Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

Labels


dimanche 2 mai 2021

Boris Godounov d'Andrzej Zulawski (1989) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

L'action de Boris Godounov démarre alors qu'une représentation de l'opéra portant son nom s'apprête à débuter à Saint Petersbourg. Mais alors que le public s'installe et que l'orchestre se prépare à jouer, le spectacle est transposé à l’extérieur des murs de l'enceinte. En se libérant des contraintes imposées par les lieux, Andrzej Zulawski s'autorise toutes les folies. Car avec cette vision personnelle de l'opéra Boris Godounov composé à l'origine par le russe Modeste Moussorgski, c'est toute la démesure de l'auteur de L'amour Braque, de La femme publique ou de Possession qui s'exprime ici. Scénarisé par les propres soins du réalisateur lui-même, notons que le violoniste et chef d’orchestre russe Mstislav Rostropovitch désapprouva les bruitages qui furent ensuite ajoutés par dessus l'interprétation musicale de l'orchestre du National Symphony Orchestra de Washington. Pour Andrzej Zulawski, il est tout d'abord important de faire comprendre au public son intention de mettre en avant le fait qu'il ait choisi de mettre en scène la toute première représentation de l'opéra qui eu lieu en 1872. Ensuite, un détail qui pourra certes paraître anodin démontre tout le génie du réalisateur polonais, lequel fait directement entrer les spectateurs au cœur de l'intrigue lorsque est déchiré le décor de fond de l'opéra pour y laisser pénétrer derrière lui sa caméra. En se débarrassant de certaines contingences, Andrzej Zulawski nous livre une œuvre vivante et ce, malgré l'atmosphère d'agonie qui y règne...


En effet, car si Boris Godounov ne revêt sans doute pas l'apparence du biopic rêvé par les historiens, c'est qu'il ne s'attarde que sur une courte période de son existence. Celle qui le voit couronné Tsar avant que la folie ne l'emporte. Soupçonné d'avoir organisé l'assassinat de Dimitri Ivanovitch, né le 19 octobre et mort le 15 mai 1591 à l'âge de huit ans, Boris Godounov aurait donc fait assassiner le jeune enfant que lui et les autorités craignaient de voir prendre le pouvoir et monter sur le trône, poussé dans cette voie par les contestataires de l'autorité du Tsar en place. Spectacle visuel souvent stupéfiant, l’œuvre toute entière d'Andrzej Zulawski fut ponctuée de moments de grâce hystérique qui dans le cas présent se multiplient. Et même si l'on est encore très loin du délirant Diabeł qu'il signa en 1972 et dont la théâtralité était à son comble, Boris Godounov devrait non seulement satisfaire les amateurs d'opéra pas trop regardant sur l'Histoire avec un grand H, mais également celles et ceux pour qui cette dernière est tout sauf une passion et le personnage central, un individu dont seul le nom parle. Faudra-t-il cependant être un féru d'opéra pour digérer les quasi deux heures que dure cet incroyable projet mis en scène par le réalisateur polonais et disponible dans une version restaurée produite un quart de siècle après sa sortie officielle ? Réponse, non : car même si son approche opératique empêchera sans doute une partie de son public d'arriver jusqu'à l'extase d'un Sanatorium pod Klepsydrą (La Clepsydre), chef-d’œuvre absolu signé en 1973 par son homologue polonais Wojciech Has, Andrzej Zulawski signe un spectacle total...


brillamment mis en scène, sa caméra n'ayant aucune peine à virevolter comme cela est de coutume chez le cinéaste. Malgré les reproches fait à l'encontre du long-métrage par Mstislav Rostropovitch (chose que l'on peut comprendre si l'on se met un instant à la place du chef d’orchestre), Boris Godounov s'avère un voyage extraordinaire sur le plan visuel autant que sur le plan musical. En effet, les costumes de Magdalena Biernawska-Teslawska et le travail abattu par le département leur étant consacré est absolument remarquable. Tout comme les décors, les maquillages ou la photographie de Pierre-Laurent Chénieux. Fidèle au cinéaste polonais depuis Possession en 1981, la monteuse française Marie-Sophie Dubus (Le Vampire de Düsseldorf de Robert Hossein en 1965, Les Fugitifs et Le Jaguar de Francis Veber en 1986 et 1996) effectue un travail lui aussi remarquable et qui donne littéralement le vertige. Cependant, et même si cela ne gênera sans doute en rien les néophytes qui découvrent ici l'univers de Modeste Moussorgski et de son célèbre opéra, il faut savoir qu'Andrzej Zulawski semble n'avoir retenu qu'une partie de l’œuvre du compositeur, ce qui pour les puristes, risque d'avoir du mal à passer. Ce qui par contre est visible à l'écran et s’avérera déjà beaucoup plus gênant pour le plus gros des spectateurs se situe au niveau des doublages. En effet, si les chants demeurent formidables, il est clair qu'entre ceux-ci et ceux qui les interprètent, les voix et les lèvres posent un grave problème de synchronisation. Ce qui pour une partie de l’œuvre, quelle que soit son importance, gâche un peu le tableau. Et puisque l'on parle de tableaux, évoquons ceux qui traversent littéralement le récit... cet aspect que renforcent des images absolument éblouissantes de couleurs, des décors fantastiques donnant à l'ensemble l'apparence d'une succession d’œuvres picturales du plus bel effet. Quant à l'acteur principal, le chanteur d'opéra italien Ruggero Raimondi, son charisme envoûte littéralement le cadre et les spectateurs. Foisonnant de figurants et de décors dantesques, Boris Godounov n'est peut-être pas l'opéra rêvé mais permettra sans doute aux néophytes d'introduire le genre sans trop de difficultés...

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...