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mardi 27 juillet 2021

Cobra Verde de Werner Herzog (1987) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

L'acteur Klaus Kinski et le réalisateur Werner Herzog ont en commun leurs origines, cinq longs-métrages de fiction (Aguirre, la colère de Dieu en 1972, Nosferatu Fantôme de la Nuit et Woyzeck en 1979, Fitzcarraldo en 1982 et enfin Cobra Verde en 1987), ainsi qu'une poignées de documentaires les mettant en scène tous les deux lors de leurs divers tournages en commun dont les fascinants Burden of Dreams de Les Blank réalisé en 1982 et My Best Fiend signé de Werner Herzog lui-même en 1998. Après avoir écrit il y a de cela quelques années des articles consacrés aux quatre premiers longs-métrages coopératifs entre les deux hommes, il fallait bien que j'aborde enfin le dernier d'entre eux. Cobra Verde fait voir du pays aux deux hommes, à l'équipe technique et aux spectateurs puisque le film partage son intrigue entre le Sertão qui est une région du Brésil située dans l'arrière pays, le Ghana et enfin le Bénin. Werner Herzog et son acteur fétiche quittent le Pérou de Aguirre, la colère de Dieu et Fitzcarraldo, traversent l'océan Atlantique pour se rendre dans des régions particulièrement arides pour donner vie à l'adaptation du roman The Viceroy of Ouidah du romancier britannique Bruce Chatwin sorti au tout début des années quatre-vingt. Égal à lui-même, Klaus Kinski va y incarner un personnage outrancier dans la démesure. Caricatural diront certains mais toujours aussi impressionnant malgré ses soixante ans passés. L'acteur allemand n'est pas l'unique interprète du réalisateur à avoir déjà collaboré avec Werner Herzog. On y retrouve effectivement José Lewgoy et Peter Berling qui tous deux tournèrent dans Fitzcarraldo, le second ayant même tenu le rôle de Don Fernando de Guzman dans Aguirre, la colère de Dieu)...


Le long-métrage situe tout d'abord son action à la fin du dix-neuvième siècle dans le Sertão tandis que l'éleveur Francisco Manoel da Silva (qu'interprète donc Klaus Kinski) perd ses récoltes et son bétail suite à la sécheresse. Devenu plus tard un voleur redouté par les habitants de la région, il est pris sous l'aile de Dom Octávio Coutinho (José Lewgoy), riche propriétaire d'une très vaste plantation de canne à sucre. Après avoir découvert que ses trois filles ont été engrossées par Francisco Manoel da Silva que tout le monde surnomme Cobra Verde, l'un des proches conseille à Dom Octávio Coutinho d'envoyer ce dernier sur les terres d'un certain Bossa Ahadee, roi du Dahomey (campé par Son Altesse l'Omanhene Nana Agyefi Kwame II de Nsein, un petit village du Ghana) afin de négocier l'achat de nombreux esclaves. Mais ce que ne sait pas Francisco Manoel da Silva, c'est que le producteur de sucre l'envoie en fait à la mort. En effet, le roi du Dahomey ne supportant pas que l'homme blanc ou que de quelconques étrangers foulent ses terres, il a pour habitude de les faire tuer par ses soldats. Mais alors que les jours de da Silva semblaient comptés, celui-ci va collaborer auprès du neveu du roi, bien décidé à prendre le pouvoir avec l'aide de l'homme blanc dont il vient de sauver la tête...


Et à Klaus Kinski et Werner Herzog de débarquer maintenant en Afrique, sous une chaleur torride qui se lit sur le visage en sueur de l'acteur qui pourtant, malgré l'étouffante atmosphère, ne se ménage pas. Comme il le fit avec les indigènes du Pérou plus de dix ans en arrière, le réalisateur emploie désormais des centaines d'autochtones de la région, donnant une couleur toute particulière à sa dernière collaboration auprès du colérique Klaus Kinski. Parfois à la limite du documentaire, Cobra Verde est surtout un somptueux voyage en terres africaines que le réalisateur nous fait découvrir à son rythme, sans trop se presser, avec ce sentiment très étrange que nous fait ressentir la partition musicale de l’indécrottable groupe phare du rock choucroute auquel le réalisateur faisait régulièrement appel à l'époque. En effet, sous l'égide de Florian Fricke (disparu maintenant depuis vingt ans à seulement cinquante-six ans), le fondateur du groupe, la musique de Popol Vuh épouse parfaitement les contours visuels de certaines séquences réellement ''trippantes''. Une œuvre mêlant une certaine idée du colonialisme (l'homme blanc prenant possession ici d'une stupéfiante bâtisse et agissant comme l'ambassadeur d'un peuple jusqu'ici abandonné à son triste sort). Plutôt que de clore avec Cobra Verde un cycle de cinq films, Werner Herzog semble davantage mettre un terme à une trilogie au centre de laquelle la nature y exprime toute sa beauté. Sans doute moins impressionnant que Aguirre, la colère de Dieu ou Fitzcarraldo, Cobra Verde souffre en outre d'un doublage en allemand tantôt approximatif, mais plus assurément en inadéquation avec les autochtones du pays. Malgré tout, cette dernière collaboration entre l'acteur et son réalisateur demeure une très belle expérience cinématographique...

 

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