cadavre dans un puits sans fond et échangent ses affaires contre un peu de nourriture auprès d'un vieil homme réfugié dans une grotte . Mais un jour, un voisin parti en guerre devenu ensuite déserteur réapparaît. Il annonce à la mère et sa belle-fille que celui dont elles attendent le retour est mort. Affamé, les deux femmes nourrissent Hashi (l'acteur Kei Satō) qui très vite tente de séduire l'épouse de son ami disparu sur le champ de bataille. De retour dans propre hutte, il attend avec impatience que la jeune femme accepte de venir le rejoindre le soir, lorsque sa belle-mère s'est endormie...


Réalisé par le cinéaste japonais Kaneto Shindô, Onibaba, les tueuses est un grand classique du cinéma nippon. Un chef-d’œuvre intemporel s'inscrivant dans un contexte historique ainsi que dans le folklore japonais. Équivalent au cinéma expressionniste allemand, le long-métrage fait figure de véritable classique de la dramaturgie du théâtre Nô dans lequel les expressions du visage et la gestuelle des interprètes prennent une place prépondérante sur la parole. Réalisé dans un superbe noir et blanc, ce drame historique à la lisière du fantastique et de l'épouvante attire l’œil dès le départ grâce à son cadre et son ambiance très particulière. Ce puits, déjà, où les deux femmes jettent leurs victimes et qui figure peut-être et même sans doute, une porte donnant directement sur les Enfers. Le cauchemar qu'imprime le réalisateur à la pellicule se lit à travers ce retour à la sauvagerie, cette absence de morale et de conscience quand vient la nécessité de tuer pour survivre. Mais plus sûrement encore sur le visage des interprètes féminines que son Nobuko Otowa et Jitsuko Yoshimura. Qui dans les rôle de la belle-mère et de la belle-fille sont l'incarnation respective du mal et de la lubricité...


Kaneto Shindô réalise une œuvre moite, sauvage, érotique et morbide situant son action au beau milieu d'un champ de roseaux étouffant. Si la caractérisation des ''héroïnes'' est simpliste, tout ou presque de leurs humeurs, de leurs envies et plus globalement de leur perversion se lit directement dans leurs yeux. Deux portraits aidés en cela par une surabondance d'expressions faciales que subliment les éclairages ainsi que la superbe photographie de Kiyomi Kuroda. Musique tribale et guerrière signée du compositeur Hikaru Hayashi, scénario implacable écrit par Kaneto Shindô lui-même, mise en scène et interprétation au cordeau, Onibaba, les tueuses sent littéralement le désir et la mort. Les jeux d'ombres et de lumières permettent d'observer le comportement ambigu des personnages. Le champ et le feuillage des roseaux se referment sur les protagonistes tels des milliers de lames de sabres les retenant prisonniers. Kaneto Shindô filme ses personnages courant dans les champs lors de somptueux travelling latéraux. Nobuko Otowa, Jitsuko Yoshimura et Kei Satō incarnent des créatures fantastiques au sens propre comme au figuré dans des postures théâtrales idéales dans ce genre de conte macabre. Si rien ne semble aujourd'hui plus éloigné de nous que le contexte historique et géographique du récit, il y a des mœurs qui révèlent la nature profonde de l'Homme et ce, quelle que soit son époque. Tout en accusant les cinquante-sept ans d'existence, Onibaba, les tueuses demeure révélateur des bas instincts de l'humanité... Indispensable...

 

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