Première approche du
maître danois Nicolas Winding Refn, il y a sept ou huit ans avec son
incroyable trilogie Pusher
sur les conseils d'un ami que je cataloguerai de clairvoyant. Trois
polars sombres, nerveux, avec un pic émotionnel en deuxième acte
(exceptionnel Mads Mikkelsen). Puis quelques mois plus tard,
découverte du tout aussi frappant Bleeder
réalisé trois ans après le premier volet de sa trilogie, soit en
1999. Fin de siècle déprimante avec un Kim Bodnia formidable.
Bronson
faisant suite, petite déception très rapidement effacée lors d'une
seconde projection. Valhalla
Rising,
seconde déception qui contrairement au film précédent sorti un an
auparavant en 2008 persiste encore aujourd'hui. Puis Drive
que je bouderai durant cinq ans, pensant à une relecture moins
acnéique de la saga Fast
and Furious
dont je n'ai de toute manière jamais vu aucun des longs-métrages.
Fausse route mais très belle surprise. Non, le cinéma du danois
n'est pas mort. Pourtant, Only
God Forgives
viendra fausser mes impressions. À tel point que je me refuserai
d'aller jusqu'au bout de l'expérience. Mais alors que Neon
Demon
se profile dans mon agenda alors qu'il est pourtant sorti depuis
quatre ans, il fallait que je me replonge dans le récit de ce
neuvième long-métrage.
Et
à dire vrai, il aurait été dommage de ne pas justement replonger
dans ce qui demeure en fait comme un long-métra ge majeur dans la
carrière de son auteur. C'en est même tétanisant. Là où
Valhalla
Rising péchait
sans doute par excès de silences quatre ans plus tôt, Only
God Forgives
gagne ses gallons d’œuvre envoûtante justement parce qu'il sait
tempérer entre ces instants de grande violence qui l'émaillent et
la grande fragilité, poésie ou beauté qui se dégage de certaines
séquences. Une contemplation nimbée d'une esthétique de plaques
chauffantes qui donne au spectateur l'impression d'avoir le visage à
proximité d'un brasier alimenté en permanence. Ryan Gosling dans la
peau de Julian Hopkins, spectateur d'une vengeance implacable que
l'on aurait cru le voir brandir d'une main armée mais qui sera
celle de Chang, l'ange de la vengeance. Cette effigie à peine
masquée d'une police dépassant le cadre de sa profession en
s'arrogeant le droit de tuer et ce, en toute impunité. Glaçant est
l'acteur thaïlandais Vithaya Pansringarm qui dans ce rôle porte le
sabre comme un membre supplémentaire et se déplace tel un félin,
tout en finesse, dans des décors d'une richesse visuelle
époustouflante...
Si
le scénario de Nicolas Winding Refn est des plus sommaire, on ne lui
reprochera cependant pas d'avoir fait le choix de Russel Barnes pour
les décors, de Larry Smith pour la photographie ou de Beth Mickle
pour la direction artistique. Un tout petit budget n'atteignant même
pas les cinq millions de dollars pour un résultat réellement
bluffant. Des œuvres de cette ampleur, évidemment, on en redemande.
Même si certaines clés de ce récit demeurent encore dans le flou
après le déroulement du générique de fin. Sans doute avec moins
de force que le chef-d’œuvre de Gaspar Noé Enter
the Void tout
en demeurant dans une certaine mesure dans un contexte similaire, on
ressort de l'expérience repu d'avoir vécu quelque chose de
formidablement viscéral. Aidé par les incarnations des deux acteurs
évoqués plus haut mais aussi celle de la toute aussi éblouissante
Krstin Scott Thomas, Only
God Forgives
est davantage encore que le merveilleux exercice de style qu'il
semble être au départ. Sans doute imprégné de l'univers de
l'italien Dario Argento, des couleurs criardes jusqu'à certains
martellements orchestrés de main de maître par le compositeur Cliff
Martinez, on retrouve ici certaines thématiques du réalisateur
transalpin. Comme les traumas de l'enfance. Parfois boudé, cet
avant-dernier long-métrage de l'auteur de la trilogie Pusher
demeura sans doute l'aboutissement de sa carrière de réalisateur.
Mais
Neon Demon
me dira bientôt si j'ai tort ou bien raison...
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